«Sauce à spaghetti». Dans un clip sur l'internet, Malcolm Gladwell vante longuement le travail de Howard Moskowitz. Le journaliste et gourou de la tendance sociétale rappelle que son ami diplômé en psychologie expérimentale new-yorkais est à la base du succès des sauces à spaghetti Prego de Campbell: 2 milliards de ventes au cours des 15 dernières années.

Conférencier invité du 7e Salon international de l'alimentation SIAL Canada, qui se tient au Palais des congrès de Montréal jusqu'à demain, Howard Moskowitz a eu l'occasion d'expliquer en détail son approche marketing, hier matin. Celle-ci se situe à l'opposé de ce que trop d'entreprises, selon lui, appliquent encore lorsqu'elles souhaitent lancer un nouveau produit ou améliorer un produit existant. «On peut opter pour un focus group, dit-il, mais il doit y avoir une meilleure façon de faire. Inventons plutôt plus de produits pour vendre plus! La clé: l'expérimentation.»

Pour Howard Moskowitz, qui aime les tournures de phrases imagées, le focus group est du théâtre, un exercice qui ne permet pas vraiment de savoir ce que les clients désirent ou aiment d'une marque. «Il ne faut pas concevoir le cornichon parfait, mais les cornichons parfaits», a-t-il expliqué, à l'époque, lorsqu'il a été sollicité par Vlasic Pickles. Même réponse aux dirigeants de Campbell lorsqu'ils souhaitaient lancer sur le marché la meilleure sauce à spaghetti. Howard Moskowitz avait alors créé 45 variétés de sauces, puis sillonné les États-Unis pour les faire goûter aux Américains, noter leurs préférées, regrouper les commentaires, goûts et impressions en quelques catégories pour conclure que Prego devait sortir trois sauces: ordinaire, épicée et chunky. «En focus group, aucune personne sondée n'a jamais dit qu'elle aimait la sauce chunky, parce qu'on ne sait pas vraiment ce qu'on aime, dit encore Malcolm Gladwell. Howard a redéfini la façon qu'a l'industrie alimentaire de nous plaire.»

Depuis son succès «sauce à spaghetti», Howard Moskowitz a multiplié les interventions aux États-Unis, au Canada et ailleurs dans le monde. «J'ai travaillé pour Hygrade et Campbell au Canada», indique-t-il.

Le Québec n'est-il pas un marché trop petit pour appliquer le principe de la multiplication de jus, soupes, gâteaux? «Non, on n'a qu'à élaborer et mettre en marché moins de produits d'une même marque», répond-il simplement.

Malgré les succès tangibles, Howard Moskowitz croise encore des réticents. Et ce, même si ses expérimentations ne coûtent pas des millions. Plus ou moins le prix d'un focus group, selon lui. Beaucoup de gens sont encore peu enclins à sonder le cerveau des consommateurs selon la méthode qu'il propose (notamment à l'aide de l'outil IdeaMap qu'il a conçu).

«Il y a beaucoup de résistance, avoue-t-il. On me dit: nous n'avons pas d'argent, nous travaillons déjà avec d'autres entreprises, nous n'avons jamais fait ça avant... Les entreprises détestent le mot expérimentation. Donc, plutôt que de vendre la chose directement, je passe par des intermédiaires. Je crée lentement des liens. Je fais de petites démonstrations. On pense qu'on connaît les gens en se fiant à leur âge, leur sexe, la façon dont ils s'habillent, mais on manque quelque chose. Qu'est-ce qu'il y a au fond de leur pensée?»