Le bond de 22% de la devise canadienne par rapport au dollar américain constitue une telle menace pour l'économie que les dirigeants de la Banque du Canada et les patrons d'entreprise souhaitent voir un affaiblissement du huard.

«L'un des risques que court l'économie canadienne est la vigueur persistante du dollar canadien», soutenait récemment Mark Carney, le gouverneur de la Banque du Canada, au cours d'une entrevue accordée à Bloomberg Television au Forum économique mondial réuni à Davos, en Suisse. «Nous avons un problème de compétitivité au Canada», ajoutait-il.

Le huard nuit aux exportations et son envolée a fait en sorte que le déficit du compte courant du Canada a atteint un record de 17,5 milliards CAN au troisième trimestre de 2010, indiquait Statistique Canada en novembre dernier. Les exportations formaient environ 32% du PIB canadien en 2009, selon des données gouvernementales.

La demande des négociateurs pour des contrats financiers constituant une police d'assurance contre la dépréciation de la devise a plus que triplé depuis le 14 octobre dernier, ce qui indique que les investisseurs craignent que le dollar canadien ne s'affaiblisse. Au cours de cette période, le huard s'est apprécié de 0,2% et il a dépassé la parité tous les jours en janvier, une première depuis novembre 2007.

«Pour une entreprise exportatrice comme la nôtre, le désavantage d'un dollar fort dépasse de beaucoup tout avantage que l'on peut tirer du fait de payer moins cher pour des choses comme de la machinerie importée», souligne Pierre Alary, directeur financier de Bombardier, troisième avionneur au monde. «Ça ne se compare même pas», ajoute-t-il.

Bombardier estime avoir couvert 81% de ses coûts en dollar canadien à sa division aérospatiale au cours de l'exercice financier qui se terminait hier, en hausse par rapport à 78% deux ans plus tôt, d'après des rapports de la compagnie.

Sans les couvertures, chaque hausse d'un cent du huard aurait gonflé les dépenses annuelles de sa division aérospatiale de 21 millions, précisent les rapports.