Le voyage sud-américain du premier ministre Stephen Harper peut être perçu à tort comme un contre-feu pour faire oublier le scandale qui éclabousse son cabinet depuis quelques jours, à propos des dépenses illicites de sénateurs conservateurs.

Le Pérou et la Colombie, où il fait escale, sont deux des quelques pays avec qui le Canada a signé des accords de libre-échange. En outre, c'est dans le premier qu'a commencé la semaine dernière la 17e ronde des négociations en vue d'un accord de Partenariat transpacifique (PTP). Outre le Pérou et le Canada, les négociations incluent aussi le Chili, la Nouvelle-Zélande, Singapour, le Brunei, l'Australie, le Vietnam, la Malaisie, le Mexique et le Japon.

Cette idée est née en 2005, mais ce n'est que l'an dernier que le Canada s'est joint à la table des négociations où sont en jeu une entente douanière, une cohésion réglementaire et des accords en matière de télécommunications.

Le Canada négocie aussi des accords de libre-échange avec l'Union européenne, le Japon, la Corée du Sud et l'Inde. Dans chacun des cas, le processus se révèle laborieux.

Le Canada doit absolument diversifier ses marchés d'exportation depuis que la Chine l'a supplanté comme premier fournisseur des États-Unis.

Selon les données du Fonds monétaire international citées par Christy Chen, économiste chez BMO Marchés des capitaux, la part des exportations canadiennes dans les échanges mondiaux est passée de 4,5% à 3,0% depuis le début du millénaire, une chute du tiers.

Dans ce contexte, participer aux négociations du PTP est avant tout une stratégie défensive, assure l'économiste.

Mardi, le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, a souligné à sa manière la détérioration des échanges commerciaux du Canada depuis la récession. «Les exportations accusent maintenant une insuffisance de plus de 130 milliards par rapport à ce qu'elles auraient été lors d'une reprise «normale» de l'après-guerre.»

Certaines provinces comme le Québec ont pu compenser la baisse de leurs livraisons internationales par une augmentation de leurs échanges interprovinciaux, mais pas toutes.

Dans le cas du Québec toutefois, la dégradation du solde commercial n'a pas commencé avec la récession, mais au tournant du millénaire.

Selon Hélène Bégin, économiste principale au Mouvement Desjardins, plusieurs éléments structurels ont complètement transformé le portrait des exportations québécoises: chute de la production de matériel de télécommunications avec le techno-krach qui a entraîné la faillite de Nortel, rationalisation du secteur forestier, abolition des tarifs sur les textiles et le vêtement, entrée de la Chine dans l'Organisation mondiale du commerce et appréciation du dollar canadien. Elle aurait pu ajouter la fermeture de l'usine de GM à Boisbriand, dont l'essentiel de la production alimentait le marché américain.

Le Québec exporte lui aussi moins qu'avant aux États-Unis: de 57,2 milliards en 2002, la valeur de ses livraisons internationales n'était plus que de 43,5 milliards l'an dernier. La hausse des expéditions vers d'autres marchés est passée entre-temps de 11 à 20 milliards, ce qui n'a pas suffi.

Comme le prix du pétrole a triplé durant la même période, le déficit commercial de biens et services avoisine désormais les 30 milliards. La conquête de nouveaux marchés est assurément plus impérative encore que pour le Canada dans son ensemble.