En n'imposant pas les adversaires du Canadien lors des matchs à Montréal, le gouvernement du Québec se prive d'environ 70 000$ de revenus à chaque match disputé au Centre Bell. Actuellement, Québec crédite au moins 700 000$ par saison aux joueurs du Tricolore pour les impôts exigés par les États américains lors des matchs à l'étranger.

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Au moins sept États américains imposent les joueurs du Tricolore sur leur revenu gagné sur la route. Quand le Canadien joue un match dans l'État de New York, l'ensemble des membres de l'équipe paie un impôt de 8,97% sur leur salaire gagné durant leur présence en sol new-yorkais. Selon nos calculs, l'État de New York soutire environ 69 857$ aux joueurs du Canadien à chaque match à l'étranger contre les Sabres, les Islanders et les Rangers. Les entraîneurs du Canadien sont assujettis à cet impôt, surnommé le «jock tax» aux États-Unis.

Comme le Tricolore a disputé sept matchs cette saison dans l'État de New York, ses joueurs ont payé 488 996$ en impôts new-yorkais. Le gouvernement du Québec donne un crédit d'impôt étranger aux joueurs du Tricolore, un crédit d'impôt disponible pour tous les contribuables travaillant à l'étranger afin de prévenir la double imposition.

En n'imposant pas les joueurs des Sabres, des Rangers et des Islanders lors de leurs passages au Centre Bell, Québec se prive de cette somme de 488 996$ en impôts. En plus de New York, la Californie, l'Arizona, le Minnesota, le Michigan, la Caroline-du-Nord et la Pennsylvanie imposent les hockeyeurs de la LNH de passage dans leur État. Selon nos calculs (basés sur le nombre de matchs), les joueurs du Tricolore ont ainsi payé au moins 709 286$ en impôts étrangers cette saison. Le Québec leur reconnaît un crédit d'impôt équivalent applicable à leur impôt payé au Québec.

Le ministre des Finances du Québec, Raymond Bachand, n'a pas voulu commenter le dossier hier. Québec fait valoir qu'il suit la convention fiscale canado-américaine en n'imposant pas les adversaires du Canadien. La convention ne lie pas que l'Agence du revenu du Canada et l'Internal Revenue Service (les administrations fiscales fédérales), mais pas les provinces canadiennes et les États américains.

Au contraire des États américains qui ont commencé à imposer les athlètes professionnels dans les années 80, les provinces canadiennes n'ont jamais exploité cette source de revenus. L'Alberta a imposé une taxe de 12,5% aux adversaires des Flames et des Oilers de 2002 à 2005, mais l'argent était remis aux équipes et non dans les coffres de l'État. En 2002, Québec avait étudié puis rejeté un tel scénario pour aider le Canadien de Montréal, aux prises avec la faiblesse du dollar canadien.

Le professeur de comptabilité à l'Université de Waterloo, Alan Macnaughton, estime qu'il est temps de rétablir l'équilibre fiscal entre les provinces canadiennes et les États américains. «Les provinces ont toujours été gentilles en respectant la convention fiscale, dit-il. À court terme, la meilleure solution est que les États américains cessent d'imposer les athlètes professionnels à l'étranger. À long terme, ce serait mieux de changer la règle dans la convention fiscale et de laisser les deux pays imposer les athlètes où ils jouent leurs matchs, souvent dans des arénas payés par des fonds publics. Les athlètes devraient être imposés dans les deux pays et réclamer un crédit pour impôt étranger.»