Quelle doit être l'attitude des administrateurs face à la haute direction d'une entreprise?

Quelle doit être l'attitude des administrateurs face à la haute direction d'une entreprise?

"Ils doivent faire preuve d'un scepticisme sain", estime Thierry Dorval, un des rares avocats canadiens à détenir un doctorat lié aux questions de gouvernance.

Dans sa thèse, l'associé en droit des affaires chez Ogilvy Renault, décline cette attitude en deux principes: l'indépendance et la supervision active.

Le premier pilier, l'indépendance, est un préalable pour assurer une meilleure résistance face aux pressions externes.

"Cet affranchissement diminue les risques de conflits d'intérêts", explique Me Dorval.

L'indépendance dans les faits (aucun intérêt caché) et l'indépendance d'esprit (comportement critique) permettent à l'administrateur de s'acquitter plus facilement de son rôle de fiduciaire. Son devoir implique d'agir honnêtement, de bonne foi et dans le meilleur intérêt de l'entreprise.

"Idéalement, le conseil devrait être composé en majorité de membres indépendants", précise Me Dorval.

Il signale toutefois qu'il est avantageux d'y compter aussi quelques personnes qui connaissent bien toutes les ficelles de la compagnie.

Par ailleurs, l'entreprise ne doit pas se contenter de constituer un conseil d'administration largement indépendant; elle doit aussi le maintenir tel quel.

Cela suppose la mise en place de mécanismes pour gérer et prévenir les conflits d'intérêts.

Supervision active

Pour sa part, la supervision active assure que l'administrateur s'acquittera de son rôle premier: améliorer le rendement des actionnaires.

De cette façon, il agira "avec soin", souligne Thierry Dorval.

En d'autres termes, il utilisera toute la diligence et la compétence qu'une personne raisonnablement prudente exercerait en de pareilles circonstances.

"Par exemple, un administrateur sérieux s'assurera que les cas critiques sont traités au conseil et que des réunions à huis clos sont organisées pour revoir la stratégie de l'entreprise", ajoute le spécialiste.

Selon lui, tout administrateur indépendant qui exerce une supervision active sera apte à défendre les intérêts de l'entreprise puisqu'il diminuera le risque - et le coût - d'une mauvaise gestion, tout en s'acquittant de ses devoirs de diligence et de loyauté.

La boucle est alors bouclée

Encadrement flexible

En simplifiant de la sorte les règles de gouvernance, Me Dorval a également cherché à démontrer l'importance d'avoir un encadrement flexible.

"Il n'y a pas de place pour le dogmatisme en cette matière", affirme-t-il.

L'avocat critique l'approche américaine qui a imposé Sarbanes-Oxley sans préalablement en analyser les avantages et les coûts.

Il rappelle que les bonnes pratiques de gouvernance ne devraient jamais mettre en péril la survie d'une entreprise.

"Si des règles s'avéraient trop coûteuses, les administrateurs seraient dans l'obligation de trouver un substitut qui conviendrait mieux à la réalité de l'entreprise, dit-il. Cela sous-entend que l'encadrement réglementaire doit permettre certains ajustements en fonction des caractéristiques propres à chaque entreprise."