Encore décalé, et encore plus cher. Le report de l’antenne sud du Réseau express métropolitain (REM) au printemps 2023 entraînera de nouveaux dépassements de coûts, convient CDPQ Infra, qui estime néanmoins avoir fait des « progrès majeurs » dans les dernières années. À Montréal, Valérie Plante ne cache pas son inquiétude, tandis qu’à Québec, on attend « impatiemment » un résultat.

« C’est clair qu’il y a des augmentations de coûts. […] On fera une mise à jour autour de la mise en service. On vous démontrera la rigueur et la façon dont nous avons géré l’ensemble des enjeux liés au coût, particulièrement la formation et le manque de main-d’œuvre », a déclaré le président et chef de la direction de CDPQ Infra, Jean-Marc Arbaud, vendredi.

Aux dernières nouvelles, le REM géré par CDPQ Infra – ce qui exclut le segment à l’est, maintenant administré par Québec et Montréal — est évalué à plus de 7 milliards. On ignore encore de quel ordre seront les nouveaux dépassements de coûts.

Jeudi, La Presse a révélé que les dirigeants de la filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec voulaient éviter à tout prix une répétition du grave accident qu’a connu le train léger d’Ottawa, à l’hiver 2020.

Lisez « Le REM de la Rive-Sud encore retardé »

M. Arbaud a reconnu d’entrée de jeu que « la mise en service [du REM] aurait eu lieu en plein hiver, ce qui est loin d’être idéal pour les partenaires, les usagers, et pour le fait que les gens [apprivoisent] le projet ». Aujourd’hui, les tests à basse vitesse sont complétés sur la Rive-Sud jusqu’à la gare Centrale. D’ici la fin du mois, les tests à haute vitesse seront lancés.

Des enjeux pour justifier

En citant la pandémie, l’inflation et les enjeux d’approvisionnement, M. Arbaud a assuré que ces nouveaux retards auraient difficilement pu être évités. « On n’avait pas prévu non plus la guerre en Ukraine et ses conséquences », s’est-il justifié. Faut-il prévoir de nouveaux retards dans le futur ? « Je ne pense pas », a-t-il répondu.

Julien Hurel, directeur des systèmes de transport du REM, a reconnu que son groupe a « peut-être été un peu optimiste » en voulant livrer le système au début de décembre. « La décision qu’on assume, c’est de dire qu’il ne faut pas qu’on se plante, qu’on ne peut pas avoir de plan B », a-t-il souligné.

Un système tel que celui-là est conçu pour les usagers et pour le long terme, pour des années, d’où notre décision. On veut être absolument certains que la fiabilité est là, que les trains fonctionnent au plus haut niveau.

Jean-Marc Arbaud, président et chef de la direction de CDPQ Infra

M. Arbaud a par ailleurs assuré de son empathie les nombreux résidants de la Rive-Sud, au moment où Québec fermera à la fin du mois d’octobre trois des six voies du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, jusqu’à la fin de 2025. « Malheureusement, ce n’est pas réaliste d’ouvrir le système avant d’avoir passé un certain nombre d’étapes qui sont fondamentales. […] Nous, on travaille pour les usagers », a insisté le président.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

La mise en service de l’antenne sud du REM, prévue le 1er décembre, sera reportée au printemps.

Montréal déçu et préoccupé

Les réactions politiques n’ont pas tardé, vendredi. La nouvelle ministre des Transports, Geneviève Guilbault, ne cache pas qu’elle attend « impatiemment le REM ». « Le développement de grands projets de transport collectif est une priorité de notre gouvernement », a-t-elle déclaré, disant toutefois comprendre que CDPQ Infra fasse « preuve de prudence pour s’assurer du bon fonctionnement » du tronçon et de la sécurité des usagers.

Le cabinet de la mairesse Valérie Plante s’est dit « déçu d’apprendre le retard dans la mise en service du REM de la Rive-Sud ».

Avec le début imminent des travaux du pont-tunnel, l’accès de la métropole en provenance de la Rive-Sud va se complexifier. Nous avons besoin d’offrir à la population des alternatives de transport à l’auto solo.

Marikym Gaudreault, attachée de presse du cabinet de la mairesse de Montréal

Au cabinet de la mairesse de Longueuil, Catherine Fournier, on affirme prendre acte du report. « Nous savions qu’il s’agissait d’une possibilité et le Réseau de transport de Longueuil (RTL) s’y préparait donc déjà en conséquence », affirme l’attachée de presse Camille Desrosiers-Laferrière.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Vue aérienne de la future station Panama du REM, située à Longueuil

Le directeur du RTL, Michel Veilleux, est catégorique. « Nous étions prêts pour décembre avec notre réseau redessiné, nous le serons encore davantage au printemps », dit-il. Toutefois, le report « suppose que les améliorations prévues pour les différents secteurs de l’agglomération, qui comprend les villes de Brossard, Longueuil, Saint-Bruno, Saint-Lambert et Boucherville, soient reportées de quelques mois », convient-il.

Chez exo, on assure que le nouveau réseau d’autobus des secteurs Chambly-Richelieu-Carignan et Le Richelain/Roussillon sera déployé « dès le jour 1 de la mise en service de l’antenne Rive-Sud ». « Nous avons déjà entrepris l’installation des 1200 nouveaux panneaux d’arrêts d’autobus et la formation des chauffeurs », explique le porte-parole Jean-Maxime St-Hilaire.

La Société de transport de Montréal (STM), elle, se tient prête à déployer nouveau réseau de bus sur L’Île-des-Sœurs quand le REM entrera en service. « Les détails entourant l’évolution du service seront annoncés à une date ultérieure », a précisé le conseiller Renaud Martel-Théorêt à ce sujet.

Avec Maxime Bergeron et André Dubuc, La Presse

En savoir plus
  • Troisième report
    C’est le troisième report du tronçon Rive-Sud du REM. Cette antenne, qui relie Brossard à la gare Centrale de Montréal en passant par l’île des Sœurs, devait à l’origine être inaugurée à la fin de 2021. L’échéancier a par la suite été reporté au printemps ou à l’été 2022, puis à l’automne 2022, et finalement au printemps 2023.
    cdpq infra
  • 50 %
    Proportion approximative (54 sur 106) des trains du REM acheminés aux différents tronçons
    SOURCE : cdpq infra
    98 %
    Les six stations du tronçon sud du REM sont complétées « à 98 % », a dit le vice-président du projet REM, Denis Rivard, en prévoyant les terminer en décembre. Par ailleurs, la totalité des 16,6 km de rails et de systèmes électriques de l’antenne sud du REM ont été installés, a-t-il détaillé.
    SOURCE : cdpq infra