Vente de contenus à l'étranger. Location de studios. Construction de décors pour des tierces parties. Radio-Canada a cherché de nouvelles sources de revenus partout depuis un an pour affronter la baisse de ses recettes publicitaires, une stratégie qui commence à porter ses fruits.

Les revenus «autogénérés» par le diffuseur public ont grimpé de 7% pendant le dernier exercice financier, terminé le 31 mars. Cette part du budget dépasse les 100 millions de dollars et comprend toutes les entrées de fonds autres que les crédits parlementaires.

 

«On s'est aperçus que le modèle d'affaires résistait mal aux fluctuations ponctuelles et qu'il fallait trouver des façons de le renforcer», a expliqué hier Sylvain Lafrance, vice-président principal de Radio-Canada, à un petit groupe de journalistes.

Pour trouver en vitesse de nouvelles sources de financement, le diffuseur a créé au début de 2009 une filiale - le groupe Revenus - dirigée par le vieux routier Robert Trempe. Avec son équipe, il a exploré toutes les avenues pour tirer profit de la marque et des contenus de Radio-Canada.

Par exemple, la société d'État a compris «au cours de la dernière année» qu'elle pouvait empocher des sommes importantes en vendant ses documentaires et archives à l'étranger, a dit M. Trempe. Radio-Canada a aussi loué davantage de studios et d'équipements à des producteurs externes, fabriquant même des décors pour des tierces parties.

Les revenus du genre ont compté pour 35% des recettes autogénérées pendant l'exercice 2009-2010 (les 65% restants provenant de la publicité), une proportion que le diffuseur espère voir grimper à 39% en 2014-2015.

Ces nouveaux millions ne permettront toutefois pas de réembauches au service français, affecté par des compressions de plusieurs millions l'an dernier, qui ont fait disparaître 300 emplois. Les sommes autogénérées serviront plutôt à financer le virage vers les nouvelles plateformes comme le web et le sans-fil, a dit Sylvain Lafrance.

«Ce dont on a surtout besoin présentement, c'est de l'argent pour gérer la transformation de l'entreprise et soutenir les grandes productions», a-t-il souligné.

Le vice-président a aussi averti que les soucis financiers de Radio-Canada étaient loin d'être réglés, en dépit de la légère hausse des revenus autogénérés. La question des redevances versées par les câblodistributeurs demeure brûlante d'actualité, a-t-il insisté.

Rappelons que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) vient d'exclure Radio-Canada et CBC du processus de négociation sur la valeur de leur signal, au moment même où elle a mis la table au versement de redevances aux diffuseurs privés. Sylvain Lafrance en fulmine encore.

«C'est extraordinaire qu'on ne reconnaisse pas la valeur des signaux du diffuseur public, a-t-il lancé. Pourquoi on donnerait nos signaux aux câblodistributeurs et aux distributeurs par satellite? Je ne comprends pas du tout pourquoi c'est gratuit.»

Cette histoire s'ajoute à d'autres «problèmes structurels», comme le fait que les budgets de Radio-Canada soient renouvelés d'année en année plutôt que d'être pluriannuels, a fait valoir M. Lafrance. En fin de compte, la production de séries lourdes comme Musée Éden pourrait être sérieusement compromise, a-t-il dit.

Les importantes compressions de 171 millions annoncées en mars dernier par CBC/Radio-Canada se sont traduites par environ 800 suppressions de postes partout au pays. Le diffuseur a aussi entrepris un vaste programme de cession d'actifs.

Couvert de critiques, le premier ministre Harper avait alors souligné que la société d'État bénéficiait d'un financement étatique «sans précédent» de 1,1 milliard pour 2009.