Votre revenu familial est inférieur à 45 000$? Les garderies à 7$ ne sont probablement pas pour vous.

Votre revenu familial est inférieur à 45 000$? Les garderies à 7$ ne sont probablement pas pour vous.

Pas (nécessairement) parce que les places sont rares. Mais parce qu'une garderie non subventionnée pourrait à peine vous coûter 3$ par jour. Justement parce qu'elle n'est pas subventionnée.

Vous vous arrachez les cheveux à trouver une place pour votre chérubin dans une garderie à 7$?

Si le revenu de votre famille se situe entre 27 000$ et 45 000$, la garde de votre enfant vous coûterait probablement moins cher dans une garderie non subventionnée à 30$.

Pourtant, lors de leur mise sur pied, en 1997, l'objectif des garderies à 5$ consistait justement à permettre aux ménages de réduire leurs coûts de garde d'enfants.

Mais voyez-vous, l'univers fiscal est particulièrement propice à la théorie du chaos. Un petit battement d'aile gouvernemental peut provoquer des répercussions inattendues aux antipodes.

C'est ce que démontre l'étude réalisée et régulièrement mise à jour par Claude Laferrière, professeur de fiscalité au Département des sciences comptables de l'UQAM.

«Quand on choisit une garderie à 7$, on gagne et on perd, signale-t-il. On gagne de ne pas payer plus que 7$ par jour - peut-être 8$ bientôt -, mais on perd la déduction fédérale et les avantages qui suivent.»

Or, ces déductions, crédits et allocations peuvent justement faire pencher la balance dans l'autre sens.

Pour une famille monoparentale à faible revenu, avec deux enfants, dont un d'âge préscolaire, il serait moins coûteux, en bout d'année, d'envoyer cet enfant dans une garderie à 30$ que dans un centre de la petite enfance (CPE) à 7$.

Si ce parent gagne 28 000$, il lui en coûte alors 1007$ de plus par année pour bénéficier du tarif quotidien de 7$, une fois tous les crédits et déductions fiscales pris en considération.

Pour poser le problème à l'inverse, une garderie à 30$ lui coûterait 1007$ de moins, soit en définitive 3$ par jour.

«Cette politique fait perdre aux ménages à faible revenu des sommes considérables, commente Claude Laferrière dans son étude. Avec un revenu de 30 000$, un ménage monoparental avec deux enfants est loin du seuil de la richesse, très loin même. Opter pour une garderie à 7$ fait perdre des sommes supérieures à 1700$. C'est énorme.»

Énorme? Répartis sur 250 jours, ces 1700$ de déficit représentent... près de 7$ par jour!

En d'autres termes, si cette mère seule de deux enfants avait plutôt choisi une garderie non subventionnée à 26$ ou 28$, il ne lui en coûterait rien pour faire garder son enfant.

«Dans ces circonstances, on est très loin de la définition d'une aubaine, écrit Claude Laferrière. On est plutôt dans le domaine de l'illusion et de l'imposture.»

Ces données amènent Caroline Arel, avocate et responsable du service budgétaire d'Option consommateurs, à s'interroger sur l'équité du programme: «Est-ce qu'il faut faire le constat que ce sont encore les ménages qui ont des revenus plus élevés qui trouvent intérêt à payer moins cher pour envoyer les enfants à la garderie?»

Car aussi faibles soient-ils, les frais de 7$ par jour sont encore difficiles à assumer pour certains ménages à faible revenu, observe-t-elle.

«Dans nos bureaux, on rencontre des gens qui ont de la difficulté à payer ces frais. On a eu des cas où la garderie menaçait de mettre fin au contrat, parce que les parents avaient accumulé un retard qu'ils avaient de la difficulté à rattraper.»