Quelques minutes après la reprise du procès Shafia à Kingston, ce matin, Mohammad Shafia a éclaté en sanglots, et a pleuré à chaudes larmes dans le box des accusés, en voyant que l'enquêteur avait pris les mains de sa femme Tooba, pendant qu'il l'interrogeait après son arrestation, le 22 juillet 2009.

Le procès Shafia a repris ce matin après un arrêt de deux jours, dû au fait que  Mohammad Shafia a été hospitalisé la semaine dernière. L'homme de 58 ans était là ce matin,  et le procès a repris où il avait été interrompu, c'est-à-dire au milieu de la projection de la vidéo de l'Interrogatoire que l'enquêteur de la GRC Shahin Mehdizadeh a fait subir à Tooba, le 22 juillet.

Cet interrogatoire dure six heures, et l'enquêteur déploie de grands efforts pour faire parler la femme. On sait déjà qu'à un certain moment de l'interrogatoire, Tooba a avoué qu'elle, son mari, Mohammad, et leur fils Hamed, étaient sur les lieux quand la Nissan Sentra est tombée dans l'écluse, avec quatre femmes de leur famille à bord, la nuit du 30 juin 2009.

À mots couverts et avec de multiples détours, Tooba a affirmé avoir seulement entendu la voiture tomber dans l'eau. Elle a incriminé son mari Mohammad qui, selon elle, se trouvait près de la Nissan à ce moment, mais elle a tenté de disculper son fils. Hamed se trouvait plutôt avec elle, sur le bord de la route au moment de la chute de la voiture, a-t-elle dit. Après, elle ne se souvient de rien, car elle raconte s'être arraché les cheveux et  avoir perdu conscience.

Non satisfait de ces demi-aveux, l'enquêteur persiste à l'interroger, en utilisant toutes sortes de tactiques: il tente de l'émouvoir avec le souvenir de ses filles, s'adresse à son coeur de mère, pour devenir tantôt plus incisif. «Tu mens, tu mens, depuis des heures tu me mens...», dit-il.

À un certain moment, l'enquêteur implore la femme de lui dire la vérité. «Je t'en supplie. Je vais de baiser les mains», dit l'enquêteur. C'est là que Mohammad a éclaté en sanglots.

«Non, Dieu l'interdit, ne dis pas ça», répond Tooba.

«Donne-moi ta main, s'il te plaît. Donne-moi ta main. Donne-moi ta main», répète l'enquêteur, en prenant les mains de Tooba, qui se laisse faire.

«Donne-moi ta main. Pas de baiser, je ne vais pas baiser ta main, mais donne là moi. Je t'implore, dis-moi la vérité, parce que tes filles le méritent. Connais-tu le mot ''deserve'' en anglais.»

Rappelons que Mohammad Shafia, son épouse Tobba, et leur fils Hamed sont accusés des meurtres prémédités des soeurs Zainab, 19 ans, Sahar, 17 ans, et Geeti, 13 ans, de même que de Rona Amir Mohammad, première épouse de Mohammad. La Couronne allègue qu'elles ont été tuées pour une question «d'honneur.» Le drame est survenu alors que la famille de dix d'origine afghane, mais qui vivait à  Montréal depuis deux ans, revenait d'une semaine de vacances à Niagara, le 30 juin 2009.