Oubliant leur petite valise qui a roulé plus loin, les trois petites filles de 10, 7 et 4 ans foncent vers leur tante montréalaise venue les accueillir à l’aéroport Trudeau. Ce shabbat n’allait ressembler à aucun autre.

« Malgré tout ce qui arrive, là, maintenant, c’est un moment de joie », lance Michelle Koren, qui habite au Québec depuis cinq ans.

Son frère, sa belle-sœur et leurs trois enfants ne seront en visite chez elle que pour deux semaines. Ils sont israéliens, arrivés ici d’Athènes, vendredi.

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Michelle Koren avec sa nièce et son frère

« Je suis musicien. Il n’y aura pas de travail pour moi pour un bout de temps, tous les spectacles sont annulés », explique Adam Tal, tandis que sa femme, Hadastal, était trop bouleversée pour dire un seul mot.

M. Tal dit qu’il a deux semaines ici pour tenter de se vider la tête, mais il doute d’y arriver.

« J’avais un très bon ami qui a été assassiné au festival de musique. Je n’avais jamais perdu un ami. »

Il ignore s’il se sentira mieux ici au cours des prochains jours. « Je m’inquiète pour ma famille, mes amis restés là-bas. »

Anat Basanta, citoyenne canadienne, est rentrée par le même vol d’Athènes, qu’elle a trouvé sans l’aide du gouvernement canadien.

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Anat Basanta, citoyenne canadienne qui se trouvait près de Tel-Aviv

« J’étais partie en Israël le 3 octobre pour rendre visite à ma sœur, près de Tel-Aviv. »

Elle raconte qu’il lui a fallu beaucoup de temps, à elle et à sa sœur, pour comprendre l’ampleur de ce qui venait d’arriver. « Les Israéliens sont habitués aux tensions […], aux sirènes, à se réfugier dans les abris qu’ils ont, dans les maisons… »

C’est au fil des heures, par la télévision, qu’elles ont compris que cette fois-ci, c’était plus grave que jamais et qu’elles ont vu les premières images des massacres dans les kibboutz.

« Ma famille, ici, me disait de vite rentrer », relate-t-elle.

Les bras chargés de fleurs, d’une poupée et d’une peluche, Raquel, elle, est venue cueillir à l’aéroport la famille de sa cousine Michelle, une résidente canadienne qui était partie assister à un mariage en Israël. Il devait avoir lieu deux jours après les massacres.

Elle aussi est rentrée par Athènes, avec sa fille de 3 ans et son mari, sans l’aide du gouvernement canadien.

« Je me sens en état de choc. On entendait tellement de bombes. J’ai presque peur de mon ombre, maintenant. »

Avec ou sans l’aide d’Ottawa

Sans nouvelles du gouvernement canadien depuis mardi, Anouk Desrosiers-Roussel a décidé de prendre les choses en main. Avec son mari israélien et son petit garçon de 2 ans, elle s’envolera samedi vers Dubaï, pour ensuite prendre un vol à destination de Montréal.

« Si on n’a pas d’informations, on est juste assis ici à ne pas savoir quoi faire, et moi, je trouve ça inacceptable. Dans le fond, on s’occupe de nos propres affaires, parce qu’on ne peut pas compter sur le gouvernement du Canada. C’est ça que l’on comprend », affirme-t-elle en entrevue depuis Tel-Aviv.

Une autre Canadienne qui habite la capitale, dont le mari et le plus jeune fils détiennent seulement la citoyenneté israélienne, avait pour sa part été informée vendredi matin par Affaires mondiales qu’elle devait laisser mari et fils derrière – un refus qui n’avait pas lieu d’être, ont confirmé des responsables du gouvernement. La situation aurait été corrigée.

En collaboration avec le gouvernement du Canada, Air Canada exploite deux vols spéciaux cette fin de semaine au départ d’Athènes afin de ramener au pays des Canadiens et les résidents permanents qui se trouvent en Israël. Dans le cadre de cet accord, le gouvernement du Canada assure des vols militaires au départ de Tel-Aviv pour transporter ces personnes jusqu’à Athènes. Elles pourront ensuite embarquer à bord des vols spéciaux d’Air Canada, à destination de Toronto, d’où arriveront donc la majorité de ceux qui ont demandé l’aide d’Ottawa. Le premier de ces vols à destination de Toronto s’est posé vendredi soir, peu avant 19 h 30.