Dans le quartier Rosemont, la dévastation était visible dès le petit matin. Le parc Molson était jonché de branches et nombreux étaient ceux qui se baladaient téléphone en main pour photographier cette scène printanière inhabituelle.

La rue Louis-Hébert, au sud de la rue Beaubien, était fermée à toute circulation en raison de tous les arbres tombés. Privé d’électricité depuis plusieurs heures, Serge Tardif avait commencé la journée en faisant son café sur un réchaud à fondue.

« On n’a pas de nouvelles. J’ai sorti des petites radios, on n’est pas habitués à des choses de même. La dernière fois, c’était en 1998 », a-t-il relaté, en faisant allusion à la crise du verglas.

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Le parc Molson, à Montréal, était jonché de branches après la tempête.

Avec ses 35 mm de pluie verglaçante tombés à Montréal, la tempête de mercredi restera en effet dans les annales comme l’une des plus importantes depuis le verglas massif de janvier 1998 et ses 100 mm de pluie verglaçante tombés sur six jours.

Des notes de déception

C’est La Presse qui a appris à Serge Tardif qu’il faudrait peut-être quelques jours pour rétablir l’électricité. Le mercure avait beau être au-dessus de zéro, sa maison commençait à se refroidir.

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Serge Tardif

« Je vais aller à l’hôtel, je ne me casserai pas le bicycle avec ça », a-t-il dit. Il s’inquiétait néanmoins pour ses deux frigos et son congélateur bien remplis. « J’espère que les assurances vont rembourser », a-t-il dit.

Dans bien des quartiers, les interjections fusaient chez les promeneurs. « Tabarouette ! », s’est exclamée une passante. « Ah, cibole ! », a lancé Richard Pagé en apercevant une énorme branche tombée sur une voiture dans le quartier Ahuntsic, à Montréal.

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Richard Pagé et sa petite-fille marchant parmi les branches tombées en pleine rue, à Montréal

Et c’était loin d’être la seule. En tout, la Ville de Montréal a rapporté que plus de 350 arbres et 1600 branches étaient tombés à la suite de la tempête, soit encore plus que le bilan déjà lourd fait la veille.

L’ouest de l’île durement touché

Au plus fort des pannes, pratiquement tout l’ouest de l’île de Montréal – à l’ouest de l’autoroute 13 – était plongé dans le noir. Les rues résidentielles étaient encore jonchées de débris jeudi en matinée.

Rue Roosevelt, à Pierrefonds, Anna Lucia aidait les employés municipaux à enlever des dizaines de branches du grand arbre qui s’était dégarni pendant la nuit. « J’avais déjà dit à la Ville que des branches de l’arbre tombaient quand il ventait. Deux fois, je leur ai demandé de pouvoir le couper. Mais ils ont refusé. »

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Sous le poids de la glace, des branches se sont affaissées sur la chaussée, à Pierrefonds.

Près de la rivière des Prairies, sur le boulevard Gouin, André Laniel était venu constater les dégâts autour de l’église Sainte-Geneviève. « Une grosse branche est tombée sur mon véhicule, mais j’aime mieux ne pas y toucher… Je ne voudrais pas que ça devienne la branche du veuvage ! », a-t-il lancé en souriant à son épouse.

Par ici, les érables sont tous attaqués. On voit des morceaux costauds qui sont tombés et qui étaient pourris à l’intérieur.

André Laniel, résidant de Sainte-Geneviève

Du côté de L’Île-Bizard, plusieurs équipes s’affairaient à dégager les rues des arbres tombés. « La grosse préoccupation ici, c’est l’essence », a dit Conrad Boucher, en faisant une pause de balayage, sur le chemin du Bord-du-Lac. « On a tous des génératrices pour faire fonctionner les pompes pour les puisards. [Mercredi], mon voisin a dû aller jusqu’à Lachine pour trouver une station-service qui avait de l’électricité. »

Peu après midi jeudi, la glace avait presque complètement fondu dans les rues de Pointe-Claire, près du fleuve. Bill Ecclestone n’avait pas chômé : la veille, un câble d’Hydro-Québec était tombé dans la rue Clément, emportant les équipements de branchement fixés à sa maison.

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Une résidante de L’Île-Bizard ne s’est pas fait prier pour ramasser des branches bloquant une rue.

À la mi-journée, un électricien était déjà passé réparer les dommages à ses installations. Ne restait plus qu’à attendre les techniciens de la société d’État. « J’ai essayé de les appeler, mais je pourrais tout aussi bien tenter d’obtenir une audience avec le pape ! »

Une première victime

Hydro-Québec et la Ville de Montréal estiment qu’il faudra encore plusieurs jours avant que la situation ne revienne à la normale.

Jeudi après-midi, du moins, c’était encore loin d’être le cas. En raison du verglas qui se détachait de leurs structures, trois des ponts pour se rendre sur la Rive-Sud, soit les ponts Samuel-De Champlain, Jacques-Cartier et Victoria, ont été fermés partiellement de façon temporaire, ce qui a compliqué l’heure de pointe.

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Rue bloquée par des branches à Montréal

Une première victime serait à déplorer en lien avec l’épisode de pluie verglaçante de mercredi, un sexagénaire mort écrasé sous le poids d’une branche d’arbre dans la municipalité des Coteaux, en Montérégie.

Selon les premières informations disponibles, l’homme s’affairait à couper des branches à l’arrière de sa résidence lorsqu’il aurait été écrasé par le poids de l’une d’elles peu avant 10 h 30. Arrivés sur place, les premiers répondants ont entrepris des manœuvres de réanimation, mais son décès a rapidement été constaté.

Intoxications au monoxyde de carbone

Outre ce triste incident, Urgences-santé a rapporté plusieurs cas d’intoxication dus à l’utilisation d’appareils au propane à l’intérieur, un réflexe à éviter à tout prix, a insisté le porte-parole de l’organisation, Stéphane Smith.

Les ambulanciers de Montréal et de Laval ont effectivement dû effectuer une dizaine d’interventions pour des intoxications au monoxyde de carbone dans la foulée de la tempête de pluie verglaçante, a indiqué jeudi Urgences-santé.

« On a enregistré six cas dans la région de Montréal et quatre cas dans la région de Laval au cours des 24 dernières heures », a indiqué Jean-Pierre Rouleau, porte-parole d’Urgences-santé, en début de soirée.

Urgences-santé ne pouvait pas indiquer hier si les 10 cas étaient tous liés à des pannes d’électricité. Personne n’a perdu la vie dans ces évènements.

Avec la collaboration de Philippe Teisceira-Lessard, La Presse

Quantité de pluie verglaçante reçue par régions

  • Montréal : de 30 à 35 mm
  • Montérégie : de 15 à 25 mm
  • Lachute : 10 mm
  • Outaouais : de 25 à 30 mm
  • Richelieu : 15 mm
  • Mauricie : de 5 à 10 mm
  • Centre-du-Québec : de 10 à 15 mm
  • Québec : de 2 à 4 mm

Source : Environnement Canada