Aujourd'hui candidat péquiste, le patron de presse Pierre Karl Péladeau avait ses entrées auprès de Jean Charest, à l'époque où ce dernier était premier ministre, révèlent des extraits récents de l'agenda de l'ancien politicien obtenus par La Presse.

Hier, de passage à une station de radio de Québec, M. Péladeau s'est insurgé contre la proximité de M. Charest avec la famille Desmarais. Or, des extraits de l'agenda de M. Charest à l'époque où il était chef de l'opposition, avant 2003, ont été envoyés à l'UPAC, récemment. La Presse en avait fait état au printemps 2013. Ils indiquent que M. Charest était en contact régulier avec Marc Bibeau, le responsable du financement au PLQ, aussi administrateur de Power Corporation, propriétaire de Gesca, dont fait partie le quotidien LaPresse. On y apprend aussi que le chef libéral planifiait plusieurs rencontres avec la famille Desmarais entre 1999 et 2001.

En entrevue, M. Péladeau s'est indigné de cette proximité entre le monde politique et les gens d'affaires. «Moi, je ne suis jamais allé à Sagard comme Jean Charest l'a fait», a-t-il lancé. Les journaux de Québecor ont à maintes reprises fait des reportages sur le domaine de la famille Desmarais dans Charlevoix.

«C'est ça aussi, l'héritage de Jean Charest, cette proximité avec le monde des affaires, ce détournement de la démocratie où elle ne se fait plus à l'Assemblée nationale, mais dans des salons feutrés. C'est l'illustration flagrante de ce que l'ère libérale nous a donné», a lancé le magnat de la presse, candidat péquiste dans Saint-Jérôme.

Mais LaPresse a obtenu des extraits bien plus récents de l'agenda de M. Charest qui montrent que le patron de Québecor avait des rapports réguliers avec l'ex-premier ministre. En octobre 2011, par exemple, M. Charest participait à un souper restreint, chez Denise Filiatrault, au Tropique Nord, avenue Pierre-Dupuy. S'y trouvaient Pierre Karl Péladeau et sa conjointe Julie Snyder, de même que Gilbert Rozon et sa conjointe Danielle Roy.

Conversation et rencontre

Le 1er juin 2011, l'agenda indique que M. Charest s'est entretenu au téléphone avec M. Péladeau. Le sujet de la conversation ne figure pas à l'agenda, mais à l'époque, l'injection de 200 millions de fonds publics dans l'amphithéâtre multifonctionnel de Québec faisait les manchettes. Québecor est un acteur important dans ce projet. Trois jours plus tôt, M. Charest avait invité des patrons de Québecor à son cabinet de Montréal. Lors d'une «rencontre privée», on retrouvait, outre M. Charest et son chef de cabinet de l'époque, Luc Bastien, M. Péladeau et Martin Tremblay, décrit comme «conseiller principal aux projets spéciaux». En fait, M. Tremblay est le principal responsable du dossier de l'amphithéâtre.

Mais ce dossier n'est pas le seul qui a conduit PKP au bureau du premier ministre libéral. Une autre série de pages de l'agenda, remontant à 2005 et 2003, illustre aussi leur proximité. Le 26 avril 2005, M. Charest recevra M. Péladeau à son bureau pour une oeuvre caritative présidée par le magnat de la presse. M. Péladeau est alors accompagné de Pierre Lampron, vice-président aux relations institutionnelles de Québecor. M. Lampron est le père de Julien Lampron, qui était producteur chez TVA, propriété de Québecor, avant de devenir directeur des communications au cabinet de Pauline Marois.

Enfin, l'agenda de Jean Charest indiquait en date du 20 septembre 2003 que le premier ministre assistait à «une réception chez Julie Snyder et Pierre Karl Péladeau», à Eastman, avec, en regard, le numéro de téléphone du couple et celui de leurs cellulaires personnels.