Le gouvernement du Québec a décidé de ne pas attribuer à la firme informatique CGI un contrat de fourniture et d'installation de 37 photos radars fixes, mobiles et aux feux rouges, pour lequel elle était seule en lice.

Conséquence de ce geste rarissime, un nouvel appel d'offres sera lancé sous peu, ce qui retarde d'un an le déploiement de ces appareils.

« Le résultat de l'appel d'offres lancé en mars dernier ne satisfait pas aux attentes du gouvernement. Dans ce contexte, la décision qui s'impose est de lancer un nouvel appel d'offres afin d'assurer une saine concurrence et de garantir, en toute transparence, une gestion adéquate des deniers publics », a expliqué hier le ministre Sylvain Gaudreault dans un communiqué.

Même si une quinzaine d'entreprises s'étaient lancées dans le processus à la suite de l'appel d'offres de Québec, en mars 2013, CGI était la seule à avoir déposé un dossier de soumission.

Son dossier était depuis épluché par le Centre des services partagés du Québec (CSPQ).

Le montant soumis par CGI n'a pas été dévoilé. Dans son communiqué, le Ministère écrit que « l'écart entre l'estimation et le prix proposé » par CGI était « trop important ». Selon nos sources, il serait « exorbitant ».

C'est l'un des facteurs, avec l'absence de concurrence, qui a mené à l'annulation de ce contrat et le retour à la case départ.

« Notre proposition de prix reflétait les attentes du Ministère, les travaux à effectuer ainsi que la technologie de pointe et l'expertise requises », a répliqué Sébastien Barangé, directeur des communications de CGI, dans un courriel envoyé à La Presse.

« Le Centre de services partagés nous a communiqué sa décision d'annuler son appel d'offres, il précise néanmoins que l'évaluation de notre proposition a démontré que celle-ci est conforme et répond aux critères de qualité attendus », a ajouté le porte-parole.

Les villes de Gatineau et de Laval, ainsi que les agglomérations de Longueuil et de Québec devront donc elles aussi attendre encore plusieurs mois avant de recevoir les appareils qu'elles prévoyaient implanter dans leurs rues.

Comme solution transitoire, le ministère des Transports (MTQ) et le ministère de la Sécurité publique « envisagent de déterminer de nouveaux endroits pour lesquels le respect des limites de vitesse pourrait être contrôlé par les appareils mobiles déjà à la disposition de la SQ ».

En 2009, CGI avait déjà obtenu du gouvernement Charest le premier contrat de 7,2 millions pour le déploiement de la quinzaine d'appareils installés sur les autoroutes et à certaines intersections.

La firme annonce déjà son intention « d'examiner » le nouvel appel d'offres et le « réévaluer à la lumière des nouvelles exigences » du MTQ.

C'est la seconde fois en peu de temps que la firme CGI se voit retirer un contrat gouvernemental, ce qui pourrait peser lourd lorsque viendra le temps de demander son certificat à l'Autorité des marchés financiers.

En août dernier, la Sûreté du Québec (SQ) a refusé de lui attribuer un important contrat à la suite « d'allégations d'irrégularités dans le processus d'appel d'offres ». C'est finalement son concurrent Fujitsu, au deuxième rang des plus bas soumissionnaires, qui a été choisi.

La sanction est tombée à la suite d'une vérification interne menée par la SQ à la demande du grand patron Mario Laprise. Une lumière rouge s'était allumée après l'embauche par CGI de Mario Rancourt, auparavant inspecteur-chef responsable des technologies de l'information du corps policier.

Or, selon les informations dévoilées à l'époque par La Presse, le service que dirigeait Mario Rancourt avait activement travaillé sur le dossier lié à cet appel d'offres lorsqu'il était en fonction rue Parthenais.

Le dossier de CGI est actuellement entre les mains de l'Unité permanente anticorruption.

Le commissaire Robert Lafrenière a déjà déclaré que les contrats de plusieurs centaines de millions de dollars accordés par Québec aux firmes informatiques méritaient l'« attention » de son unité.

La firme CGI a aussi été montrée du doigt cet automne par plusieurs médias américains, dont le Wall Street Journal, qui rendaient la firme montréalaise responsable du fiasco informatique de l'Obamacare.