Valeant a une fois de plus été hantée par son passé trouble, jeudi, après la publication d'un article affirmant qu'une demande d'information effectuée par les autorités américaines en est maintenant au stade d'enquête criminelle.

Cette nouvelle tuile a eu des répercussions à la Bourse de Toronto, où l'action a plongé de 11,16 pour cent, ou 3,99 $, pour terminer la séance à 31,76 $.

Citant des sources, le Wall Street Journal affirme que des procureurs fédéraux tentent de déterminer si l'entreprise a berné des assureurs américains en cachant sa relation d'affaires avec une chaîne de pharmacies spécialisée dans les commandes postales.

Les liens entre Valeant et Philidor - qui a maintenant cessé ses activités - avaient été mis au grand jour en octobre dernier par le vendeur à découvert Andrew Left, de la firme Citron Research.

Valeant avait ensuite révélé que les autorités américaines lui avaient demandé de fournir des informations sur un éventail de dossiers, dont des programmes d'aide aux patients, ses activités de distribution ainsi que ses politiques entourant le prix des médicaments.

Par voie de communiqué, la pharmaceutique établie à Laval s'est limitée à dire qu'elle ne pouvait commenter davantage ou spéculer sur le déroulement d'une enquête en cours.

«Valeant prend ces allégations au sérieux et nous respectons les standards d'éthique les plus élevés», fait-elle valoir.

Le bureau du procureur général à New York n'a pas voulu commenter.

Si la société a prévenu que de lourdes amendes et sanctions administratives pourraient découler des enquêtes en cours, son président et chef de la direction, Joseph Papa, a affirmé au réseau BNN qu'aucune somme n'avait été provisionnée à cet effet.

La priorité est de réduire la dette de l'entreprise, a-t-il dit, ajoutant qu'il pourrait s'écouler plusieurs années avant les premiers versements liés à de potentielles pénalités.

M. Papa, qui a affirmé plus tôt cette semaine que l'entreprise pourrait éventuellement changer son nom si la réputation associée à sa marque actuelle nuisait à son plan de redressement, a décliné une demande d'entrevue.

Certains analystes s'attendent à ce que Valeant soit forcée d'allonger plus de 1 milliard $ US en raison des amendes et pour régler d'autres poursuites déposées contre elle.

«Je crois que ça va être une facture salée si on additionne tous les montants», a affirmé l'analyste Vicki Bryant, de la firme Gimme Credit, au cours d'un entretien téléphonique.

Celle-ci s'est également dite troublée par les efforts déployés par Valeant dans le passé pour cacher sa relation d'affaires avec Philidor, qui a pris fin en octobre dernier.

Cette enquête criminelle pourrait aussi représenter une «distraction» supplémentaire pour la direction de la pharmaceutique, qui tente actuellement de renégocier les modalités de certains prêts avec ses créanciers.

Par ailleurs, outre la pharmaceutique, les fondateurs de Philidor, Andrew et Matthew Davenport, seraient visés par l'enquête criminelle, affirme le quotidien new-yorkais.

«À chaque jour, on se retrouve avec une autre enquête, une autre poursuite, a analysé Mme Bryant. Cela ne fait que renforcer le sentiment de scepticisme des investisseurs et des actionnaires.»

Valeant accumule les controverses depuis un an. En plus de faire l'objet d'une enquête de la Securities and Exchange Commission (SEC), l'entreprise est dans la mire du Congrès américain en raison de hausses vertigineuses du prix de certains médicaments.

Au Québec, l'Autorité des marchés financiers (AMF) dit suivre la situation «de près» et poursuivre sa collaboration avec la commission américaine des valeurs mobilières.

Bien que les controverses représentent un risque important pour Valeant, l'agence de notation Moody's a tempéré les impacts de cette enquête criminelle pour fraude.

Selon son premier vice-président, Michael Levesque, cela ne devrait pas alourdir la tâche de la société lorsque viendra le temps de s'asseoir avec ses prêteurs.

D'après des documents déposés auprès d'un comité sénatorial américain, la relation d'affaires entre Valeant et Philidor s'est amorcée en 2013 dans le cadre d'un projet pilote.

En 2015, Philidor vendait plus de 50 médicaments fabriqués par Valeant, ce qui lui a permis de réclamer à son partenaire des honoraires de plus de 80 millions $ US, comparativement à 17 millions $ US en 2014.