Trois firmes d'avocats de Montréal viennent de se voir accorder des honoraires de 3 millions de dollars pour leur travail dans les recours collectifs contre Nortel Networks (t.nt).

Leur paye a été décidée par la juge Michèle Monast, qui a rendu sa décision le 28 mai. Les trois firmes sont Trudel&Johnston, d'une part, et le tandem Belleau Lapointe et Unterberg Labelle Lebeau, d'autre part.

«Oui, nous sommes heureux. Mais nous avons commencé à travailler dans ce dossier il y a huit ans et n'avons pas été rémunérés pendant tout ce temps», dit Daniel Belleau, associé de Belleau Lapointe.

Il faut savoir qu'en matière de recours collectif, les avocats sont généralement payés seulement s'ils gagnent leur cause. Dans un tel cas, ils touchent un pourcentage des gains du litige, parfois de 15 à 25%.

Essentiellement, la juge devait décider du caractère raisonnable des honoraires demandés par les avocats dans deux dossiers de recours collectifs.

Dans le cas de Nortel, des recours collectifs ont été intentés simultanément aux États-Unis, au Canada anglais et au Québec, notamment. Tous ont été à un certain moment regroupés en deux grands dossiers, soit les recours de 2001 (Nortel I) et ceux de 2004 (Nortel II).

Au Québec, le premier recours collectif a été intenté le 15 février 2001 après que Nortel eut annoncé que ses prévisions financières étaient trop optimistes. Ce recours, parrainé par Belleau Lapointe et Unterberg Labelle Lebeau, avait été intenté par l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec (APEIQ). À l'époque, l'annonce de Nortel avait fait chuter le titre de 30% dans les heures qui ont suivi.

Un deuxième recours a été intenté au printemps 2004 à la suite des annonces faites par Nortel de la révision de ses résultats de 2003 et du congédiement de certains dirigeants pour des motifs sérieux. Le marché avait également fait planter le titre de 30% à l'époque. Ce deuxième recours québécois a été parrainé par le bureau Trudel&Johnston.

Dans le cas de Nortel I, la valeur du règlement global s'est élevée à 1,14 milliard de dollars, tandis que dans le second, le règlement, a été de 1,07 milliard. Les actionnaires québécois de ces deux règlements se sont vu accorder 101 millions de dollars.

Les procureurs du Québec avaient accepté de limiter leurs honoraires à un maximum de 0,45% des fonds québécois du règlement, soit 6,7 millions. Mais les intervenants au dossier, soit des régimes de retraite ontariens, dont Teachers', ont contesté ces demandes.

Essentiellement, la juge Michèle Monast a évalué le caractère raisonnable des demandes en évaluant d'abord le nombre d'heures consacrées par chacun des cabinets à ces recours.

Dans le cas de Nortel I, il a été établi que les avocats ont consacré 2614 heures de travail, ce qui représente un investissement de 881 135$, soit environ 337$ l'heure. Compte tenu du risque qu'ont pris les firmes d'avocats quant à la possibilité de ne rien toucher, la juge a accepté de leur verser environ deux fois la valeur des heures travaillées, soit 1,75 million de dollars.

Dans le cas de Nortel II, les avocats au dossier ont travaillé 2390 heures, pour un investissement de 885 970$ (371$ l'heure). Le tribunal leur a accordé 1,25 million.

«On est déçus. C'est beaucoup moins qu'on espérait», a déclaré Philippe Trudel, l'un des avocats du recours Nortel II au Québec.

«Nous ne trouvions pas que nos demandes étaient exagérées. La somme de 1,25 million peut paraître beaucoup, mais il faut comprendre que les avocats qui parrainent des recours collectifs prennent des risques. Dans certains dossiers, le risque est de ne rien gagner du tout. Les dossiers gagnants compensent», explique essentiellement M. Trudel.

L'avocat de l'une des deux autres firmes, Daniel Belleau, se dit pour sa part satisfait des honoraires, mais tient le même discours quant aux risques. «Pour un dossier qui rapporte, il faut tenir compte des dossiers qui rapportent peu ou pas du tout», dit-il.

Daniel Belleau n'a toutefois pu nous dire la proportion de recours collectif parrainés par sa firme qui ont finalement du succès et débouchent sur des honoraires. Précisons que les actionnaires de Nortel qui s'estimaient lésés devaient faire leurs réclamations dans ces recours il y a déjà plus d'un an.