C'est passé sous le radar - quelques mentions dans la presse en région, tout au plus. Mais le gouvernement Couillard s'est retrouvé tout l'été à éteindre des feux, des brasiers qui apparaissaient partout où on trouve des réserves amérindiennes.

Dans sa propre circonscription de Roberval, Philippe Couillard a été réduit, à la fin du mois d'août, à implorer le maire de Roberval, Guy Larouche, et le chef du conseil de bande de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique, d'enterrer la hache de guerre. La réserve doit en effet agrandir son territoire, mais il faudrait exproprier des Blancs pour permettre l'expansion, et le député Couillard a soutenu qu'il ne saurait être question d'exproprier des gens contre leur gré. L'appel au dialogue, en août, a calmé le jeu, mais à Québec, les frictions entre les autochtones et les Blancs ont vite fait ressurgir le souvenir sulfureux de la crise d'Oka.

Les autochtones revendiquent le droit de récupérer des terrains importants pour leur culte, comme dans la pinède d'Oka à l'été 1990. Le premier ministre Couillard a rencontré en privé neuf chefs de bande au début de l'été pour tenter d'amorcer un dialogue plus pacifique. Sur la Côte-Nord, les autochtones réclament 900 millions pour l'utilisation des ressources par l'Iron Ore.

À la fin de l'été, le premier ministre a soutenu qu'il faudrait peut-être penser à une autre organisation que les réserves traditionnelles. Avec le retour du Plan Nord promis par Philippe Couillard, la normalisation des relations avec tous les groupes deviendra centrale. Le gouvernement ne sait trop comment amorcer la négociation globale, susceptible de régler des années de contentieux avec les neuf grandes communautés.

Sur la Côte-Nord, les autochtones ont mis du muscle, cet été, pour convaincre Québec de leur confier la construction d'un tronçon de 14 km au nord de Kegaska, village situé au nord de Natashquan. Dès juin, trois chefs - ceux de Natashquan, Mingan et de la Romaine - ont transmis une lettre au premier ministre le prévenant qu'ils ne pouvaient garantir que leur population resterait pacifique si leurs demandes n'étaient pas entendues. Étant donné le degré de détresse des résidants des réserves, les leaders ne pouvaient s'engager à calmer indéfiniment le jeu.

Pendant une bonne partie de l'été, le gouvernement s'est préparé à intervenir au cas où des barrages apparaîtraient sur la route 138.

Au-delà de la route à construire, les autochtones revendiquent, comme les Blancs de la région, leur part du gâteau dans les retombées du chantier de la Romaine. Hydro-Québec soutient que 80% de la main-d'oeuvre est régionale, un chiffre contesté par les manifestants.

Sur la route 117, les Algonquins sont aussi mécontents: ils réclament du territoire tout le long de la route, jusqu'en Abitibi. Le bois est sorti de la région et les autochtones ne voient plus de sources de revenus évidentes. Dans le nord de la Mauricie, les frictions avec les Attikameks sont constantes, encore pour des revendications territoriales. Chez les Mohawks, la reconnaissance des mariages mixtes pose aussi problème, mais l'obtention du statut d'autochtone est un enjeu pour le gouvernement fédéral.

Hier, le premier ministre Couillard a rencontré en privé le Grand Chef de la Nation crie, Matthew Coon Come, arrivé lui aussi avec sa liste de doléances sous le bras - notamment l'opposition des siens à l'exploitation de l'uranium sur la Côte-Nord.

Depuis la crise d'Oka, Québec n'a toujours pas mis la table pour amorcer le dialogue susceptible d'amener un règlement global des récriminations autochtones. Avec l'automne, et la reprise de la chasse, les manifestations vont diminuer, mais le problème restera entier.