Une nouvelle vague de données économiques décevantes publiées vendredi a fait dire à certains observateurs que l'économie canadienne se destinait à finir l'année en queue de poisson.

Environ 35 700 emplois ont disparu en novembre au pays, a indiqué vendredi Statistique Canada, tandis que le taux de chômage a avancé d'un dixième de point de pourcentage, à 7,1%.

Entre-temps, les exportations canadiennes ont fait du surplace en octobre, ce qui a permis au déficit commercial d'augmenter à 2,76 milliards $.

Ces chiffres commencent à dresser la table pour un quatrième trimestre décevant du point de vue économique. Plus tôt cette semaine, les données sur le produit intérieur brut ont fait état d'une contraction de 0,5% de l'activité économique en septembre, dernier mois du troisième trimestre.

Cette piètre performance trimestrielle a amoindri le résultat pour l'ensemble du trimestre, qui était plus encourageant. Le PIB réel a rebondi de 2,3% pendant cette période, après s'être contracté lors des deux premiers trimestres de 2015.

Le Canada continue à être touché par la faiblesse soutenue des prix des matières premières et par les revers connus par plusieurs secteurs, comme ceux de la fabrication et des exportations, qui n'arrivent pas à prendre le relais.

« Je suis inquiète », a affirmé vendredi Sherry Cooper, économiste en chef pour les Centres hypothécaires Dominion. « Maintenant, nous avons encore plus de données et ces données ont aussi montré un affaiblissement inquiétant dans l'économie canadienne. »

Les chiffres dévoilés vendredi font suite aux avertissements de plusieurs experts. Le nouveau gouvernement libéral a lui-même prévenu récemment que l'empreinte fiscale du Canada serait inférieure de plusieurs milliards de dollars à ce qui était prévu.

La situation pourrait être particulièrement problématique pour les libéraux, qui ont été élus en promettant que les déficits budgétaires seraient plafonnés à 10 milliards $ pendant les deux premières années de leur mandat et que le budget serait équilibré d'ici la quatrième année. Le parti s'est notamment engagé à dépenser des milliards de dollars dans les infrastructures pour stimuler l'économie et créer des emplois.

Malgré tout, les chiffres sur l'emploi pour le mois de novembre n'étaient peut-être pas aussi mauvais qu'au premier coup d'oeil.

Les données, moins bonnes que celles attendues par les analystes, étaient attribuables à l'augmentation significative en octobre du nombre de travailleurs temporaires qui ont été embauchés spécifiquement pour l'élection fédérale.

Le nombre d'emplois dans les administrations publiques a diminué de 32 500 en novembre, ce qui a contrebalancé la hausse de 32 000 postes affichée en octobre par la même catégorie.

Malgré tout, les économistes s'attendaient en moyenne à une perte de 10 000 emplois le mois dernier, et ils croyaient que le taux de chômage resterait inchangé à 7,0%, selon les prévisions recueillies par Thomson Reuters.

Selon le rapport, quelque 82 000 emplois dans les services publics ont été perdus le mois dernier dans, ce qui inclut le déclin significatif dans le travail des administrations publiques. Les pertes ont été de 15 600 emplois dans le commerce de détail et de gros, de 11 900 dans le secteur de l'information, de la culture et des loisirs et de 11 200 emplois dans la finance, l'assurance, l'immobilier et la location.

« Je dirais que c'est décevant, en ce sens que ce n'est pas seulement le renversement de l'activité d'embauche lié à l'élection », a observé Dawn Desjardins, économiste en chef adjointe à la Banque Royale.

Même avec cette glissade, a-t-elle toutefois noté, le Canada a gagné plus de 150 000 nouveaux emplois liés au secteur des services depuis décembre dernier.

« Alors, ce n'est pas une histoire horrible (...) mais je crois que nous avons besoin de voir une reprise alors que nous avançons dans le mois de décembre, ne serait-ce que pour évacuer l'inquiétude que quelque chose ne tourne pas rond ici », a poursuivi Mme Desjardins.

Le nombre total d'emplois à temps partiel a diminué de 72 300 en novembre, par rapport au mois précédent, tandis que celui des emplois à temps plein a grimpé de 36 600.

À l'échelle provinciale, l'Alberta, qui peine à se remettre de la chute des prix dans le secteur de l'énergie, est la province qui a perdu le plus d'emplois. La province de l'Ouest a vu son taux de chômage passer de 6,6% à 7,0% - son plus haut niveau depuis avril 2010 -, alors que 14 900 personnes ont perdu leur emploi. Ce déclin d'octobre à novembre était le plus important de toutes les provinces.

Toutes les provinces ont enregistré une diminution du nombre d'emplois, à l'exception de la Saskatchewan et de Terre-Neuve-et-Labrador, qui ont profité de faibles augmentations par rapport à octobre.

Au Québec, l'emploi a peu varié pour un quatrième mois consécutif en novembre, et le taux de chômage s'est établi à 7,5%. Comparativement à 12 mois plus tôt, l'emploi dans la province était en hausse de 30 000 (+0,7%), du fait de la progression du travail à temps plein.

À l'échelle du pays, le nombre d'emplois a diminué de 21 200 dans le secteur public et de 40 800 dans le secteur privé. Cependant, le nombre de travailleurs autonomes a progressé de 26 300.

Le taux de chômage chez les jeunes a atteint en novembre son plus faible niveau depuis 2008, reculant à 12,7%, par rapport à 13,3% en octobre.

Cette diminution a étonné compte tenu de la disparition de 23 600 emplois dans la catégorie des travailleurs de 15 à 24 ans, mais elle était partiellement attribuable au fait qu'un moins grand nombre de jeunes étaient à la recherche d'un emploi en novembre.

Comme plusieurs experts, Mme Desjardins prédit que l'économie canadienne et les exportations rebondiront avec l'aide du raffermissement de l'économie américaine.

Elle était néanmoins étonnée que les chiffres du Canada sur les échanges commerciaux, qui étaient plutôt encourageants cet été, se soient dégonflés à l'automne.

« Nous nous disions pratiquement «Wow, voilà ce que nous attendions» (lors de la publication des chiffres sur le commerce en juin) », se souvient-elle.

« Alors il est décevant que cet élan ne se soit pas poursuivi en octobre. »