Alors que la plupart des patrons italiens n'en peuvent plus des frasques de Silvio Berlusconi, Carlo Pagani a flairé la bonne affaire en créant la marque «Bunga Bunga band» sous laquelle il vient de lancer un bracelet aux senteurs présumées aphrodisiaques.

M. Pagani n'est pourtant pas un habitué de ce genre de gadget. Basée près de Bergame, son entreprise, Castelberg Technologies, qui emploie 40 personnes, produit des accessoires ou des bijoux en plastique, notamment pour le compte de grands groupes comme Mars, L'Oréal ou Prada.

Une de ces PME familiales typiques du nord de l'Italie, qui font la force de l'économie de la péninsule.

Jusqu'au jour où la soudaine renommée du terme «Bunga Bunga» - surnom donné aux soirées de débauche présumées du chef du gouvernement italien qui sont au centre du procès Rubygate où M. Berlusconi est accusé de prostitution de mineure - lui donne des idées.

«Quand nous avons vu le mot Bunga Bunga, cela a sonné pour nous comme un mot magique», explique le patron, qui a déposé une dizaine de noms de marques contenant «Bunga Bunga» et a investi jusqu'à présent 200 000 euros, en particulier en promotion, afin d'en faire une «marque mondiale» misant sur un public jeune.

Depuis début septembre, l'entrepreneur assure avoir déjà vendu 100 000 bracelets en plastique parfumé, distribués dans 20 000 kiosques du pays.

D'ici quelques mois, ils devraient être vendus en Suisse et le groupe indique avoir également des contacts avec des distributeurs en France, dans les pays scandinaves, en Allemagne, en Russie...

Ce bracelet n'est que le premier d'une longue série d'articles «Bunga Bunga band» que M. Pagani veut mettre sur le marché prochainement : colliers, porte-clés, parfums, déodorants, huile pour le corps, sous-vêtements, habillement, montres...

L'entrepreneur n'est toutefois pas le seul à avoir été inspiré: le «Bunga Bunga» est le nom d'un bar de Livourne en Toscane ou d'un restaurant londonien et des T-shirts Bunga Bunga sont vendus dans certains lieux touristiques en Italie.

Mais lorsqu'on lui rappelle l'interprétation scabreuse du terme, M. Pagani conteste. «Tous les mots peuvent avoir des significations différentes. Pour nous, Bunga Bunga a un sens extrêmement positif: joie de vivre, jeunesse», avance-t-il. «Bigot soit qui mal y pense», clame d'ailleurs la chanson de promotion de la marque.

«Quand on me demande ce que cela veut dire, je dis que cela signifie fleur en indonésien», répond, ingénue, Jacqueline Arias, jeune fille de 18 ans au physique de «veline» (terme italien pour désigner les jeunes femmes sexy que l'on retrouve notamment sur les télévisions du Cavaliere), qui assure la promotion de la marque dans les discothèques.

M. Pagani assure en outre n'avoir aucun grief contre Silvio Berlusconi.

La marque «n'a aucune connotation politique. Nous respectons tous les hommes politiques, même Berlusconi», répond l'entrepreneur qui compte envoyer un bracelet au président du Conseil et se dit certain que «cela le fera rire».

Tout ceci ne semble pourtant pas amuser les télévisions du Cavaliere qui «n'ont pas accepté» de passer la publicité «Bunga Bunga band», dénonce Franco Donato, responsable de la promotion du projet. «En Italie, parler du pape ou de Berlusconi, c'est difficile», regrette-t-il.

Alors que les appels à la démission du Cavaliere, accusé de miner la crédibilité du pays, se multiplient, M. Donato tient plutôt à remercier le chef du gouvernement: «au moins Berlusconi aura fait quelque chose de bien. Il nous aura fait faire ce bracelet», ironise-t-il.