Les hommages ont fusé dimanche à l’endroit de l’entrepreneur québécois Daniel Langlois, retrouvé mort avec sa conjointe dans une voiture calcinée en Dominique. Plusieurs anciens partenaires d’affaires ont souligné les accomplissements de ce « grand visionnaire » qui a révolutionné l’industrie du cinéma.

Dans une déclaration acheminée à La Presse dimanche, le Coulibri Ridge Resort, l’hôtel de luxe autosuffisant fondé par le couple en Dominique, a confirmé « avec une profonde tristesse et le cœur lourd » la mort tragique de Daniel Langlois et de Dominique Marchand.

L’administration de l’hôtel précise par ailleurs que leur mort ferait suite à un « incident dévastateur » survenu jeudi dernier, soit la veille de la découverte par la police de la voiture calcinée, selon ce qu’avait rapporté jusqu’ici le média local Dominica News Online.

Lisez « L’entrepreneur Daniel Langlois et sa conjointe retrouvés morts en Dominique »

« Daniel et Dominique ont été des pionniers à bien des égards, notamment en tant que fondateurs et exploitants du centre de villégiature Coulibri Ridge. Leur engagement en faveur de la durabilité a établi une norme dans l’industrie du tourisme et leur passion pour l’environnement et pour venir en aide aux autres a touché la vie de nombreuses personnes qui ont fait l’expérience de la magie de Coulibri Ridge », poursuit l’hôtel.

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Un pionnier des effets spéciaux

La mort de Daniel Langlois, pionnier de l’industrie des effets spéciaux dans le monde du cinéma, a fait réagir dimanche.

« Daniel était un grand visionnaire autant pour le cinéma que pour l’humanité. Il avait des rêves qu’il a réussi à poursuivre et concrétiser. C’était un être bon. De mourir ainsi avec sa conjointe, c’est horrible », a souligné le producteur Roger Frappier, ajoutant être « sous le choc ».

Né à Jonquière en 1957, Daniel Langlois est considéré comme l’un des pionniers des nouvelles technologies du cinéma au Québec.

Il a acquis une reconnaissance internationale en fondant Softimage, où il a développé, grâce à l’informatique, une méthode révolutionnaire pour créer des films d’animation, qui étaient jusque-là confectionnés par le montage de milliers de photos, raconte son ancien partenaire d’affaires Pierre Nelis.

« Plutôt que de prendre un dinosaure en papier mâché, de faire des milliers de photos dans différentes positions pour recréer un mouvement, bien il l’a fait par ordinateur […]. Ce faisant, il a révolutionné l’industrie des effets spéciaux. […] Tu faisais en quelques minutes ce qui prenait des semaines à faire. »

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L’entrepreneur et philanthrope québécois Daniel Langlois

C’est grâce à cette méthode, plus tard utilisée dans des superproductions hollywoodiennes comme Jurassic Park et Titanic, qu’il révolutionnera l’industrie de l’animation 3D. Softimage sera finalement achetée par Microsoft, « la plus grande acquisition historique » de ce géant de l’informatique à l’époque, rappelle Pierre Nelis.

« Grand-père du métavers »

Son empreinte sur l’industrie du cinéma et même, plus largement, des technologies sera ressentie encore longtemps, croient plusieurs.

Marc Petit, un ancien dirigeant de Softimage, raconte avoir contacté récemment Daniel Langlois pour lui apprendre qu’il l’avait désigné comme « grand-père du métavers », une nouvelle technologie de mondes virtuels, dans le cadre d’une entrevue qu’il avait accordée récemment.

« Le métavers, c’est internet qui embrasse la technologie 3D, et Daniel a tellement contribué aux débuts de la technologie 3D que je voulais lui faire ce petit clin d’œil et il m’avait répondu : ‟on se reverra à mon prochain passage à Montréal” », rappelle-t-il.

C’est pas seulement un entrepreneur québécois, c’est quelqu’un qui a vraiment fait une différence extraordinaire dans une industrie qu’on ne connaît pas beaucoup, mais qui est en train d’exploser.

Marc Petit, ancien dirigeant de Softimage

Mais Daniel Langlois « était en business par défaut, rappelle Pierre Nelis. C’était un créatif visionnaire. […] C’était un artiste dans l’âme », se souvient-il.

C’est d’ailleurs grâce à cette passion pour les arts qu’il fondera, en 1999, le complexe Ex-Centris, un lieu de diffusion rendu possible « par un millionnaire intéressé et intéressant », lance à la blague Claude Chamberlan, qui y a exploité le cinéma Parallèle et le Festival du nouveau cinéma.

« On habitait la même rue, je voulais l’avoir comme mécène, on avait parlé de tout ça et un jour, il m’a appelé. Je commençais à avoir beaucoup de dettes, et il m’a dit : ‟Inquiète-toi pas, ton rêve, on le fait.” Des bonnes salles, avec un son magnifique », raconte-t-il, au sujet du début de cette « lune de miel » qu’il a vécue avec Daniel Langlois.

Avec Alice Girard-Bossé, La Presse