Si le projet de loi 109, déposé hier à l'Assemblée nationale, avait été en vigueur, Frank Zampino n'aurait pu passer en quelques semaines de son poste d'élu municipal de Montréal à celui de vice-président de Dessau, firme qui venait de profiter d'un important contrat de la Ville.

En point de presse, hier, le titulaire des Affaires municipales, Laurent Lessard, a été catégorique: «C'est à cela qu'on voudrait barrer la route. Empêcher ce genre de comportement. Le cas de M. Zampino, c'est clair que c'est ce qu'on veut sûrement barrer en première ligne», a lancé sans hésiter M. Lessard.

Le projet de loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale prévoit donc des dispositions sur «l'après-mandat» d'un élu municipal. Qu'il démissionne ou qu'il soit battu, cet élu ne pourra, pendant un an, accepter d'emploi dans une firme qui a eu des contrats importants de l'administration municipale.

M. Lessard a été bien moins catégorique quand La Presse lui a demandé si son collègue Jean D'Amour pouvait être embauché par la firme de génie-conseil BPR après avoir quitté son poste de maire de Rivière-du-Loup. Il a été élu par la suite député de cette circonscription pour le PLQ. Il faut selon lui tenir compte de «l'importance de la transaction». Dans le cas de M. Zampino, le contrat qui avait été accordé à son nouvel employeur par la Ville de Montréal était d'une importance inhabituelle.

M. Zampino, qui a quitté son poste de président du comité exécutif de Montréal en mai 2008, est devenu vice-président de Dessau en janvier 2009. La firme de génie-conseil était un acteur important dans le consortium GéniEAU, qui avait obtenu un contrat de 350 millions pour doter Montréal de compteurs d'eau. Très controversé, le contrat a été suspendu, puis annulé par l'administration Tremblay durant la campagne électorale de l'automne 2009.

Code d'éthique

Le projet de loi 109 demande aux villes de se doter d'un code d'éthique qui contiendra obligatoirement des dispositions établies par Québec. Montréal, comme 140 autres villes, en a déjà un, mais devra le modifier pour ajouter les dispositions obligatoires.

Les citoyens pourront porter plainte au Ministère contre un élu municipal. Il devront toutefois s'appuyer sur des faits, des témoignages sous serment, a prévenu le ministre. Pas question de déclencher des enquêtes sur la foi d'un simple courriel.

Les sanctions pourront aller de la réprimande jusqu'à la suspension pour 180 jours. Si les faits sont suffisamment accablants pour nécessiter la révocation d'un élu, ce sera à la police de s'en charger, a expliqué M. Lessard, ancien maire de Thetford Mines.

La Commission municipale agira à titre de commissaire à l'éthique pour l'ensemble des villes. M. Lessard espère que son projet de loi pourra être adopté dès l'automne après avoir fait l'objet d'une consultation en commission parlementaire.