Les magasins et les entreprises ferment, le chômage explose, le PIB plonge: la Grèce, qui doit entamer cette semaine des négociations avec les banques du monde entier pour effacer une partie de sa dette, a confirmé mardi l'état de profonde récession de son économie réelle.

Sur la période juillet-septembre, et malgré l'apport de l'activité touristique en été, la chute du produit intérieur brut grec a été de 5,2% comparé à la même période de l'année 2010, selon les statistiques publiées mardi.

Ce recul, le plus important en Europe, constitue néanmoins une amélioration relative par rapport aux deux trimestres précédents, où le PIB avait plongé de respectivement 8,3% et 7,4% par rapport à 2010, selon les statistiques révisées, également publiées mardi.

Dans ce contexte dépressif, l'ouverture de négociations, jugée «urgente» par le ministère grec des Finances, entre le gouvernement et les banques en vue de l'effacement d'une partie de sa dette publique s'avère aussi délicate qu'indispensable pour espérer faire redémarrer un jour l'économie étouffée du pays.

Les discussions s'ouvriront «cette semaine», selon une source du Ministère, alors que le quotidien libéral grec Kathimérini a évoqué des négociations dès mercredi à Francfort, où est attendu d'ici vendredi le dirigeant du lobby bancaire mondial IIF, Charles Dallara.

Parallèlement, le nouveau gouvernement de coalition dirigé par l'ex-banquier central Lucas Papademos, a trois autres fers au feu: il doit obtenir mercredi un vote de confiance au parlement pour continuer la politique d'austérité et de réformes jugée nécessaire par les créanciers du pays pour maintenir leur soutien à la Grèce au bord de la faillite.

Il affrontera jeudi une manifestation annuelle marquant chaque 17 novembre la fin de la dictature des colonels, et devenue depuis quelques années une tribune de protestation contre les politiques d'austérité.

Enfin lundi, M. Papademos doit effectuer son premier déplacement en tant que chef de gouvernement, en se rendant à Bruxelles pour rencontrer les responsables de la Commission, qui demandent un engagement écrit de son équipe à respecter ses engagements avant le versement vital pour le pays d'une tranche de 8 milliards d'euros d'un prêt concédé en mai 2010.

Dans l'attente, les chiffres de la croissance publiés mardi «constituent un très mauvais signe pour le pays, a déclaré Angelos Tsakanikas, de l'institut patronal IOBE.

«En général, pendant l'été, avec le tourisme, la situation s'améliore» note-t-il.

«2011 sera la pire année de récession, une année perdue», ajoute-t-il. Sur l'ensemble de l'année, le gouvernement table sur une baisse du PIB de 5,5%.

Les associations de commerçants ne cessent pour leur part de dénoncer les fermetures en masse de magasins, qui se traduisent dans certains quartiers d'Athènes par des rues bordées de devantures vides, où seul le mot «enoikiazetai» (à louer) apparaît.

Sur ce sujet, l'IOBE reste prudent, car à ses yeux est aussi en cours un phénomène de «rationalisation» nécessaire de l'économie grecque, où la distribution, souvent de produits importés, prenait trop de place par rapport à la production, créatrice de valeur ajoutée.

«Il y avait trop de petits magasins, nous espérons que les structures d'entreprises seront plus saines après ce phénomène de rationalisation» a ajouté M. Tsakanikas.

L'an prochain, la récession devrait se poursuivre en Grèce pour la cinquième année consécutive, quoiqu'à un rythme plus lent. Pour 2012, «nous espérons qu'avec la mise en place des réformes et le changement de climat politique, les conditions pour la création d'un climat plus positif seront réunies», ajoute M. Tsakanikas, en tablant sur un PIB en recul «de 3% environ».

Les statistiques du chômage récemment publiées montrent également une explosion durant l'été, période d'activité en général en Grèce grâce au tourisme.

Or en août, le taux de chômage a franchi un nouveau palier à la hausse en s'établissant à 18,4% au lieu de 12,2% un an auparavant et 16,5% en juillet.

Selon des syndicalistes et des analystes, ce phénomène atteste d'un sursaut de l'économie au noir, certaines entreprises ayant recouru au travail non déclaré et dissimulé une partie de leur activité, car étouffées par la crise combinée aux mesures d'austérité.

«Il serait possible d'envisager une telle hypothèse», avance prudemment M. Tsakanikas.