Il n'y aura pas de révolution climatique. Pas maintenant. Malgré une certaine urgence - pour ne pas dire une urgence certaine - les pays membres du G8 en ont décidé ainsi. Les changements climatiques ne sont pas dans les priorités des gouvernements. Point final.

Avec une économie mondiale chancelante et une menace de récession à nos portes, il serait surprenant que les grandes économies de ce monde investissent dans l'avenir.

Certains diront pourtant que les pays du G8 (Japon, États-Unis, Canada, Grande-Bretagne, Allemagne, France, Italie et Russie) se sont entendus sur une réduction de 50% des gaz à effet de serre (GES) d'ici 2050, que les États-Unis ont enfin accepté ce principe et que la position unanime des huit pays de ce groupe sélect prouve hors de tout doute que tous, sans exception, reconnaissent dorénavant la thèse scientifique des changements climatiques.

C'est trop peu et ce sera trop tard. Surtout qu'il n'existe aucune année de référence sur cette réduction de 50%. Une réduction de 50% sur quoi? Sur nos émissions actuelles? Sur celles de 2005, comme le premier ministre du Japon l'a évoqué? Et qu'en est-il de l'année de référence de 1990, qui est à la base de toutes les ententes internationales depuis le protocole de Kyoto?

La décision des membres du G8 n'est pas un petit pas en avant, comme certains le prétendent. C'est un net recul pour l'humanité! Le premier ministre Harper était fier de son coup. Avec la complicité des États-Unis et du Japon, un trio qui avait déjà joué les trouble-fêtes à la dernière réunion sur le climat à Bali, le Canada a réussi à faire adopter une entente floue, sans plafond précis et conditionnelle à l'adhésion des pays émergents. Une adhésion déjà refusée de la part de ces pays, le G5 (Chine, Brésil, Inde, Afrique du Sud et Mexique). de cibles à atteindre ni de délai. On parle simplement d'«une vision commune» sur la réduction à long terme des GES, sans plus. Encore une fois, on cherche à gagner du temps.

Cette entente était rendue nécessaire devant la pression de l'opinion publique qui, selon un récent sondage, manifeste de plus en plus d'inquiétude face à la crise climatique mondiale. Ce sondage, effectué dans 22 pays, révèle que 72% de la population est inquiète face aux changements climatiques. Les gouvernements n'avaient pas le choix. Ils devaient montrer qu'ils n'étaient pas insensibles aux inquiétudes de leurs populations.

Ils auraient pu choisir d'agir. Ils ont préféré faire fonctionner les bonnes vieilles machines à manipuler l'opinion publique, donnant l'impression que le monde était sur la bonne voie, que des progrès importants avaient été accomplis lors de ce sommet du G8. Il n'en est rien. Même les pays qui avaient déjà des engagements plus restrictifs - comme les pays membres de l'Union européenne - se sont tus. Tout le monde a joué le jeu, pour faire bonne impression, puis on a reporté le problème à plus tard.

Pendant que nos gouvernants se réunissaient au Japon, ici, au Québec, on apprenait que les côtes du golfe et de l'estuaire du Saint-Laurent sont touchées par les changements climatiques; que le niveau de la mer est en hausse et que la région de l'Est du Québec sera particulièrement touchée par les risques de submersion; que le phénomène d'érosion du littoral marin s'accentuera; qu'il y aura une diminution du couvert de glace en hiver, ce qui augmentera la fréquence des vagues qui contribuent à l'érosion des berges, et qu'il y aura davantage de pluies et de redoux hivernaux.

Toujours pendant ce temps, on apprenait aussi que la hausse des températures et les changements climatiques allaient bouleverser l'industrie de la pêche dans le monde, parce que les poissons sont sensibles aux moindres variations de température. Le poisson constitue plus de 20% de l'apport protéinique animal pour près de la moitié de la population mondiale. L'industrie de la pêche emploie également 42 millions de personnes et «l'ensemble de la filière procure des moyens d'existence à plusieurs centaines de millions d'êtres humains», selon les Nations unies.

