Les automobilistes québécois sont sur le point de perdre patience une fois pour toutes. Et de se révolter contre les pétrolières.

Les automobilistes québécois sont sur le point de perdre patience une fois pour toutes. Et de se révolter contre les pétrolières.

Selon le Mouvement Desjardins, les automobilistes québécois pourraient diminuer leur consommation d'essence de façon importante si le prix de l'essence se maintenait aux environs de 1,40$ le litre, comme c'est le cas actuellement dans la région de Montréal.

«La consommation d'essence a diminué au Québec au cours des dernières années, mais jamais de façon drastique, dit Joëlle Noreau, économiste principale au Mouvement Desjardins. Avec la récente hausse du prix de l'essence, il est possible que les automobilistes réagissent de façon très forte. Si le prix reste à 1,40$, les automobilistes pourraient diminuer leur consommation d'essence.»

Selon les calculs du Mouvement Desjardins, un automobiliste verrait sa facture à la pompe augmenter de 464,10$ sur une base annuelle si l'essence se vendait en moyenne à 1,40$ le litre en 2008.

Plutôt que de payer davantage, le mouvement coopératif croit que les automobilistes songeraient à des solutions de rechange.

«Les gens pourraient choisir de prendre les transports en commun, de faire du covoiturage, de ne pas s'éparpiller lorsqu'ils font des commissions ou encore de prendre leur vélo durant l'été», dit Joëlle Noreau.

Les pétrolières sont bien conscientes du ras-le-bol de leurs clients, mais elles doutent qu'ils aient l'intention de diminuer leur consommation d'essence de façon significative.

«L'énergie représente moins de 5% du budget d'une personne et l'économie canadienne va très bien présentement. Les gens sont généralement réfractaires à changer leurs habitudes tant qu'ils en ont les moyens», dit Carol Montreuil, vice-président de l'Institut canadien des produits pétroliers, une association de pétrolières dont les membres représentent 80% des ventes de pétrole au pays.

Les pétrolières sont toutefois les premières à admettre que le prix à la pompe peut influencer la consommation d'essence.

«Nous n'avons qu'à regarder en Europe, où les prix sont deux fois plus élevés et où les gens consomment deux fois moins d'essence, dit Carol Montreuil. Au Canada, nous n'avons jamais eu de chute importante de la consommation d'essence, notamment parce que les prix ne sont jamais restés très longtemps à des niveaux élevés. Le seuil de tolérance est-il à 1,40$ le litre? À 1,50$? À 1,70$? Personne ne connaît le chiffre magique.»

Même sans chiffres à l'appui, l'Institut canadien des produits pétroliers devine avoir perdu des clients récemment en raison du prix de l'essence, qui a augmenté de 12% au cours du dernier mois au Québec.

«À 1,20$, il y a des gens qui ont changé leurs habitudes, dit Carol Montreuil. À 1,40$, d'autres personnes feront la même chose. Mais pendant que certaines personnes changent leurs habitudes, l'économie canadienne fonctionne à plein régime et davantage de gens s'achètent une nouvelle auto. Les effets de l'efficacité énergétique sont remplacés par celles de la croissance économique.»

Au contraire de leurs collègues du reste du pays, les automobilistes québécois ont réduit leur consommation d'essence de 2,3% entre 2004 et 2006, notamment en achetant des automobiles moins énergivores comme la Yaris (Toyota), la Rabbit (Volkswagen) et la Civic (Honda).

«Les gens ont commencé à changer leurs comportements, dit l'économiste Joëlle Noreau. Ils achètent davantage de voitures qui consomment moins d'essence.»

En dépit de tous leurs efforts, les Québécois consacrent une partie sans cesse plus importante de leurs revenus à remplir le réservoir de leur voiture.

Selon Statistique Canada, l'essence représentait 3,3% du budget d'un ménage québécois en 2006, comparativement à 2,8% en 2001.

Mardi, le prix d'un litre d'essence ordinaire variait de 1,27$ à Victoriaville à 1,39$ à Montréal. Continuera-t-il d'augmenter l'été prochain? Mauvais présage pour les automobilistes, le baril de pétrole a atteint un nouveau sommet hier à New York.

À la fermeture des marchés boursiers, il s'échangeait à 125,8 $ US, en hausse de 1,57 $ US.