Il est minuit moins une pour la chaîne Télévision Quatre Saisons, et ce n'est pas le film porno soft de fin de soirée qui attend le Mouton noir de la télé.

Il est minuit moins une pour la chaîne Télévision Quatre Saisons, et ce n'est pas le film porno soft de fin de soirée qui attend le Mouton noir de la télé.

TQS est insolvable et en position pour être bradée à un prix plancher, ou pour être liquidée si aucun acheteur de la dernière heure ne se manifeste dans les prochains jours.

Et si ce sauveur existe, il pourrait payer seulement 1 $, plus une proposition concordataire aux créanciers et un engagement à réinvestir dans la société. Sinon, elle sera fermée et liquidée.

Voilà ce qu'a dit mardi l'expert-comptable Yves Vincent, du cabinet RSM-Richter, qui a été nommé hier «contrôleur» de TQS par un juge de la chambre commerciale de la Cour supérieure.

TQS et ses filiales se sont placées mardi sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.

La loi permet à TQS de suspendre durant 30 jours ses paiements à ses créanciers et de leur faire une proposition concordataire où ces derniers accepteront (ou refuseront) une fraction de l'argent qui leur est dû plutôt que de tout perdre.

«La compagnie est insolvable. Pour les actionnaires (Cogeco et CTVGlobemedia), ça veut dire que la valeur du capital-action est le 1 $ symbolique», a dit M. Vincent.

TQS est déficitaire et manque d'argent, et un créancier aurait pu exiger le paiement immédiat et mettre la société en faillite. Ou la Banque CIBC, créancière de TQS, aurait pu rappeler sa marge de crédit.

La «bonne nouvelle», si on veut vraiment en trouver une, c'est que TQS n'a pas été mise en faillite ni confiée à un syndic, du moins pas pour l'instant. «TQS continue de fonctionner et les actionnaires espèrent toujours la vendre», a dit l'avocat des actionnaires, Me Jean Fontaine.

Depuis un mois et demi, une trentaine d'acheteurs potentiels ont été approchés au nom de la chaîne. Seulement cinq ont jeté un coup d'oeil aux données confidentielles sur l'entreprise, tous ont dit non merci sans faire d'offre.

«Et pourtant, nous étions très flexibles quant aux conditions auxquelles une transaction aurait pu se faire», a déclaré hier Louis Audet, président de Cogéco, l'actionnaire majoritaire de TQS.

Selon Me Fontaine, une des conséquences (et non le but) de l'ordonnance d'hier et que «ça procure une meilleure flexibilité à un éventuel acheteur».

Par exemple, au lieu d'acheter la compagnie et d'assumer les lourdes dettes, un acheteur pourrait contribuer à une proposition concordataire aux créanciers et relancer le réseau sous une forme indéterminée et, disons-le, hypothétique.

«C'est un des scénarios possibles», a dit le contrôleur, M. Vincent, selon qui la décision annoncée mardi est «le dernier cri du coeur des actionnaires, qui disent à tout acheteur que la compagnie est insolvable et à vendre, telle quelle», par un repreneur qui examiner une transaction «dans sa perspective à lui».

Dans le rouge

Les principaux actifs de TQS sont des comptes à recevoir au montant de 33,4 millions de dollars. Ce montant est le seul actif tangible. La valeur du reste est chiffrée en fonction du prix payé au moment de l'achat.

Ainsi, les droits de diffusion (38,4 millions), les huit licences du CRTC (3 millions), les immeubles des stations (2 millions) et le matériel de diffusion (18,4 millions), ne sont que la valeur comptable.

«En réalité, dans les circonstances actuelles, et compte tenu de la dette, ça ne vaut rien», a dit une source familière avec le dossier, qui a demandé à ne pas être nommée.

TQS doit près de 69 millions. Elle a une marge de crédit de 20 millions, tirée aux trois quarts (15,4 millions) avec la Banque CIBC, elle a des comptes payables de 31 millions, plus 21,2 millions à payer en droits de diffusion.

Cogeco a accepté de verser un cautionnement de 12 millions pour couvrir les dépenses à court terme (45 jours) sans gruger dans les recevables.

Depuis 2006, TQS, malgré ses revenus annuels de 100 millions, a un problème de liquidités et peine à payer ses créanciers. Ses pertes d'exploitation étaient de 5,5 millions en 2007 et de 6,4 millions en 2006.

«Il y a plein de gens qui ne sont pas payés», a dit une source. Cogeco aura radié 80 millions de ses livres comptables à la fin du processus de vente ou de liquidation.