C'est aux universités, collèges et cégeps d'enseigner le français et l'anglais aux étudiants canadiens si le gouvernement fédéral veut économiser sur la formation linguistique.

C'est ainsi que le commissaire aux Langues officielles, Graham Fraser, a réagi à l'enquête publiée dans La Presse hier, qui révélait que les coûts de la formation dans les deux langues officielles dans la fonction publique fédérale avaient explosé depuis 2001.

Le commissaire Fraser n'a pas voulu se prononcer sur le caractère raisonnable ou déraisonnable de cette hausse, n'ayant pas toutes les données en sa possession.

« Ces coûts sont réels, a-t-il toutefois convenu. C'est un peu pourquoi je pense que les universités doivent se rendre compte du fait que le gouvernement fédéral, qui est le plus grand employeur au Canada, a besoin d'employés bilingues. »

Avec toute une génération de baby-boomers qui quitte graduellement vers la retraite, la situation ne changera pas, au contraire, a-t-il dit.

« On projette que bon an mal an, on va engager entre 12 000 et 15 000 nouveaux employés par année et que 5 000 de ces emplois vont être dans des positions désignées bilingues », a fait remarquer le commissaire.

« C'est plus grand que plusieurs usines de General Motors, a-t-il renchéri. C'est énorme.»

Les données publiées dans La Presse hier démontraient que les coûts de la formation avaient été en moyenne multipliés par cinq depuis une dizaine d'années dans une trentaine de ministères, sociétés d'État et organismes fédéraux desquels nous avions obtenu les statistiques en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Au ministère de la Défense, par exemple, ils sont passés de 13 millions à 22 millions de dollars depuis 2001.

Cette hausse est entre autres attribuable à une décentralisation des services. En 2007, le gouvernement a décidé de mettre un terme à la formation gratuite donnée par l'École de la fonction publique, pour en transférer la responsabilité à chaque ministère ou département. Ceux-ci doivent donc maintenant obligatoirement payer pour la formation de leurs employés.

Ces changements ont eu pour effet de faire passer le budget de la formation linguistique à l'École de la fonction publique de 31 millions $ en 2006-2007à 25 millions $ en 2007-2008, puis 13 millions $ en 2008-2009.

Néanmoins, Graham Fraser est resté prudent dans ses commentaires. « La première fois que j'ai entendu parler de l'idée de décentraliser et de privatiser, ma réaction était de voir les désavantages et de penser que c'était une façon de minimiser l'importance (de la formation linguistique) », a-t-il dit.

« Mais de plus en plus, je vois l'autre côté de la médaille. Ce que je ne suis pas en mesure de faire maintenant, c'est de comparer les résultats. » L'autre côté de la médaille, a expliqué M. Fraser, c'est la tendance des gestionnaires à valoriser davantage des services qui ont un coût. Il indiqué qu'il n'avait pas de projet de se pencher sur ce dossier dans un avenir proche.