Les pratiques commerciales du géant des microprocesseurs Intel (INTC) lui valent de nouvelles poursuites, intentées cette fois par les autorités américaines de la concurrence, un mois seulement après qu'il se soit dédouané auprès de son principal concurrent AMD.

Après le 1,25 milliard de dollars versés à AMD et le 1,06 milliard d'euros versé aux autorités européennes au printemps, cette fois ce n'est plus une sanction financière que craint Intel, mais d'être forcé de renoncer à ses pratiques, ce qui est bien plus handicapant.

La Commission du commerce américaine (FTC), gardienne du respect des règles de la concurrence, a en effet expliqué mercredi qu'elle ne recherchait pas une «pénalité financière».

«Ce à quoi nous travaillons, c'est à corriger le comportement (d'Intel) et à rétablir un sain (climat de) concurrence pour l'avenir», a souligné le directeur du bureau de la concurrence de la FTC, Richard Feinstein.

Autant Intel avait réagi avec flegme la dernière fois qu'il avait été visé par des poursuites le mois dernier, autant cette fois-ci il a exprimé sa colère.

«Ce dossier aurait pu et dû faire l'objet d'un accord», a souligné le directeur général d'Intel Doug Melamed dans un communiqué.

«Les discussions avaient avancé très loin, mais elles ont échoué quand la FTC a insisté pour des mesures correctives sans précédent (...) qui auraient empêché Intel de conduire ses affaires», a-t-il précisé.

Selon M. Melamed, ces poursuites «ne sont explicitement pas fondées sur la jurisprudence mais visent en fait à imposer de nouvelles règles (..) qui nuiraient aux consommateurs en réduisant l'innovation et en relevant les prix».

Mais la FTC, s'appuyant apparemment sur des échanges d'emails déjà à la base de plusieurs procédures européennes et américaines, a accusé Intel de mener une «campagne systématique» pour éliminer ses rivaux du marché.

Selon la plainte déposée par la FTC, «les tactiques anticoncurrentielles d'Intel étaient conçues pour freiner des produits concurrents supérieurs qui menaçaient son monopole sur le marché des puces pour les unités centrales» d'ordinateurs.

Même si certains comme l'analyste Patrick Wang, de la maison de courtage Wedbush, ont jugé que cette énième procédure ressemblait à un «disque rayé», le marché était un peu inquiet: l'action perdait 1,52% à 19,49 dollars vers 17h GMT.

Les concurrents d'Intel ont bénéficié de ce développement: AMD gagnait 5% à 9,26 dollars et Nvidia 6,77% à 16,71 dollars.

«Intel a les moyens de payer des dédommagements. Le risque c'est qu'il soit forcé à changer ses pratiques», soulignait Daniel Berenbaum, du cabinet spécialisé Auriga.

La FTC a expliqué qu'elle voulait empêcher Intel de recourir à «des menaces, des prix par lots ou d'autres promotions pour encourager des accords d'exclusivité, entraver la concurrence ou manipuler indûment les prix de ses puces».

La FTC pourrait également demander qu'Intel ait l'interdiction de «fabriquer ou distribuer des produits qui nuisent aux performances des puces» concurrentes.

«Nous sommes particulièrement contents de voir que (la FTC) s'intéresse au comportement d'Intel avec les puces graphiques, qui sont de plus en plus importantes pour le secteur informatique», a souligné Nvidia dans un communiqué.

L'affaire n'est cependant pas close, la première audience étant prévue en septembre 2010 et les analystes ayant jugé qu'elle pourrait durer au moins deux ans.

Le mois dernier la justice new-yorkaise, formulant des accusations similaires, avait publié des échanges de mail assez évocateurs. Intel est «prêt au jihad si Dell rejoint l'exode vers AMD. Nous aurons zéro (rabais) pendant au moins un trimestre ... nous n'avons aucun moyen légal/moral/dissuasif d'éviter ça», s'était par exemple alarmé un cadre de Dell en février 2004.