Il ne faudra pas s'étonner d'une vague prochaine de fermetures de magasins au Canada, avec le ralentissement économique, la crise financière d'origine américaine et la déroute des Bourses, lundi.

Il ne faudra pas s'étonner d'une vague prochaine de fermetures de magasins au Canada, avec le ralentissement économique, la crise financière d'origine américaine et la déroute des Bourses, lundi.

Les fermetures de magasins vont augmenter de 7% cette année aux États-Unis, particulièrement dans les vêtements, prévoit l'International Council of Shopping Centres (ICSC), dans son dernier rapport. Il s'agira d'une deuxième vague, après celle qui a particulièrement frappé les meubles l'automne dernier. Le phénomène touchera cependant moins les chaînes canadiennes, déclare à La Presse Affaires Jean Lambert, directeur de la recherche de l'ICSC.

Par contre, la société de comptables et de professionnels RSM Richter aide déjà des entreprises du Québec à sabrer leurs coûts, y compris par des fermetures de magasins et des compressions de leur superficie, souligne Marie-Claude Frigon, spécialiste du commerce de détail.

C'est que «la chute boursière de lundi n'est pas la cause, mais la conséquence du ralentissement économique provoqué en partie par l'endettement des ménages», explique Jacques Nantel, spécialiste du commerce de détail, professeur et secrétaire général de HEC Montréal. "Depuis l'automne 2007, on voit la croissance des ventes au détail ralentir", note Marie-Claude Frigon.

«La frilosité des détaillants et des consommateurs va se propager comme la petite variole», craint de son côté Normand Turgeon, professeur de marketing à HEC Montréal.

Ce ne sera «sûrement pas une année record pour les ouvertures de magasins», renchérit Jean-François Grenier, président d'Altis Géocom, qui les aide pourtant à s'implanter. «Au contraire, des chaînes vont rationaliser leurs réseaux, après la disparition des détaillants régionaux Colette et Charmante», dit-il. Les projets actifs d'implantation ne comprennent plus que ceux de Griffintown et de la carrière Saint-Michel, selon lui.

«Les consommateurs sont incapables d'augmenter leurs dépenses, depuis deux ou trois ans déjà, parce qu'ils sont trop endettés et incapables d'emprunter davantage», déclare Jacques Nantel.

«Les chaînes sont prises des trois côtés. D'abord, elles doivent utiliser davantage leur marge de crédit, faute de croissance de leurs ventes. Leurs liquidités diminuent, parce qu'elles arrivent plus difficilement à se financer, pendant que les dépenses de consommation ralentissent. Des détaillants proposaient du financement aux clients (payer dans deux ans), pour augmenter leurs ventes, mais le resserrement du crédit les rattrape», explique Jacques Nantel.

Les chaînes vont donc diminuer leurs stocks et tenter de payer leurs fournisseurs plus tard, dit-il. Aux Fêtes, Jacques Nantel prévoit que les ventes vont égaler l'inflation, pas plus, comparativement à la hausse de 3,5% prévue pour 2008 par le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD). «Ce ne sera pas une bonne saison et pour la troisième année d'affilée», déclare Marie-Claude Frigon.

Et comme après la récession de 1981, il faudra au moins 10 ans au commerce de détail pour revenir à la normale, craint Jacques Nantel.

Si des détaillants tentent de sabrer les coûts là où ça fait moins mal, d'autres doivent carrément passer au redressement, à des fermetures de magasins ou à des restructurations, ajoute Marie-Claude Frigon.

«Le ralentissement de l'expansion est pas mal généralisé. Des chaînes américaines s'en venaient avec de gros plans d'expansion au Québec, mais elles vont arriver moins vite», lance la spécialiste de RSM Richter. En outre, des détaillants veulent réduire les locaux de leurs magasins moins performants, sinon les fermer. Marie-Claude Frigon croit que la rationalisation va durer au moins jusqu'au printemps 2009.

La baisse des ventes au détail sera «moins dramatique au Canada, mais elle va nous ramener quelques années en arrière, souligne Jean Lambert. Des chaînes comme Wal-Mart devraient profiter de la situation».

«Ça risque d'être un moment difficile à traverser», convient le président-directeur général du CQCD, Gaston Lafleur. Les ventes des supermarchés et des pharmacies seront moins touchées, dit par contre Jean-François Grenier.

3,5%

HAUSSE DES VENTES DE DÉTAIL INITIALEMENT PRÉVUE EN 2008

Sources: Conseil québécois du commerce de détail

0%

HAUSSE DES VENTES DE DÉTAIL PRÉVUE AUX FÊTES

Source: Jacques Nantel, HEC Montréal