Bien que Marc Tellier ait été le PDG québécois le mieux payé en 2010, comme nous l'a rappelé hier une étude du Centre canadien des politiques alternatives (CCPA), le patron de Yellow Média (T.YLO) ne touchera probablement jamais la moitié de sa rémunération estimée à 8,9 millions de dollars cette année-là.

En novembre 2010, M. Tellier a reçu 7 millions d'options d'achat d'actions de Yellow Média. D'une durée de cinq ans, elles ne peuvent être exercées avant novembre 2013. En date d'aujourd'hui, elles valent 0$, car le cours de l'action de Yellow Média, autour de 20 cents, étant très inférieur au prix d'exercice des options fixé à 6,35$. À l'époque de leur octroi, la société attribuait une valeur de 4,5 millions à ces options.

L'année 2011 a été catastrophique pour les actionnaires de l'éditeur des Pages Jaunes. L'action a dégringolé en Bourse tout au cours de 2011, avant de s'écraser en septembre après que la société eut annoncé l'annulation de son dividende et radié 2,9 milliards en actifs intangibles.

Dans une étude parue le 3 janvier sur les 100 PDG les mieux rémunérés au Canada, le CCPA souligne que l'élite des dirigeants gagne en moins de trois jours l'équivalent du salaire moyen des Canadiens, évalué à 44 366$. Afin de réduire les inégalités dans la société canadienne, le groupe de réflexion demande que les options et unités d'actions soient dorénavant imposées à 100% comme tout autre revenu de travail plutôt que comme un gain en capital, qui profite d'une exonération d'impôt de 50%.

En plus de son salaire de base de 825 000$ par année - gelé depuis trois ans -, M. Tellier a encaissé 3,7 millions en vertu d'un nouveau programme d'encouragement de court terme qui remplace les programmes d'encouragement récurrents, suspendus en 2010. Il a reçu puis vendu 659 386 actions avec restrictions à un prix moyen de 5,68$.

La moitié de l'octroi lui était acquise à la fin de l'exercice 2010, l'autre moitié dépendait de l'atteinte d'un bénéfice avant impôt, intérêt et amortissement (BAIIA) de 895 millions, avant les frais de conversion de la fiducie en société par actions et de nouvelle marque. Avec un BAIIA de 850 millions et des frais de 48,5 millions, l'entreprise a touché sa cible de justesse.

Cette facture de 48,5 millions est six fois plus élevée que la deuxième conversion de fiducie la plus coûteuse, a constaté Adam Shine, analyste de la Financière Banque Nationale, comme l'a rapporté notre collègue Sophie Cousineau en juin dernier.

La retraite à 45 ans

En outre, l'octroi est survenu une année où le conseil d'administration n'a autorisé aucun paiement sur les unités d'actions attribuées en 2008 et qui devenaient acquises en 2010. Le conseil d'administration a pris cette décision parce que certains critères, comme la croissance de l'encaisse distribuable par part, n'ont pas été atteints.

Toujours en 2010, Yellow Média a bonifié le régime de retraite de Marc Tellier l'incitant «à demeurer au service de la société au moins jusqu'en août 2013». En vertu de ces changements, M. Tellier, 43 ans, pourra prendre sa retraite dès l'âge de 45 ans en touchant environ le tiers de sa rente. Ce pourcentage augmentera pour atteindre 100% de la prestation, rendu à 55 ans.

Deux démissions au C.A.

Le 22 décembre, Yellow Média a annoncé le départ de deux administrateurs, dont Heather Munroe-Blum, qui siégeait au comité des ressources humaines et de rémunération. C'est ce comité qui a proposé et recommandé au conseil d'administration l'acceptation des diverses composantes de la rémunération de Marc Tellier. Mme Munroe-Blum est principale et vice-chancelière de l'Université McGill. Stuart Smith, président du comité de vérification, a aussi remis sa démission.