Le géant britannique des télécoms Vodafone a légèrement levé le voile lundi matin sur les détails de l'accord qu'il s'apprête à annoncer avec son partenaire américain Verizon, qui devrait racheter ses 45% de leur filiale commune.

Le groupe britannique a confirmé «être en discussions avancées avec Verizon Communications» concernant la vente de sa participation dans Verizon Wireless «pour 130 milliards de dollars», chiffre qui n'avait jusqu'alors été évoqué que par les analystes et les médias.

Le pactole tomberait dans son escarcelle «en liquidités et en actions», a-t-il précisé.

Mais il n'est pas encore certain qu'un accord soit trouvé, a nuancé le groupe, soulignant qu'«une annonce sera faite dès que possible».

Une telle opération deviendrait la deuxième plus importante transaction de tous les temps derrière le rachat par... Vodafone de l'Allemand Mannesmann pour 172 milliards de dollars en 1999.

Vodafone avait confirmé jeudi sans autre détail qu'il discutait avec Verizon d'une éventuelle cession de ses actifs américains, constitués surtout de sa participation dans Verizon Wireless. De son côté, Verizon continuait de s'abriter derrière un «pas de commentaire».

La Bourse de Londres a une nouvelle fois bien accueilli ces nouvelles précisions: l'action Vodafone s'est envolée lundi à l'ouverture du marché de plus de 4%, prenant la tête de l'indice vedette FTSE-100. À 11 h 50 (10 h 50 GMT), le titre progressait encore de 3,81% à 214,10 pence dans un marché en hausse de 1,62%. En une semaine, le titre s'est apprécié de près de 12%.

Dimanche, plusieurs médias des deux côtés de l'Atlantique avaient rapporté qu'un accord avait été trouvé et qu'il n'attendait plus que l'assentiment des conseils d'administration respectifs des deux groupes. Celui de Vodafone se serait déroulé dimanche, tandis que le calendrier de celui de Verizon était plus incertain, car lundi est férié aux États-Unis.

Le Wall Street Journal, faisant référence à une «personne au courant de la situation», avançait que l'accord pourrait être annoncé «dès lundi après-midi».

Créé en 2000, Verizon Wireless est le plus gros opérateur américain de téléphonie mobile, avec 100,1 millions de clients et 73.4000 salariés. Basée à Basking Ridge, dans le New Jersey, la coentreprise a dégagé en 2012 un chiffre d'affaires de 75,9 milliards de dollars, selon le site internet du groupe.

Verizon veut depuis plusieurs années racheter la participation de son homologue britannique, mais les discussions ont plusieurs fois été suspendues, faute notamment d'entente sur le prix.

Les négociateurs tentaient entre autres de parvenir à un accord permettant à Vodafone de minimiser le coût de son imposition sur cette opération. «La facture pourrait être énorme, on parle de 30 à 40 milliards de dollars d'impôts», souligne Allan Nichols, analyste à Morningstar. «Mais il y a des moyens de la contourner et le total va probablement être inférieur à 10 milliards de dollars».

Selon la presse britannique, la ponction fiscale sur l'opération pourrait être limitée à 5 milliards de dollars grâce à une législation de 2002 sur les plus-values et à l'utilisation par Vodafone d'entités basées au Luxembourg.

Concurrence de plus en plus pressante

Selon les termes de l'arrangement, Verizon paierait environ pour moitié en actions --la capitalisation boursière du groupe s'élève actuellement à 135 milliards de dollars-- et pour moitié en numéraire, a avancé le journal britannique The Guardian, croyant savoir que cet argent serait levé par «un mélange de prêts et d'émission d'obligations arrangés par JP Morgan, Morgan Stanley, Barclays et Bank of America Merrill Lynch».

Cet afflux de liquidités pourrait permettre au groupe britannique de financer son effort de diversification en Europe --notamment son offre de rachat à 7,7 milliards d'euros du premier câblo-opérateur allemand Kabel Deutschland-- tout en se débarrassant d'une participation minoritaire qui ne lui assure aucun contrôle sur Verizon Wireless.

Il interviendrait par ailleurs à un moment où Vodafone fait face à de sérieuses difficultés sur certains marchés, en particulier dans le sud de l'Europe, où les économies ont souffert de la crise de la dette dans la zone euro.

Verizon Wireless «est un excellent investissement» et «un actif fantastique qui génère beaucoup d'argent tous les mois», avait souligné en mai Vittorio Colao, directeur général de Vodafone.

Mais le groupe a aussi préféré dans le passé se défaire de ses participations minoritaires, comme ses 44% dans l'opérateur français SFR, cédés à Vivendi en 2011.

L'opération permettrait parallèlement à Verizon d'avoir les mains entièrement libres pour conduire sa stratégie. «Ce sera très simple en termes de prises de décision, ils n'auront pas à tout faire valider par Vodafone», remarque James Morgan, analyste de S&P Capital IQ.

Ce contrôle est d'autant plus crucial que la concurrence sur le marché de la téléphonie mobile se fait de plus en plus pressante aux États-Unis avec l'essor des opérateurs comme T-Mobile ou Sprint, ce dernier bénéficiant d'une assise beaucoup plus solide depuis son rachat en juillet par le groupe japonais de télécommunications Softbank.