Craignant que soient découvertes des informations compromettantes lors d'une enquête, en 1999, Ronald Weinberg et Micheline Charest ont donné instruction à l'avocate de leur entreprise de jeter aux ordures de nombreux contrats confidentiels et dossiers de travail.

Craignant que soient découvertes des informations compromettantes lors d'une enquête, en 1999, Ronald Weinberg et Micheline Charest ont donné instruction à l'avocate de leur entreprise de jeter aux ordures de nombreux contrats confidentiels et dossiers de travail.

Quand Me Marie-Josée Corbeil a refusé, un «grand ménage» s'est fait pendant une période «d'une ou deux semaines» et a commencé quand elle n'était pas au bureau.

Selon Me Corbeil, «beaucoup» d'instructions sur les documents à jeter ont été transmises à ses employés de bureau par le truchement de sa propre secrétaire, «qui était très près de Mme Charest».

Tous les «dossiers de travail» sur les productions terminées chez Cinar ont été jetés.

C'est ce qu'a affirmé sous serment Me Corbeil en 2001, alors vice-présidente principale chez Cinar, lors d'un interrogatoire par des enquêteurs de la Commission des valeurs mobilières du Québec (CVMQ) en 2001.

Selon Me Corbeil, plusieurs personnes de son département ont participé à l'opération, mais elle pense que ses subalternes «ont au moins eu la présence d'esprit de faire en sorte que pas de contrats signés aient été jetés», ce qui élimine, selon elle, les risques que de l'information compromettante ait complètement disparu.

Cet interrogatoire fait partie du dossier de cour du procès au civil pour plagiat intenté par le scénariste Claude Robinson contre Cinar, M. Weinberg, la succession de sa femme feu Micheline Charest, ainsi que 10 autres firmes et personnes.

Une ascendance considérable sur la direction

Dans son témoignage, en 2001, Me Corbeil décrit une atmosphère de travail chez Cinar où Mme Charest et son mari, M. Weinberg, avaient toujours eu une ascendance considérable sur la direction.

Depuis 1993, l'année de son entrée comme avocate chez Cinar, les patrons de Me Corbeil étaient des gestionnaires «contrôlants» et exerçaient des «pressions incommensurables» sur les employés pour que Cinar atteigne ses objectifs commerciaux et financiers.

Me Corbeil, qui travaille maintenant pour une autre firme de production audiovisuelle, n'a pas rappelé La Presse mercredi.

Dans son témoignage, en 2001, elle affirme avoir plusieurs fois indiqué à ses deux patrons que certaines pratiques chez Cinar «étiraient l'élastique» de la légalité et comportaient des «risques». Mais M. Weinberg, en particulier, «avait cette habilité-là de me convaincre qu'un mur bleu était vert» et que tout était légitime.

Point de rupture

Le point de rupture a été atteint en décembre 1999, quelques semaines après l'éclatement du scandale Cinar et l'ouverture d'une enquête menée des vérificateurs externes.

M. Weinberg et Mme Charest sont entrés dans le bureau de Me Corbeil et «ont demandé que soient jetés certains dossiers (...), beaucoup de contrats de nature confidentielle ou beaucoup de dossiers de travail».

En entendant cela, «je me suis mise à pleurer», a dit Me Corbeil aux enquêteurs de la CVMQ.

«J'ai dit que j'étais complètement contre ça et que je ne voulais que ni moi ni personne dans mon département ne soit impliqué dans quelque chose comme ça. Que s'il y avait des erreurs qui avaient été faites, j'étais prête à faire face à la musique, mais que, selon moi, c'était pire que tout ce qu'on avait fait, que... que je ne voulais pas faire ça.»

L'avocat de M. Weinberg et des autres défendeurs, Me Alain Dussault, n'a pu être joint mercredi à ce sujet.