Le nouveau propriétaire de la compagnie ferroviaire responsable de la tragédie survenue à Lac-Mégantic envisage une reprise du transport de pétrole sur les rails d'ici environ un an et demi si les conditions sécuritaires le permettent, et ce, même si les négociations entre l'entreprise et la municipalité ont frappé un écueil en début de semaine.

John Giles, président et chef de la direction des Chemins de fer du Centre du Maine et du Québec Canada (CMQ), a confié vendredi à l'Associated Press qu'il espérait conclure une entente avec les autorités de Lac-Mégantic d'ici une dizaine de jours pour donner le feu vert à la circulation de matières non dangereuses.

Des travaux d'amélioration devront toutefois être réalisés sur le réseau ferroviaire avant que l'entreprise ne donne le feu vert au retour des convois pétroliers, ce qui pourrait se produire d'ici 18 mois, a signalé le dirigeant.

Quelques heures plus tard, par l'entremise de la firme de relations publiques montréalaise qui le représente, M. Giles a tenu à préciser que le retour des matières dangereuses ne se concrétiserait pas sans une «remise à niveau complète» du réseau de voies ferrées.

«Enfin, il n'est pas certain qu'il y ait à nouveau une demande pour ce type de transport sur le réseau de voies ferrées de CMQ. En effet, les clients qui avaient de tels besoins par le passé ont trouvé depuis d'autres façons de s'approvisionner ou encore de combler leurs besoins en transport de telles matières dangereuses», a-t-il soutenu dans cette même déclaration.

John Giles a refusé la demande d'entrevue de La Presse Canadienne, vendredi après-midi.

Négociations freinées

Les négociations entre CMQ et la municipalité estrienne ont été ralenties par un «malentendu» entourant les mesures de sécurité additionnelles au cours des derniers jours.

Lors de la séance du conseil municipal, lundi, une clause de l'ébauche du contrat a été modifiée à la dernière minute par l'entreprise, ce qui a poussé la mairesse Colette Roy Laroche à ajourner la séance pour finalement passer au point suivant à l'ordre du jour.

«Une demande de clarification demandée par la Ville de Lac-Mégantic, en fin d'après-midi lundi, a entraîné ensuite une modification de la part de CMQ. Les deux parties ont dû retourner à la table de négociation pour conclure un nouveau projet d'entente», a signifié la municipalité dans un communiqué publié le lendemain du conseil.

Le porte-parole de la mairesse Roy Laroche, Louis Longchamps, a affirmé que John Giles avait «toujours dit, depuis le début, qu'il n'avait pas aimé ce qu'il avait vu sur les rails entre Farnham et le Maine» et qu'il avait l'intention d'y remédier.

En entrevue avec l'Associated Press, M. Giles a spécifié que son entreprise avait l'intention d'investir 10 millions $ pour corriger la situation avant de donner le feu vert au retour des convois pétroliers.

Ce montant serait largement insuffisant à la construction d'un nouveau tracé qui contournerait la ville, comme le souhaite toujours la mairesse et bon nombre de Méganticois - les coûts d'une telle infrastructure avoisineraient plutôt des dizaines de millions de dollars.

Mais la mairesse et ses conseillers ne lâchent pas le morceau, a assuré M. Longchamps en réponse à une demande de clarification de La Presse Canadienne.

«La voie de contournement demeure une priorité pour le conseil municipal», a-t-il écrit, assurant que Mme Roy Laroche milite «très activement» tant auprès des gouvernements que de l'entreprise pour que la chose se concrétise.

La vente de la portion américaine de la Montreal, Maine and Atlantic Railway (MMA), qui est derrière le déraillement meurtrier de Lac-Mégantic, a été complétée jeudi, environ 10 mois après le désastre qui a coûté la vie à 47 personnes.

Le syndic de faillite Robert Keach et les parties impliquées ont conclu l'accord de 15,85 millions $ US (17,24 millions $ CAN) pour la vente de l'entreprise en faillite. Une procédure canadienne séparée doit être complétée d'ici quelques semaines.

Le déraillement survenu le 6 juillet était le pire accident ferroviaire à survenir au Canada en près de 150 ans. La catastrophe a attiré l'attention sur la nécessité de mieux sécuriser le transport de pétrole par train en Amérique du Nord.