Interdire les antibiotiques comme facteurs de croissance est primordial pour réduire le risque d'infections causées par de dangereuses bactéries, le Danemark en est convaincu.

Les scientifiques ont démontré que «la consommation routinière d'antimicrobiens comme promoteurs de croissance mène à l'émergence de bactéries résistantes et à des problèmes pour traiter des infections humaines», selon le rapport Data for Action, publié récemment par le National Food Institute du Danemark.

Au Québec, le ministère de la Santé recommande «que soit interdite l'utilisation systématique des antibiotiques comme facteurs de croissance chez les animaux d'élevage». Pourtant, cet usage est toujours légal chez nous.

Il faut dire que le problème de l'antibiorésistance est complexe. «L'arrêt de l'usage des agents antimicrobiens ne s'accompagne pas nécessairement d'une réduction de la résistance microbienne», selon un rapport de l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

Éclatante réussite, l'interdiction d'utiliser l'avoparcine comme facteur de croissance au Danemark, à partir de 1995, a fait rapidement diminuer le taux de résistance à cet antibiotique chez les poulets. Autre bon coup: seuls 3,6% des porcs danois examinés à l'abattoir étaient infectés par les inquiétantes bactéries BLSE en 2011. C'est beaucoup moins qu'en 2010, alors que ce taux a atteint 11%. Le retrait volontaire de l'usage de céphalosporines chez les porcs - des antibiotiques liés à l'apparition de ces bactéries - a donc porté ses fruits.

La moitié des échantillons de poulet contaminés

«La baisse de la résistance après cessation du médicament a été démontrée pour certaines combinaisons de pathogénies et de drogues, convient Robert Charrette, président de l'Association des vétérinaires en industrie animale du Québec. Mais ce n'est certainement pas universel et ç'a souvent été moins important et soutenu que prévu.»

Il est vrai que la moitié des échantillons de viande de poulet danois testés en 2011 contenaient des bactéries BLSE, un taux jugé alarmant par le National Food Institute du Danemark. Or, les céphalosporines n'ont pas été utilisées dans les élevages de poulet au Danemark depuis 10 ans. Explication: la contamination vient probablement des «parents» de ces poulets, importés d'ailleurs.

«Il n'y a pas de garantie qu'en cessant de donner des antibiotiques comme facteurs de croissance, vous sauverez un nombre précis de vies», reconnaît le microbiologiste danois Frank Aarestrup. Mais la façon la plus facile de ralentir la montée des bactéries résistantes, plaide-t-il, reste «de réduire l'usage d'antibiotiques dans tous les réservoirs: chez les humains, les animaux et dans l'environnement».