Un nouveau parfum signé Christian Lacroix. Une eau de toilette conçue par le baseballeur Derek Jeter.

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Des porte-parole jeunes et sexy comme Reese Witherspoon: la marque Avon est déterminée à convaincre le monde entier qu'elle est bien entrée dans le XXIe siècle.

Et non coincée dans un sous-sol de banlieue des années 70, avec un groupe de «madames Avon» trop maquillées.

Depuis deux ans, le géant américain des cosmétiques a entrepris un virage majeur. Le groupe veut d'une part réduire ses coûts de production, mais il veut surtout gagner de nouvelles clientes grâce à une mégaoffensive publicitaire. Au Canada comme dans la centaine de pays où il fait affaires.

«Nous dépensons plus en publicité que nous ne l'avons jamais fait dans l'histoire d'Avon», a souligné à La Presse Affaires Liz Smith, promue la semaine dernière présidente mondiale des Produits Avon, qui était de passage à Montréal.

Les efforts de promotion sont titanesques. En 2005, Avon a bonifié de 83% ses dépenses publicitaires, qui grimperont d'un autre 35% cette année... à 340 millions US!

Ces investissements massifs ont contribué à faire grimper les ventes globales d'Avon de 8% l'an dernier (à 8,8 milliards US), mais ils ont aussi amputé quelque peu la rentabilité du groupe.

Pas que des «matantes»

Pour l'heure, la marque fondée en 1886 veut à tout prix dégager une image de modernité, comme en témoignent ses nouveaux produits branchés et ses nouvelles porte-parole en vogue.

Jeudi dernier, le groupe a aussi inauguré un centre de distribution ultramoderne à Pointe-Claire, dans l'Ouest-de-l'Île, un investissement de 20 millions de dollars canadiens.

Ce nouveau centre, venu se greffer aux bureaux déjà existants d'Avon - la filiale canadienne est dirigée à partir de Montréal -, est de loin le plus «high tech» du groupe, ont répété les dirigeants à un parterre réjoui d'employés et de représentantes.

Or, si le centre de distribution montréalais est à la fine pointe de la technolgie, le modèle de vente d'Avon, lui, a peu évolué.

Depuis des décennies, le groupe vend la vaste majorité de ses produits grâce à un réseau mondial de représentantes, les fameuses «madames Avon», sans aucune présence en magasin.

Le modèle est encore très efficace, tranche Scott Schlackman, président d'Avon Canada.

«Vous parlez de notre système de vente, comme quoi il est un peu vieillot, mais je ne vois pas du tout ça comme ça, a-t-il dit en entrevue. C'est même un avantage dans le monde d'aujourd'hui, car on marie les technologies modernes (de distribution) et le bon vieux contact face à face.»

Plus de 5,3 millions de femmes (et quelques hommes) vendent des produits Avon dans le monde, dont 70 000 au Canada. Des gens qui, dans certains cas, n'auraient aucun revenu.

«Ce qui est génial chez Avon, c'est qu'on donne une opportunité de gain aux femmes, dit M. Schlackman. Des femmes peuvent faire ça à temps plein et gagner un très bon salaire, dans d'autres cas, elles ont un enfant et ne peuvent travailler à plein temps, alors on leur donne la chance de travailler.»

Avon a bonifié récemment les primes versées à ses représentantes, un effort de plus pour tenter de dynamiser les ventes.

Les revenus ont progressé de 9,3% au Canada l'an dernier, dit le président de la filiale, légèrement plus que dans l'ensemble du groupe.

Marge de manoeuvre

La division canadienne a une certaine marge de manoeuvre par rapport à la maison mère américaine, explique Scott Schlackman, un New-Yorkais d'origine qui vit maintenant à Westmount et parle bien français.

En ce qui concerne le marketing, par exemple, l'approche est un peu différente.

«Sur le marché canadien, il y a souvent des offres publicitaires très agressives, a-t-il dit. On va donc commencer à augmenter le nombre de brochures qu'on envoie. Aujourd'hui, on en distribue 20 par année, on va monter à 26.»

Aussi, malgré la faible distance qui les sépare, les Canadiennes et les Américaines n'aiment pas nécessairement les mêmes produits, poursuit M. Schlackman.

«Aux États-Unis, on vend beaucoup plus de parfums, et c'est beaucoup plus difficile d'en vendre au Canada, dit-il. Et le marché du Québec est différent. Ici, on vend beaucoup plus de produits de soins de la peau.»

Pour séduire les Québécoises, le dirigeant n'exclut pas d'embaucher une vedette d'ici, qui ferait la promotion des produits et des valeurs d'Avon comme le fait l'actrice Reese Witherspoon à l'échelle mondiale depuis quelques mois.

«Nous sommes en train de regarder beaucoup de choses en ce moment. Je pense qu'il y a une énorme opportunité pour Avon dans le marché du Québec.»

Avon, qui ne dévoile pas les résultats de ses différentes filiales, a enregistré un bénéfice net de 477,6 millions US en 2006, en baisse de 44%. Des profits fortement amputés par les importants coûts de restructuration.

Au deuxième trimestre de 2007 (le dernier annoncé), les profits ont chuté de 25%, à 113 millions US, malgré une hausse des revenus de 12%.

Le vaste programme de réduction des coûts lancé par la PDG Andrea Jung n'est pas terminé et il devrait éventuellement faire économiser 700 millions à la société.

La filiale canadienne d'Avon est en activité depuis 1914 et emploie quelque 600 personnes.