Le gouvernement français, qui avait déjà fort à faire pour contenir la colère des pêcheurs face à la flambée du coût du carburant, doit maintenant composer avec les agriculteurs.

Le gouvernement français, qui avait déjà fort à faire pour contenir la colère des pêcheurs face à la flambée du coût du carburant, doit maintenant composer avec les agriculteurs.

«Notre objectif est d'en arriver à assécher les stations-service. Il faut faire pression sur l'État pour le forcer à agir», explique Jean-Claude Croze, porte-parole d'une organisation syndicale agricole de la Haute-Savoie.

Hier, plusieurs de ses membres ont bloqué avec des tracteurs l'accès à un dépôt pétrolier situé non loin de la ville d'Annecy, empêchant toute livraison. Une demi-douzaine d'autres dépôts du pays étaient aussi bloqués par des agriculteurs.

«Nous espérons que le mouvement fera tache d'huile. Si l'on réussit à paralyser la moitié des dépôts du pays, il y aura un gros problème d'approvisionnement à l'échelle de la France en cinq ou six jours», a indiqué M. Croze, en précisant qu'il réclamait une "détaxation totale" du carburant.

L'action des agriculteurs s'ajoute à celle des pêcheurs qui ont bloqué au cours des dernières semaines plusieurs ports pour souligner leur indignation face à la hausse de leurs coûts d'exploitation.

Le ministre de la Pêche, Michel Barnier, a cherché à les calmer en annonçant des subventions ponctuelles de plusieurs dizaines de millions de dollars, mais l'annonce n'a pas suffi à convaincre les manifestants de reprendre le travail. Leur colère trouve écho en Espagne, en Italie et au Portugal, où les pêcheurs menacent de déclencher dès aujourd'hui une «grève illimitée».

Les choses pourraient s'aggraver plus encore en France puisque la principale organisation de transporteurs routiers ainsi que la principale fédération de taxis menaçaient hier de descendre à leur tour dans la rue.

La situation est embarrassante pour le président français Nicolas Sarkozy, qui avait promis durant la campagne électorale d'être le "président du pouvoir d'achat".

Sur les ondes de la radio RTL, le politicien a souligné mardi qu'il fallait avoir «le courage» de dire que les choses n'allaient «pas s'arranger» en ce qui a trait au coût du carburant, le contexte mondial poussant les cours du pétrole et du gaz à la hausse.

Il a réitéré qu'une partie des revenus générés par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur le carburant serait reversée dans un fonds d'aide destiné aux familles françaises à faible revenu.

Le politicien souhaite que l'Union européenne plafonne les revenus obtenus par cette taxe de manière à soulager la population. Un scénario pour le moins improbable dans la mesure où il nécessite une décision unanime des États membres.

La position du gouvernement est rendue encore plus inconfortable par le fait que la France se trouve dans le collimateur de la Commission européenne en raison de la détérioration de ses finances. Le pays risque d'être le seul de la zone euro en 2009 avec un déficit public excédant le plafond de 3% du produit intérieur brut (PIB) fixé par le Pacte de stabilité et de croissance.

Des considérations qui ne pèsent pas lourd pour Jean-Claude Croze. "On ne peut pas abandonner des pans entiers de l'économie pour un simple ratio", souligne le leader agricole, qui ne craint pas d'intervention policière près des dépôts.

«Je vois mal les forces de l'ordre commencer à taper sur la gueule des paysans dans le contexte actuel... Notre action s'inscrit dans la durée et nous ne céderons pas», assure-t-il.