Ce ne sont pas seulement les études sur les péages que le gouvernement fédéral aimerait bien garder secrètes. Le langage utilisé dans les rapports d'ingénierie de la firme Delcan sur l'état du pont Champlain, rendus publics par La Presse en mars dernier, a été jugé si «alarmant» par des fonctionnaires de Transports Canada qu'ils ont sollicité une rencontre avec les experts de la société Les Ponts Jacques-Cartier et Champlain (PJCCI) pour être sûrs d'en saisir toutes les implications.

Selon une note de breffage classée «secrète», obtenue récemment par le journal The Gazette en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, des fonctionnaires ont été étonnés «par la terminologie utilisée» par les auteurs du rapport Delcan, en révisant cette étude. Le rapport Delcan, qui décrit le pont comme en «très mauvais état», et qui explique que la détérioration de cette structure commande une «extrême vigilance» de la part de PJCCI, affirmait également qu'il existe «un risque d'effondrement partiel du pont ou d'effondrement d'une travée».

Le 6 janvier 2011, une rencontre en haut lieu a donc été organisée entre les fonctionnaires de Transports Canada et les experts de PJCCI, qui ont reconnu qu'il existait «une vague possibilité» pour qu'un tel événement se produise. Par contre, dans l'éventualité où cela arriverait, PJCCI précisait qu'il était peu probable qu'un tel effondrement «survienne soudainement». Selon les experts, «il y aurait des signes avant-coureurs d'une telle défaillance», et le pont «pourrait être fermé à la circulation avant qu'il ne devienne dangereux pour les utilisateurs».

À l'époque où cette note a été rédigée, deux mois avant que La Presse ne révèle le contenu des deux rapports de Delcan, Transports Canada affirmait qu'«il n'existe aucun plan de les rendre publics», mais que des fuites médiatiques sont toujours possibles. «Il faut s'attendre à ce que de telles fuites génèrent de l'attention des médias locaux et régionaux», estimaient alors, avec justesse, les fonctionnaires de Transports Canada.

Dans l'éventualité d'une fuite, une «approche de communications délicate est recommandée et des réponses-médias ont été préparées» pour gérer l'intérêt de la presse envers l'état du pont le plus achalandé au Canada.