Sans surprise, la Banque du Canada a reconduit hier son taux directeur à 1% pour la cinquième fois d'affilée.

Elle prend acte de la plus grande robustesse de l'activité économique au tournant de l'année que celle anticipée en janvier. La Banque s'attend désormais à ce que le rythme de croissance de l'économie canadienne soit de 2,9% cette année et de 2,6% en 2012. En janvier, elle tablait plutôt sur 2,4% en 2011 et 2,8% l'an prochain.

Cela ne la pousse pas pour autant à donner la moindre indication quant à la reprise du resserrement monétaire. «Toute nouvelle réduction du degré de détente monétaire devra être évaluée avec soin», lit-on encore cette fois-ci dans le communiqué faisant part de sa décision. Certains observateurs s'attendaient à ce qu'elle signale qu'un resserrement se profile à l'horizon, étant donné la vigueur de l'expansion. «Elle ne paraît pas sur le point de hausser les taux en mai», commente Avery Shenfeld, économiste en chef chez CIBC qui s'attend à un premier tour de vis le 19 juillet.

La Banque indique aussi que l'économie va trotter à 2,1% en 2013, une cadence qui correspond à ce qu'elle voit comme son plein potentiel. Il sera révisé en octobre cependant.

La Banque estime désormais que l'économie aura retrouvé ce plein potentiel au milieu de 2012, soit deux trimestres plus tôt qu'elle l'entrevoyait en janvier. On saura demain ce qui sous-tend cette nouvelle analyse, avec la publication du Rapport sur la politique monétaire.

Cette importante précision suppose que son taux directeur devra avoir atteint un niveau neutre à cette période. Les tours de vis devront donc recommencer bientôt puisqu'un taux neutre se situe à environ un ou deux points de pourcentage au-dessus de l'inflation qui devrait se situer à 2%, à l'été 2012.

Présentement, les signaux inflationnistes sont divergents. L'inflation globale progressait à 2,1% en février et pourrait grimper jusqu'à 3% au cours du présent trimestre, poussée par les prix de l'énergie. L'inflation de base ou sous-jacente, qui exclut les composantes les plus volatiles et l'effet des taxes de vente, n'avançait qu'à 0,9%, mais devrait remonter à 2% puisque «l'offre excédentaire au sein de l'économie se résorbe lentement, que la productivité s'améliore et que les attentes d'inflation restent bien ancrées».

La Banque juge que les sources de l'expansion se déplacent. Les ménages et les gouvernements cèdent le témoin aux investissements des entreprises et aux exportations. «L'amélioration des exportations nettes devrait être limitée davantage par les problèmes de compétitivité persistants, lesquels ont été exacerbés par la vigueur récente du dollar canadien», prévient-elle. La force de notre monnaie atténue cependant aussi les pressions inflationnistes.

Commerce international

Comme pour lui donner raison, Statistique Canada a dévoilé en même temps le solde du commerce international de marchandises en février. Le surplus est d'à peine 33 millions de dollars.

Ce qui fait sourciller cependant, c'est la chute de 5,2% des volumes d'exportations, propulsée par la plongée de plus de 8,1% des produits énergétiques et de 12,4% des produits de l'automobile. La flambée des cours du pétrole taxe la croissance.

Du côté des importations, on constate un repli de 2,3% des achats de machinerie et de matériel importés, malgré la force du huard qui rend ces achats meilleur marché pour les entreprises. Sur une base trimestrielle annualisée, ils restent néanmoins en hausse de 10% sur le quatrième trimestre. «Cela signifie que l'entrave du commerce extérieur devrait être compensée par les investissements accrus des entreprises en machinerie et équipement, ce qui est de bon augure pour des gains futurs de productivité», prédit Marc Pinsonneault, économiste principal à la Banque Nationale

On saura aujourd'hui à combien la Banque évalue l'expansion entre janvier et mars. En janvier, elle misait sur 2,5% en rythme annuel, chiffre qui paraît faible maintenant, étant donné le bond de 0,5% en janvier.

Il serait cependant très étonnant que pareil gain se soit répété en février et en mars, surtout à la lumière des données du commerce extérieur.

La prochaine date de fixation du taux directeur est le 31 mai.