En Norvège, McDonald's a créé un wrap au saumon. En Italie, un burger avec du vrai fromage parmesano reggiano et un autre avec du jambon fumé. En Espagne, McDo a mis de la gaspacho sur son menu.

En Norvège, McDonald's a créé un wrap au saumon. En Italie, un burger avec du vrai fromage parmesano reggiano et un autre avec du jambon fumé. En Espagne, McDo a mis de la gaspacho sur son menu.

«Il faut s'adapter au marché local», explique Denis Hennequin, président de McDonald's pour l'Europe, rencontré à l'automne, à Chicago.

La multinationale l'a fait avec succès en Asie en proposant du thé avec ses trios en Chine, en n'offrant que de la viande halal en Indonésie et en multipliant les offres de poulet pour les clients asiatiques qui en sont friands. Cette capacité d'adaptation a été payante pour McDonald's partout sur la planète. Mais particulièrement en Europe. «La nourriture est très culturelle, explique Denis Hennequin. L'erreur aurait été de se dire que parce que le Big Mac fonctionne bien dans 110 pays, il faut faire la même chose partout. Par contre, on peut comprendre des concepts de produits qui fonctionnent partout. Regardez les wraps. Nous en avons dans une dizaine de pays en Europe, mais chacun fait sa recette. Nous sommes aussi en train de développer des boissons à base de jus de fruits, mais chaque pays aura sa recette. Car on sait que les petits Anglais n'ont pas les mêmes goûts que les petits Espagnols. Notre food studio ne développe pas de recette: il développe des concepts.»

Au Portugal, il y a six variétés de soupes dont la traditionnelle caldo verde, une soupe au chou servie avec saucisson chorizo. En France, des salades sont faites avec de la mimolette, du chèvre et du bleu. Sans surprise, elles portent les noms de «From Paris» et de «Cheese & Apple». Les grains pour le café sont 100% arabica, ils proviennent d'Amérique centrale et du Brésil, ils sont certifiés équitables par la Rainforest Alliance et McDo le met bien en évidence.

Car en plus de vouloir adapter ses menus, Hennequin veut jouer la carte du casual, comme il le dit. À l'instar de son menu français, Denis Hennequin utilise beaucoup d'expressions anglaises pour expliquer ses concepts.

«En Europe, nous voulons changer cette image de fast food pour une de good food fast, dit ce fou de culture américaine. Nous voulons devenir fast casual.» Dans toute l'Europe, les restaurants se veulent plus sympathiques et confortables.

«La grande force de McDonald's est de nous laisser faire, concède Denis Hennequin. Aujourd'hui, on regarde Burger King et on se dit qu'on était comme ça il y a 20 ans. Ils sont les mêmes partout.»

«Quand Denis Hennequin s'est mis à redécorer tous les restaurants, les gens croyaient qu'il était fou, explique l'analyste américain Steve West. Mais il avait raison. Ensuite, il a rendu le menu pertinent pour chaque région. Avant lui, on calquait systématiquement le modèle américain à l'Europe. C'est lui qui a changé cette façon de faire qu'il trouvait ridicule. Les Européens mangent différemment. Ils sont plus sensibles à la nutrition. Il fallait leur donner un menu qui leur convient mieux.»

McDo haut de gamme

Sur le continent européen, l'uniformité est donc à proscrire. Mais avant d'en arriver à cette conclusion, il y a bien eu quelques erreurs. Dont une offensive déjeuner en France, dans un pays où l'on prend le petit-déjeuner à la maison. L'Angleterre est le seul pays européen où les déjeuners fonctionnent bien chez McDo: 14% des ventes quotidiennes s'y font le matin.

Aussi dans la catégorie «à oublier», le concept de restaurant «à l'américaine» en France, avec moins de places assises et plus d'importance donnée au service à l'auto. «Les Français restent deux heures dans le restaurant!» lance Denis Hennequin. Pour eux, la sortie au restaurant, même au McDonald's mérite qu'on y mette le temps. Pas question de se mettre en ligne, en voiture, pour grignoter un burger derrière le volant. Pas dans les moeurs. La France est aussi l'endroit au monde où chaque client dépense le plus au McDonald's. Douze euros en moyenne, donc près de 19$. Au Canada, la dépense moyenne par visite est de 6,69$.

Et contrairement à l'offensive nord-américaine, McDo Europe refuse de miser sur ses prix. Il y a bien des «eurodeals» en Belgique et le «coinoffert» en Finlande, des menus qui proposent des mets à un ou deux euros. Mais pas question de mettre de l'avant le prix qui donne une image de bas de gamme.

«On ferait une erreur si on s'enfermait dans une niche en disant qu'on est seulement le restaurant pas cher, dit Denis Hennequin. Ou seulement un restaurant pour des gens qui veulent aller au comptoir à l'auto. Tout ça c'est important, mais ce n'est pas suffisant.»

Avoir le champ libre

Avantage pour la firme, en Europe, McDonald's avait le champ libre. Il y a peu de concurrence de comptoirs de fast food à l'américaine, sauf pour Quick, une chaîne belge qui fait aussi des hamburgers et Poulet frit Kentucky en Angleterre.

«Nous n'avons pas de compétition frontale», confirme Éric Gravier, vice-président de McDonald's France.

Il y a 6400 restaurants McDonald's en Europe, dans 40 pays. C'est la moitié des États-Unis, en nombre. «Mais on contribue autant», précise Denis Hennequin. Avec près de 9 milliards d'euros de revenus, l'Europe fournit 39% du chiffre d'affaires mondial de McDonald's.

Si les Européens étaient plus fidèles, ils feraient sauter la caisse. Le client européen visite en moyenne 14 fois son McDo dans une année. Au Canada, la moyenne par client est de 16 visites annuelles.

Pour multiplier les allées et venues de leurs fidèles, et élargir le groupe, McDo lance maintenant une importante offensive café. Les McCafés sont une occasion de remplir les restaurants vides entre les deux heures de pointe, le midi et le soir, après la fin du travail. Il y en a un peu moins de 1000 pour l'instant et la majorité se trouvent en Allemagne. «C'est vrai que c'est très profitable, concède Denis Hennequin. Regardez ce que c'est: quelques grains de café, de l'eau et de la mousse!» Le patron précise qu'il n'est pas question de faire des bars à café à l'américaine où l'on sert des boissons sucrées garnies de crème fouettée qui n'ont plus grand-chose à voir avec un café, finalement.

Le prochain grand défi de McDonald's en Europe est toutefois la conquête de l'Est. La Russie, la Pologne, la Roumanie, le République tchèque, la Hongrie, l'Ukraine et la Slovaquie où il n'y a que 700 restaurants, au total.

Accent local, menu local

> La mousse au chocolat en Belgique

> Le sundae aux marrons en France

> Le porridge à déjeuner en Irlande

> La salade de Capri faite de mozzarella en Italie

> La tarte aux pommes hollandaise aux Pays-Bas

Des chiffres et des lettres

> 1971 - Le premier restaurant européen de McDonald's a ouvert ses portes en 1971, en Hollande.

> 3 - Aujourd'hui, le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne sont les trois principaux marchés d'Europe pour McDonald's.

> 10 000 000 - Chaque jour, 10 millions d'Européens vont chez McDonald's.

> 1301 - Il y a 1301 restaurants McDo en Allemagne, c'est le pays d'Europe où il y en a le plus.

> 2 - Il n'y en a que deux en Géorgie, le pays où il y en a le moins.

> 35 - L'Europe vient de franchir le cap des 35 mois consécutifs de ventes en hausse.