Bien des éléments peuvent influer sur le déroulement d'une campagne électorale. Les promesses, les programmes des partis, les tournées des chefs... La plupart sont planifiés, réglés, mis en marché avec minutie. Mais il est aussi des impondérables avec lesquels les partis doivent vivre, et qui peuvent peser lourd dans la balance: les gaffes. Voici une sélection des plus croustillantes.

9 septembre

Trois fientes de trop

En ce début de campagne, l'offensive internet des conservateurs va loin, trop loin. Le parti de Stephen Harper doit modifier une publicité sur son site notaleader.ca, où l'on voit un macareux déféquer à trois reprises sur l'épaule du chef libéral, Stéphane Dion. Les fientes virtuelles sont retirées du site rapidement... mais pas assez pour passer inaperçues. Cette gaffe éclipse la promesse du jour des conservateurs et oblige Stephen Harper à présenter des excuses publiques à son rival libéral.

 

9 septembre

Un dossier criminel gênant

Difficile de faire rimer casier judiciaire avec politique. La candidate conservatrice Rosamond Luke, qui se présente dans la circonscription de Halifax, démissionne après que son casier eut été mis au jour. Mme Luke avait été condamnée en juillet 2006 à 18 mois de probation pour avoir proféré des menaces, puis à neuf mois de probation additionnels et à une amende de 50$ pour ne pas avoir respecté les conditions de sa première peine.

10 septembre

Un pastiche de Facebook exagéré

Après l'incident du macareux, le site notaleader.ca met encore le Parti conservateur dans l'embarras. La page web propose un lien vers un pastiche d'un site Facebook. Dans une fausse page attribuée à Stéphane Dion, on insinue, entre autres choses, que le chef libéral fait partie du groupe fictif «Emmenons les talibans au Canada». Les conservateurs invoquent d'abord la surcharge des serveurs pour expliquer la disparition du lien, mais reconnaissent plus tard que le faux Facebook avait plutôt été supprimé parce qu'il n'était «pas drôle».

10 septembre

Le Bloc essuie des tirs amis

Le chef du Bloc, Gilles Duceppe, essuie les critiques virulentes de l'ancien ministre péquiste Jacques Brassard, qui remet en cause l'existence même du parti souverainiste à Ottawa. Dans une chronique publiée dans Le Quotidien, M. Brassard affirme que les troupes de Gilles Duceppe représentent mal les intérêts des Québécois qui vivent en région. M. Brassard qualifie le Bloc de «clone du NPD» parce qu'il a mis la souveraineté «plus ou moins en veilleuse». Ces tirs amis placent Gilles Duceppe sur la défensive.

10 septembre

Layton et Harper reculent devant Elizabeth May

Elizabeth May gagne son pari et obtient un laissez-passer pour participer aux débats des chefs, non sans égratigner au passage les conservateurs et les néo-démocrates. En début de semaine, les plus grands réseaux de télévision au Canada avaient décidé d'exclure Mme May des débats à cause de l'opposition de Jack Layton et de Stephen Harper. Ces derniers changeront leur fusil d'épaule sous la pression populaire. Stéphane Dion s'en tire avantageusement: il avait dénoncé la décision de ses adversaires politiques d'exclure la chef des verts.

11 septembre

Le stratège et l'Afghanistan

Quatrième bourde en trois jours pour le Parti conservateur. Cette fois, c'est le directeur des communications de Stephen Harper qui plonge son chef dans l'embarras. Ryan Sparrow insinue dans un courriel envoyé à une journaliste de CTV que le père d'un soldat tué en Afghanistan, qui critiquait la position des conservateurs, n'était peut-être pas de bonne foi puisqu'il avait déjà milité pour les libéraux. Ce père éploré avait déclaré à CTV que son fils sera «mort en vain» si le Canada retire ses troupes en 2011, comme les conservateurs l'ont décidé. Le jeune stratège conservateur est suspendu jusqu'à la fin de la campagne.

11 septembre

La crise d'Oka revient hanter les libéraux

Après les conservateurs, au tour des libéraux d'être rattrapés par le passé d'un candidat. L'ex-animateur de radio Simon Bédard, qui se présente dans la circonscription de Québec, doit démissionner pour des propos qu'il avait tenus en 1990 sur les ondes d'une radio de la Vieille Capitale. Il avait affirmé que l'armée aurait dû entrer de force à Kanesatake, quitte à tuer des Mohawks. Stéphane Dion protège d'abord son candidat, avant de lui montrer la porte.

12 septembre

Harper le «cochon»

Le ton agressif de la campagne pousse les candidats aux propos les plus incisifs. Dans une entrevue au Chronicle Herald de Halifax, Robert Thibault, le député libéral de West Nova, en Nouvelle-Écosse, compare Stephen Harper à un «cochon». Questionné sur la nouvelle allure «décontractée» du premier ministre, M. Thibault répond: «Je ne crois pas que quelques chandails feront une différence. Je pense que quelqu'un a dit que même si on met un chandail à un cochon, cela reste un cochon.» Le Parti libéral réagit par communiqué en disant que M. Harper n'avait à s'en prendre qu'à lui-même pour le ton de la campagne.