On apprenait encore que la crise alimentaire se poursuit et que la hausse récente des prix des denrées alimentaires avait poussé 100 millions de personnes sous le seuil de pauvreté.

On apprenait enfin que les récifs coralliens, en raison du réchauffement climatique, sont de moins en moins nombreux dans le monde, et que seulement 25% des récifs coralliens de la zone des Caraïbes sont encore en bon état.

Toujours durant cette même semaine, on s'inquiétait devant le taux de disparition des espèces, qui atteint des records dans les îles et les communautés d'outre-mer. Mais, s'il faut se fier à nos dirigeants du G8, rien ne presse.

Bon, plutôt négatif, tout ça. Surtout un dimanche. Surtout durant vos vacances. Vous avez bien raison, j'aurais peut-être dû me concentrer sur les bonnes nouvelles, sur les résultats encourageants, sur les décisions qui font vraiment avancer la cause humaine, comme celle de cette semaine, importante, primordiale, celle que vous attendiez tous : la margarine pourra enfin être jaune! Quelle grande victoire pour l'humanité...

La question de la semaine

Q: L'impact d'un réchauffement global ne touchera pas toutes les régions de la planète de façon égale. Est-ce que les espèces situées autour de l'Équateur seront moins touchées?

- Jean, Montréal

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R: Le déclin rapide de la banquise de l'Arctique, ou encore de celle ceinturant certaines régions de la péninsule antarctique, constitue une menace réelle pour plusieurs espèces des mondes polaires, qui dépendent de la glace pour leur survie. C'est le cas, notamment, de l'ours polaire, véritable symbole de l'Arctique, qui est devenu, au fil des ans, une icône de cette lutte contre les changements climatiques. Mais d'autres espèces moins populaires, comme certains insectes des Tropiques, risquent de faire face à de sérieux problèmes d'adaptation, même si les augmentations de températures sont moins importantes à l'Équateur que dans les hautes latitudes. Selon une étude de l'Université de Washington, plusieurs de ces espèces ne possèdent pas de mécanismes d'adaptation adéquats pour faire face à une augmentation rapide des températures, même de un ou deux degrés. Selon ces scientifiques, plusieurs espèces tropicales peuvent tolérer seulement une toute petite variation, car elles ont toujours évolué dans un environnement au climat stable qui, souvent, représente déjà la limite thermale de leur métabolisme. On peut toujours se dire que ce sont juste de petits insectes des Tropiques... C'est bien mal connaître le fonctionnement des écosystèmes. La biodiversité de la planète est concentrée principalement dans les climats tropicaux, où l'on trouve une variété impressionnante d'espèces. Tout ce qui touche les insectes touche nécessairement l'ensemble de l'écosystème. Les insectes sont essentiels à la vie et leurs rôles varient : certains servent de nourriture à d'autres espèces, d'autres sont indispensables pour la pollinisation des plantes, d'autres encore se chargent de la décomposition essentielle des matières organiques.

Le truc de la semaine

En été, on mange frais. L'abondance de légumes et de fruits dans nos marchés locaux nourrit notre imagination, et les repas comportent souvent beaucoup de produits frais. De ce fait, nous utilisons généralement moins nos congélateurs. Il existe une façon simple de réduire la consommation d'énergie de votre congélateur. Remplissez-le! Et pas nécessairement avec des victuailles. Optez plutôt pour des bouteilles d'eau. Un congélateur bien rempli conserve sa température froide plus longtemps, ce qui réduit le fonctionnement du moteur. Une idée toute simple, facile à réaliser et qui vous permettra de faire des économies. Pour d'autres petits trucs écologiques et économiques, je vous suggère le livre L'écolo écono. Des solutions pour protéger la planète et votre portefeuille, de Cécile Gladel, aux éditions Les Intouchables.

L'auteur est biologiste, photographe et cinéaste. Il a été chef de trois missions à bord du voilier Sedna IV, dont la plus récente en Antarctique. Il signe tous les dimanches une chronique dans nos pages.