La crise à Airbus, déclenchée par les difficultés d'industrialisation du nouvel avion géant A380, pourrait conduire à une vaste refonte de l'organisation du groupe, encore marquée par les traditions de partage du travail par nationalité des débuts, en 1970.

La crise à Airbus, déclenchée par les difficultés d'industrialisation du nouvel avion géant A380, pourrait conduire à une vaste refonte de l'organisation du groupe, encore marquée par les traditions de partage du travail par nationalité des débuts, en 1970.

La société européenne intégrée qui a remplacé le groupement d'intérêt économique (GIE) en 2000 s'efforce depuis de mettre en place une organisation par fonction plutôt que par pays.

Elle veut aussi s'émanciper du "juste retour industriel" imposé à l'origine par les Etats partenaires (France, Allemagne, Grande-Bretagne et Espagne) et qui voulait que les pays obtiennent une part de travail correspondante à leur participation dans le groupe. Mais les habitudes ont la vie dure, selon des sources internes concordantes.

Airbus et sa maison mère EADS doivent en premier lieu résoudre les difficultés liées à l'adaptation des câblages électriques aux différentes demandes des clients, "en particulier sur les tronçons venus d'Allemagne" pour l'A380, selon une source industrielle.

Dans la foulée, la direction de l'avionneur compte lancer un vaste plan de réduction de coûts, mais aussi une réorganisation industrielle s'attaquant aux féodalités techniques nationales, supprimant les derniers vestiges d'une répartition "politique" du travail.

L'originalité du système de production Airbus, symbole du partenariat des industriels européens, devrait demeurer: les tronçons d'avions produits par les usines en France, Allemagne, Angleterre et Espagne convergent vers les usines d'assemblage correspondante en avions cargo Beluga ou, pour l'A380, sur un itinéraire fluvial et routier à grand gabarit.

En revanche on pourrait cesser, à terme, de voir des avions assemblés à Toulouse s'envoler pour aller chercher leurs aménagements intérieurs à Hambourg, comme c'est le cas pour le monocouloir A320 ou pour l'A380. Ou voir coexister deux chaînes d'assemblage, l'une à Toulouse l'autre à Hambourg, pour la même famille d'appareils (les A320 à Toulouse, les A318, A319 et A321 à Hambourg).

"Le bon sens voudrait cependant que la création de chaînes spécialisées par programme ne se fasse pas brutalement, au risque d'ajouter un élément de perturbation supplémentaire (dans les programmes en cours), mais que l'orientation soit mise en oeuvre lors des prochains programmes", remarque une autre source interne.

"Il faut en tout cas abattre les murailles dont les équipes de chaque pays s'entourent pour protéger leurs habitudes de travail", remarque un autre cadre d'Airbus, en soulignant "que l'absence d'outil informatique commun entre Allemands et Français a joué un rôle dans les déboires d'intégration des câblages électriques de l'A380".

Le groupe a entrepris de créer des fonctions transnationales intégrées, en lançant notamment il y a deux ans des "centres opérationnels d'excellence (COE) par métier" rappelle-t-on chez Airbus.

C'est d'ailleurs en s'appuyant sur le COE électrique basé à Blagnac que le nouveau patron d'Airbus Christian Streiff a pris une de ses premières mesures. Il a décidé la mise en place immédiate d'une "plateforme électrique" dans ses usines toulousaines pour harmoniser le travail des Allemands et des Français.

Cette plateforme, présentée fin août au comité d'entreprise, regroupe selon une source interne à Airbus entre 250 et 300 spécialistes français et allemands afin "d'échanger les expériences et les méthodes". Pour "aider les collègues allemands à sortir de l'ornière", ajoute la même source.

EADS

dbe/jlb/at