Avec le Festival mode et design Montréal, qui s'amorce mercredi, Sensation Mode souligne une décennie d'efforts pour faire connaître les designers et détaillants d'ici.

Une commandite inespérée de Jaguar «dans les six chiffres» et c'était parti!

Au début des années 2000, Jean-François Daviau et Chantal Durivage ont eu l'idée de profiter de l'attention internationale portée au Grand Prix du Canada pour mettre de l'avant le travail des designers et marques de Montréal. «Les touristes deviennent ainsi des ambassadeurs, explique Jean-François Daviau. D'autant plus que le magasinage est la première activité des visiteurs du Grand Prix. À l'époque, on parlait d'une dépense moyenne de 3000$ par séjour.»

Fermeture du boulevard Saint-Laurent, participation d'une douzaine de designers, défilés de mannequins sur le capot de voitures Jaguar... Après avoir convaincu plusieurs sceptiques, les fondateurs de Sensation Mode ont lancé une manifestation glamour à ciel ouvert, le Festival mode et design Montréal.

Celui-ci ne met pas de temps à prendre de l'ampleur. Au fil des ans, Sensation Mode sonde d'autres designers, d'autres détaillants, déménage ses défilés sur l'avenue McGill en plein centre-ville. L'organisme contribue ainsi à regrouper les créateurs, à rendre Montréal incontournable sur les plans de la mode et du design aux yeux des journalistes internationaux, blogueurs, stylistes et autres acheteurs. «Sensation Mode a contribué à remettre les projecteurs sur Montréal, comme dans les années 80, estime Judith Desjardins, de Bodybag by Jude. Ses cofondateurs sont passionnés. Personne n'aurait voulu s'en aller là-dedans, car la mode tombe entre deux chaises pour les institutions. C'est lié aux affaires et au culturel.»

«Sensation Mode est la seule entreprise de Montréal à organiser des rendez-vous modes (la Semaine de mode également)», ajoutent les représentants d'Harricana.

Pour la 10e saison de son Festival mode et design, Sensation Mode peut compter sur un budget de 2,5 millions de dollars, financé à 60% par le privé. Jean-François Daviau se réjouit d'une première commandite de Patrimoine Canada (53 700$), après 10 ans de demandes, qui aidera à mettre en valeur la création d'un océan à l'autre. «Mais pour être en santé, il faudrait avoir 4 millions, soutient Daviau. On est ultra-performant, alors que les exigences et attentes augmentent. On organise notamment 400 rendez-vous avec des acheteurs de partout. On travaille à tous les niveaux de la chaîne.»

Aujourd'hui, designers et détaillants se collent naturellement à Mode et design. C'est le cas de Jacob, notamment, qui fait ses premiers pas sur le podium cette année, attiré par les nouvelles dates de tenue du festival, traditionnellement organisé en juin. En tout, une cinquantaine de défilés seront présentés en quatre jours.

Jacob espère faire transiter les foules dans ses magasins au lendemain de son défilé du mercredi 4 août. «En août, on n'a pas forcément des gens prêts à acheter des vêtements d'automne, constate Cristelle Basmaji, directrice communication de Jacob. C'est en septembre que ça se passe. On veut donc inverser la tendance, grâce à la présentation de produits faits de matières transitionnelles, par exemple.»

Coût d'une telle participation? «Environ 10 000$ et c'est un excellent rapport qualité/prix», estime Cristelle Basmaji.

Les 500 000 visiteurs de l'an dernier et les 40 millions en retombées en 2007 (selon CROP) rendent les actions de Sensation Mode essentielles aux yeux des designers. Et ce, même s'il est difficile d'estimer rapidement l'effet du festival pour les designers et les détaillants. «Je ne peux pas dire qu'on a plus d'appels ou de gens en boutique le lendemain, explique Judith Desjardins. C'est du long terme. C'est comme mettre une pub dans le journal. Et c'est de la sensibilisation pour le public qui découvre des entreprises québécoises. Depuis deux ou trois ans, je sens que les gens sont plus sensibles au fait d'acheter localement.»

Mais au-delà des ventes rapides, il y a l'image «mode et design» de Montréal qu'il est important de consolider, selon Jean-François Daviau. «Ultimement, si Montréal est une ville de mode, les sociétés mères comme Mango et Zara s'établissent ici et les patrons viennent faire un tour. Ça dynamise l'industrie locale.»