Les femmes représentent seulement 16,8 % des propriétaires majoritaires de petites et moyennes entreprises au pays, mais elles sont à la tête de 58 % des entreprises qui ont un impact social, que ce soit dans le domaine de la sécurité alimentaire, la réduction des inégalités, la bonne santé, l’éducation ou la consommation durable. Des entreprises qui ont besoin de capitaux pour se développer et devenir rentables.

La Banque de développement du Canada (BDC) a annoncé la création l’automne dernier de la plateforme d’investissement Excelles, dotée de 500 millions, pour soutenir les entreprises dirigées par des femmes et favoriser l’émergence de l’entrepreneuriat féminin. Il s’agit de la plus importante plateforme d’investissement du genre au monde, selon la BDC.

Cette plateforme est composée de trois éléments : un fonds de 300 millions consacré aux entreprises de technologies, un fonds d’investissement de 100 millions qui financera des fonds spécialisés et, enfin, le Lab Excelles, doté lui aussi de 100 millions qui serviront à soutenir en co-investissement les entreprises en démarrage.

Le Lab Excelles est officiellement lancé ce mercredi et sa directrice générale, Sévrine Labelle, va entreprendre le déploiement d’une première phase d’investissements de 35 millions en sollicitant des investisseurs partenaires.

« Pour la Phase 1 du Lab Excelles, on veut s’associer à des incubateurs, des accélérateurs, des groupes d’anges financiers accrédités ou des Fonds comme Evol ou Fondaction qui vont apporter du capital supplémentaire ou des compétences sous la forme de mentorat. Travailler en partenariat, c’est le cœur du modèle du laboratoire », explique Mme Labelle.

Au cours des cinq prochaines années, la BDC compte étudier le potentiel de croissance de quelque 75 entreprises en démarrage ou prédémarrage qui vont pouvoir profiter de son soutien financier.

« On prévoit investir sous forme d’équité ou de quasi-équité dans les entreprises retenues jusqu’à une hauteur de 250 000 $. Le modèle qu’on souhaite implanter, c’est par exemple d’avoir un financement d’un ange investisseur de l’ordre de 100 000 $, un prêt d’un Fonds comme Evol de 150 000 $ et notre participation de 250 000 $ », détaille la directrice générale.

Sévrine Labelle a une certaine expérience dans le financement d’entreprises à impact social, puisqu’elle a dirigé durant six ans l’organisme de financement durable et inclusif Evol.

« On va se fier à l’analyse de nos partenaires financiers, mais déjà, depuis quatre mois, j’ai rencontré des dizaines d’entreprises d’impact dirigées par des femmes et au moins les deux tiers se qualifiaient pour le laboratoire », souligne-t-elle.

Le Lab Excelles veut financer des entreprises sociales d’impact telles que les Aliments biologiques Prana, The Unscented Company qui fabrique des produits de nettoyage sans parfum ou encore Loop Mission qui propose des jus à partir de fruits et de légumes imparfaits.

Horizon à long terme

On comprend que les investissements réalisés par l’entremise le Lab Excelles vont être faits dans un horizon à long terme et qu’on ne s’attend pas à la BDC à obtenir des rendements avant sept ou même dix ans.

« On investit dans des secteurs où les femmes sont très actives, où elles relèvent des défis sociaux, beaucoup d’entreprises sont dans le secteur de l’environnement. On va accompagner des entreprises qui sont à leurs tout débuts, certaines qui sont encore à tester leur concept, on est un laboratoire », souligne Sévrine Labelle.

Le Lab Excelles a aussi ciblé une quarantaine d’investisseurs potentiels à travers le Canada avec qui il prévoit réaliser des partenariats. On prévoit annoncer de 15 à 20 partenaires d’investissement dès l’automne. Le programme d’investissement de 100 millions est prévu pour s’échelonner sur cinq ans.

Malgré certaines avancées réalisées au cours des 20 dernières années qui ont permis une meilleure ouverture à la représentativité féminine au sein des directions d’entreprise et une plus grande visibilité au sein des conseils d’administration, les femmes occupent encore aujourd’hui une place très minoritaire comme propriétaires de petites et moyennes entreprises au pays.

Salwa Salec, cheffe Équité, diversité et inclusion au Mouvement Desjardins, soulignait récemment dans une discussion organisée par le Centre des compétences du futur que la sous-représentativité des femmes dans l’actionnariat de contrôle des entreprises commençait à se résorber dans le domaine des entreprises technologiques.

Mme Salec constate ainsi que 29 % des nouvelles entreprises en technologie au Québec sont détenues ou dirigées par des femmes et que 54 % des jeunes femmes qui intègrent le marché du travail considèrent que l’entrepreneuriat peut constituer un bon choix de carrière.

Voilà autant d’éléments qui nous permettent d’entrevoir une plus grande participation active des femmes dans l’entrepreneuriat et de corriger leur sous-représentation qui a souvent été liée à la difficulté d’avoir accès à du capital, ce que la nouvelle plateforme Excelles de la BDC viendra en partie corriger.