Une filiale de la Banque Royale, RBC Dominion Valeurs mobilières, poursuit deux de ses ex-courtiers en lien avec des comptes offshore secrets et des remboursements en argent comptant.

Une filiale de la Banque Royale, RBC Dominion Valeurs mobilières, poursuit deux de ses ex-courtiers en lien avec des comptes offshore secrets et des remboursements en argent comptant.

RBC réclame 528 500$ à Kosta Dariotis et Alphonso Fiumidinisi pour divers dommages et frais juridiques encourus à la suite de plaintes de clients. La poursuite a été déposée lundi dernier, à Toronto, à la Cour supérieure de justice de l'Ontario.

Les deux courtiers réputés, qui travaillaient en équipe au centre-ville de Montréal, ont été congédiés par RBC le 27 septembre 2006. Ils travaillent aujourd'hui pour CIBC Wood Gundy.

Ce n'est pas la première fois que MM. Dariotis et Fiumidinisi font l'objet d'articles dans les journaux. Certains ont fait référence aux liens qu'entretenaient les deux courtiers avec le groupe Norshield, cette firme qui a géré les fonds du producteur de dessins animés Cinar, aux Bahamas.

Au printemps 2005, rappelons-le, Norshield a été mis sous séquestre par les autorités devant son incapacité à rembourser les 472 millions de dollars dus à ses clients.

Plainte de clients

Dans sa poursuite, RBC dit avoir reçu diverses plaintes de clients à la fin de 2005 et au début de 2006 pour des pertes encourues avec leur compte off-shore faites sous la supervision de M. Dariotis, entre autres.

Après discussions, les deux courtiers auraient admis qu'ils avaient «l'autorité sur les transactions» de compte de la société Pictet, en Suisse, pour environ 32 clients. Ces clients étaient parfois avec RBC, parfois avec d'autres institutions.

«En agissant ainsi, les intimés étaient en contravention de leur contrat d'emplois, des règles de l'Association des courtiers (ACCOVAM) et des lois sur les valeurs mobilières», est-il écrit dans la poursuite.

Malgré tout, la Royale a alors convenu d'une entente à l'amiable avec eux, exigeant que chacun verse 25 000$ à des oeuvres de charité, entre autres. Les deux courtiers devaient également fournir des renseignements sur les comptes offshore.

Toutefois, devant leur refus de collaborer, les deux courtiers ont été remerciés le 27 septembre 2006, soutient la requête.

Argent comptant

Dans son enquête, la Royale dit avoir découvert que des clients s'étaient vu rembourser leurs investissements offshore avec de l'argent comptant.

«Des paiements allant jusqu'à 50 000$ à la fois ont été payés par les intimés à certains individus», écrit RBC, qui dit ne pas connaître la provenance des fonds.

La RBC dit avoir remboursé 32 332$ et 36 877$ à deux clients qui ont investi offshore et perdu de l'argent sous les recommandations du tandem. Ces clients «ne savaient pas que les intimés recevaient de substantielles commissions en regard de ces investissements», écrit RBC.

Par ailleurs, La Presse a appris que Cinar cherche à déposer des documents en Cour touchant ces deux courtiers dans le cadre d'une poursuite contre la Banque Royale. La poursuite contre la Royale est liée aux transferts de fonds non autorisés de Cinar vers les Bahamas, entre 1998 et 2000. Cinar y a perdu plus de 50 millions.

Réplique: un écran de fumée

Joint au téléphone, l'avocat Jean-Stéphane Rousseau affirme que la poursuite de RBC contre ses clients est un écran de fumée. «C'est mal fondé et totalement abusif», dit-il.

L'argent comptant? «C'est faux. Je ne sais pas où ils ont trouvé ça. C'est fait pour porter atteinte à leur réputation», dit M. Rousseau, dont les clients ont l'intention de se défendre et même de contre-poursuivre la Royale.

Jean-Stéphane Rousseau dit comprendre que la poursuite fait référence aux produits du Groupe Norshield, même si ce n'est pas mentionné dans la requête. Or, à l'époque, «la Banque soutenait les produits de Norshield. Elle encourageait même ses clients à se servir de ses propres filiales offshore ou hors Canada pour diversifier les portefeuilles», dit M. Rousseau.