Ni Jeff Rubin, ni HEC Montréal, ni The Economist ne voient d'autres possibilités. Le plan Paulson doit passer, réclame-t-on à l'unisson, surtout en raison de l'effet «bas de laine». Voici pourquoi.

Ni Jeff Rubin, ni HEC Montréal, ni The Economist ne voient d'autres possibilités. Le plan Paulson doit passer, réclame-t-on à l'unisson, surtout en raison de l'effet «bas de laine». Voici pourquoi.

À l'heure actuelle, la crise du crédit va bien au-delà des hypothèques subprimes, des produits financiers contaminés ou des excès de l'effet de levier. Elle touche le fondement même du système: la confiance.

Cette confiance permet aux déposants de placer leur argent à la banque les yeux fermés. Et aux banques de prêter cet argent aux entreprises, qui à leur tour investissent et font rouler l'économie. Sans cette confiance, les particuliers auraient tendance à empiler leur argent dans un bas de laine, au détriment de tout le reste.

Actuellement, ce sont les banques américaines elles-mêmes qui engraissent leur bas de laine. Normalement, une Caisse «P» accepte qu'une Banque «R» lui doive de l'argent au terme d'une journée normale d'activité, compte tenu des milliers de transferts d'argent de toute sorte entre elles. Le lendemain, de toute façon, le balancier des transferts peut aller dans l'autre sens.

Or, aujourd'hui, cette confiance n'existe plus entre les institutions financières américaines, ce qui affecte leurs activités quotidiennes de compensation. Les banques doutent de la solidité du prochain et préfèrent emprunter leurs liquidités directement auprès de la banque centrale. Et comme investissements temporaires, elles placent leur argent dans des titres hyper sûrs, comme les bons du trésor américains.

Hier, ces bons du Trésor étaient à ce point demandés que les banques n'exigeaient plus qu'un très faible rendement pour acheter ces titres, soit 0,5%. Habituellement, on aurait dû s'attendre à 2% ou 2,5%.

«Le fait que les banques ne prêtent plus, qu'elles achètent des obligations d'épargne du gouvernement, ne crée pas d'activité économique. Il faut rétablir la confiance avec un plan Paulson, on a plus le choix. Plus on attend, plus il va peut-être falloir augmenter le montant de 700 milliards», soutient Daniel Racette, directeur de l'Institut d'économie appliquée de HEC Montréal.

En vertu du plan Paulson, le gouvernement rachèterait essentiellement un certain volume de produits financiers contaminés pour rétablir la confiance. Un bloc de 250 milliards US serait injecté après l'adoption du plan, suivi d'un 100 milliards US mis à la disposition du président des États-Unis. Un autre bloc de 350 milliards US viendrait éventuellement selon la volonté du Congrès américain. Le gouvernement serait être en partie compensé avec l'obtention d'actions dans les banques faisant l'objet d'un rachat de produits financiers toxiques.

Même l'influent hebdomadaire The Economist vient de donner son appui au plan, même s'il est imparfait. «L'éventualité d'un échec du plan ferait basculer davantage le marché du crédit dans l'abysse. Le congrès doit l'approuver, et bientôt», écrit The Economist.

L'économiste en chef de la Banque CIBC, Jeff Rubin, croit également qu'un tel plan doit être mis en place dès maintenant pour éviter que ne soit contaminé le reste du système.

Daniel Racette, de HEC Montréal, rappelle que la situation financière d'aujourd'hui ressemble au prélude de la Grande Dépression des années 30. «Mais à l'époque, la banque centrale n'avait pas voulu intervenir pour rétablir la confiance. Les effets qui ont suivi sur l'économie réelle ont été désastreux», rappelle M. Racette, qui a fait son doctorat sur la Grande Dépression.

L'économiste a une grande confiance dans les institutions financières canadiennes, dont on loue aujourd'hui le conservatisme décrié hier.

Claude Montmarquette, économiste émérite de l'Université de Montréal, demeure également confiant. «À mon avis, le système va être relancé. Je ne suis pas pessimiste. On ne s'en va pas vers la dépression de 1929, car on sait maintenant quoi faire pour l'éviter», dit-il.

Par contre, si l'effet bas de laine perdure et la confiance n'est pas retrouvée rapidement, c'est l'économie réelle des États-Unis qui va être affectée, avec de lourdes pertes d'emplois. Et comme les États-Unis représentent 22% de l'économie mondiale.