L'explosion du nombre de dispensaires de cannabis ayant pignon sur rue au pays amène certains intervenants à demander au gouvernement de règlementer ceux-ci, ce qui n'est pas prévu par la loi actuellement.

L'Association canadienne des dispensaires de cannabis médical estime qu'il y a au moins 350 de ces endroits au Canada. Des dizaines d'emplacements ont ouvert leurs portes à Toronto seulement dans les derniers mois.

Certaines personnes jugent que ces dispensaires sont techniquement illégaux et qu'ils devraient être fermés immédiatement. Mais d'autres croient plutôt qu'il faudrait présenter une réglementation pour standardiser la qualité du produit et les critères pour les clients qui veulent s'en procurer.

Selon ces derniers, les dispensaires comblent les besoins des nombreux Canadiens qui ne sont pas couverts par les lois permettant de consommer du cannabis médicinal qui peut seulement être envoyé par la poste ou être cultivé à la maison.

Ils espèrent la politique des libéraux sur la légalisation de la marijuana, qui sera présentée l'année prochaine, règlementera par le fait même ce commerce en croissance.

La présidente sortante de l'association, Jamie Shaw, a affirmé que la récente multiplication des dispensaires avait pris par surprise plusieurs municipalités, bien que les lois leur permettant de se propager soient en place depuis longtemps.

Besoin durable

Mme Shaw explique la popularité de ces lieux par un besoin durable pour le cannabis médicinal et par les lois actuelles au Canada qui seraient trop restrictives.

«Si vous fermez un dispensaire, quelqu'un d'autre va en ouvrir un parce qu'il y a un besoin qui n'est pas comblé. Une fois que ceux-ci commencent à ouvrir, cela devient une avalanche. On ne peut plus arriver à suivre en ce qui a trait à l'application de la loi», a-t-elle soutenu en entrevue téléphonique.

La loi actuelle, appelée communément «Règlement sur la marihuana à des fins médicales», permet à quelques dizaines de distributeurs - ayant obtenu un permis du gouvernement - de vendre du cannabis à des patients admissibles, mais la substance doit être envoyée par la poste.

Le système est en vigueur depuis 2014 et a remplacé le «Règlement sur l'accès à la marihuana à des fins médicales», qui permettait à quelque 30 000 patients de faire pousser leur propre cannabis à la maison. Le gouvernement fédéral avait tenté d'abroger cette loi, mais une injonction de la cour permet à ces patients de poursuivre leurs activités.

Eric Nash, consultant auprès du secteur du cannabis, a précisé que les deux systèmes combinés satisfaisaient les besoins d'environ 80 000 Canadiens - ce qui est bien en deçà du nombre de Canadiens qui consomment cette substance pour des fins médicales.

Selon la dernière Enquête de surveillance canadienne de la consommation d'alcool et de drogues publiée par Santé Canada, ce nombre s'élevait à 420 000 en 2011. Santé Canada n'a pas répondu à une demande de La Presse Canadienne pour recevoir des données plus récentes.

M. Nash a souligné que plusieurs patients n'étaient pas à l'aise à recevoir leur produit par la poste, étant mal à l'aise à l'idée de remettre des données médicales confidentielles à une entreprise.

«C'est une approche de type "Amazon.com". Vous allez sur le web, vous commandez votre produit et c'est livré à votre porte. Ça ne fonctionne pas pour tout le monde», a-t-il tranché.

Aucune règle

Cependant, les points de vente actuels ne sont soumis à aucune règle, a remarqué M. Nash. Chaque dispensaire décide comment il gérera les dossiers de ses clients, où il se procure le produit et quels critères doivent présenter les patients pour pouvoir acheter le cannabis.

Des villes, comme Vancouver et Victoria, ont déjà présenté des règlements, mais juridiquement, cette responsabilité incombe au gouvernement fédéral.

Un conseiller municipal de Toronto, Joe Cressy, a d'ailleurs indiqué que, à l'heure actuelle, la loi fédérale sur le cannabis était toujours en place. «C'est la loi fédérale aujourd'hui et elle peut être appliquée», a-t-il écrit dans un courriel.