15 septembre

Tirs amis contre le Bloc (bis)

Le Bloc québécois n'est pas en manque de détracteurs. Après la virulente sortie de Jacques Brassard, voilà que cinq ex-députés bloquistes s'en prennent à leur ancienne formation. Dans nos pages, Odina Desrochers, Louise Thibault, Nic Leblanc, Ghislain Lebel et Richard Bélisle affirment à l'unisson que le Bloc a perdu sa raison d'être aux Communes. Gilles Duceppe minimise la portée de cette nouvelle sortie publique.

15 septembre

Notaleader.ca, prise trois

Après les fientes d'oiseau et le pastiche de Facebook, le site notaleader.ca est une fois de plus montré du doigt. Cette fois, le manque de goût cède la place au droit d'auteur. La chaîne ontarienne TVO porte plainte auprès du Parti conservateur, car ce dernier utilise sans permission et à des fins partisanes des segments de son émission phare The Agenda. Les visiteurs du site pouvaient bâtir leur propre publicité antilibérale en mettant bout à bout des clips vidéo de Stéphane Dion. Le Parti conservateur retire cette section de son site.

17 septembre

Humour noir sur fond de listériose

Quand on est ministre, il faut surveiller ce qu'on dit, même quand on s'adresse à des fonctionnaires. Le ministre de l'Agriculture, Gerry Ritz, l'apprend à ses dépens quand des propos qu'il a tenus trois semaines plus tôt refont surface. Lors d'une conférence téléphonique, Gerry Ritz déclare que la crise de la listériose pourrait devenir une «mort par tranches» pour le gouvernement conservateur. «Ou plutôt par tranches de viande froide», ajoute-t-il. D'un ton sarcastique, le ministre dit espérer que le critique libéral en matière d'agriculture succombe à la bactérie. Les libéraux exigent sa démission, mais Gerry Ritz se contente de présenter ses excuses.

18 septembre

Présomption d'alcoolisme

Pour la quatrième fois en 12 jours de campagne, le Parti conservateur est contraint de s'excuser. Cette fois, c'est la déclaration d'une collaboratrice du ministre des Transports, Lawrence Cannon, qui met les pieds dans le plat. Lors d'une manifestation de la communauté autochtone de Maniwaki, une employée du bureau de circonscription du ministre dit à l'un des manifestants qu'il pourra rencontrer son patron s'il promet de ne pas boire. Insulté, le jeune homme de 25 ans alerte la télévision locale. L'équipe de Lawrence Cannon se dissocie des propos et s'excuse.

26 septembre

Complot et libéraux

Le Parti libéral est contraint de remercier un deuxième candidat. Cette fois, c'est la Manitobaine Lesley Hughes qui est éjectée pour avoir défendu la théorie du complot à propos des attentats du 11 septembre. Mme Hughes aurait affirmé dans un blogue, lorsqu'elle était journaliste, que les événements du 11 septembre avaient été orchestrés par Washington et que tous les occupants juifs en avaient été informés à l'avance. Stéphane Dion renvoie sa candidate.

30 septembre

Le plagiat qui fait le tour du monde

Le Parti libéral sort une véritable bombe de son sac. En conférence de presse, le député libéral Bob Rae révèle que près de la moitié d'un discours prononcé par Stephen Harper en 2003 pour convaincre les députés d'envoyer des troupes en Irak est tiré d'une allocution prononcée deux jours plus tôt par le premier ministre australien de l'époque, John Howard. Un stratège conservateur admet le plagiat et démissionne. L'histoire fera le tour du monde.

7 octobre

Le beau côté de la crise

En entrevue à la CBC, Stephen Harper explique que la crise financière crée de belles occasions d'achat en Bourse pour les investisseurs. La réplique du néo-démocrate Jack Layton est cinglante: les Canadiens sont de plus en plus endettés, extrêmement inquiets, et M. Harper leur dit d'aller risquer leur argent à la Bourse. Les Canadiens cherchent un leader qui prend la situation au sérieux, dit-il.

8 octobre

Le chef contredit

Pour la deuxième fois en deux jours, le chef libéral est contredit par un de ses principaux collaborateurs sur le point central de sa plateforme électorale. En entrevue à La Presse, le chef adjoint du Parti libéral, Michael Ignatieff, affirme que son parti pourrait alléger sa taxe sur le carbone pour atténuer les impacts de la crise financière. Bob Rae, un autre gros canon libéral, aurait déclaré la veille que le Tournant vert pourrait être retardé en raison des conditions économiques, ce qu'il a démenti par la suite. Le lendemain, ces deux vedettes du Parti libéral font une déclaration publique pour assurer leur appui au Tournant vert.

9 octobre

L'entrevue qui tue

Une entrevue enregistrée à CTV à Halifax et diffusée sans le consentement de Stéphane Dion montre un chef libéral confus. Le journaliste lui demande quelles mesures il aurait prises à titre de premier ministre pour prévenir les contrecoups de la crise financière. «Je n'ai pas compris la question. Vous me demandez si j'étais premier ministre à quel moment? Aujourd'hui, depuis une semaine, deux semaines?» répond le chef libéral. Le quiproquo se poursuit jusqu'à ce que Stéphane Dion, contrarié, demande à reprendre l'enregistrement. Stephen Harper réagit en disant que son rival est incapable de gérer le pays dans les circonstances actuelles.