J'ai eu la possibilité de voyager à bord de différents navires sur quelques mers du monde. Les croisières sont fascinantes et permettent de faire des découvertes merveilleuses; d'autres, se révèlent pour le moins troublantes.

J'ai eu la possibilité de voyager à bord de différents navires sur quelques mers du monde. Les croisières sont fascinantes et permettent de faire des découvertes merveilleuses; d'autres, se révèlent pour le moins troublantes.

Une règle continue de prévaloir chez tous les armateurs et les compagnies de navigation de la planète: les océans sont de vastes dépotoirs et il ne faut pas se gêner pour y déverser les pires immondices.

Après avoir constaté, à maintes reprises, que les paquebots et les gros yachts de croisière comptent parmi les pires pollueurs de notre planète, je m'étonne de lire les commentaires de Priscilla Nemey, responsable du dossier des croisières à Promotion Saguenay.

Elle soutient que les gros navires qui vont venir à La Baie ne jetteront pas leurs déchets dans le Saguenay. C'est rêver en couleurs sur écran géant! Les capitaines ne se priveront pas de se débarrasser de quelques tonnes de détritus et de liquides nauséabonds dans les eaux profondes du fjord!

Les Britanniques donnent le ton

La puissante marine marchande britannique continue de dominer notre monde. Passager de la classe économique, parmi 1500 autres touristes, j'étais à bord d'un luxueux paquebot de la grande société maritime P&O (Peninsula & Oriental), de Liverpool.

Partis de New York, nous voulions découvrir les trésors d'au moins cinq îles des Caraïbes. J'ai trouvé ce voyage extraordinaire jusqu'au jour où, avec un ami de Gatineau, je découvris ce que les matelots d'origine pakistanaise faisaient avec les déchets produits par l'hôtel flottant et ses occupants. Très tôt le matin, avant l'aurore, des panneaux de la soute s'ouvraient et on basculait par-dessus bord des boîtes et des sacs remplis de rebuts solides et liquides.

Ce déversement que nous avons observé régulièrement à partir de l'étage de la promenade, à la poupe, s'étirait parfois sur de nombreux kilomètres. J'ai parlé de cette situation au commandant du navire, un homme sympathique originaire de Londres. Le capitaine a bien ri de mes protestations et de celles de mon copain. Il nous a clairement fait comprendre, avec son flegme anglo-saxon, que tout est permis aux mariniers dans les eaux internationales et, même, sur les grands fleuves.

Je me souviens encore de sa philosophie exprimée dans une phrase, qui est celle, finalement, de la plupart des capitaines de vaisseaux marchands et militaires: "Dieu seul connaît l'ampleur de cette pollution et il s'en fout!"

Dépotoirs marins cartographiés

Les gouvernements continuent de croire que les océans sont en mesure d'absorber tous les déchets. La ville de New York a publié une carte marine où sont indiquées les zones de l'Atlantique, dans les eaux côtières des États-Unis où les bateaux-réservoirs vont déverser quotidiennement des milliers de tonnes d'ordures et des millions de gallons d'eaux d'égouts de la métropole américaine. Lorsque les paquebots russes s'amenaient au Saguenay et jetaient l'ancre quelques jours dans la baie des Ha! Ha!, j'ai vu, en compagnie d'autres personnes, des déversements d'eaux grises et d'autres saletés.

Nous ne pourrons pas forcer la timonerie d'un paquebot de croisière d'ordonner à son équipage d'épargner la rivière Saguenay et son fjord, si fantastique soit-il.

Gabriel Berberi

Saguenay