Les ingénieurs ont refusé jeudi soir de soutenir financièrement les firmes de génie-conseil fautives qui souhaitent entreprendre, en partenariat avec leur ordre professionnel, une démarche pour se refaire une virginité éthique, a appris La Presse.

Réunis en assemblée générale, à Lévis, les membres de l'Ordre des ingénieurs ont voté majoritairement contre la hausse de cotisation proposée. Après un débat «respectueux mais ferme», 214 ingénieurs ont voté contre la proposition du conseil d'administration de l'Ordre, 94 ont voté pour et 3 abstentions ont été enregistrées.

Les courtes interventions de deux minutes des participants ont laissé voir la grogne que l'idée même d'une hausse de 32 % de la cotisation annuelle a provoquée dans les rangs. L'Ordre des ingénieurs demandait à ses membres de lui verser 100 $ de plus par année afin de stopper la crise dans l'industrie et redonner confiance au public.

Pour ce faire, les quelque 6 millions supplémentaires ainsi amassés devaient permettre la mise en place d'un programme d'audit volontaire auprès des firmes de génie-conseil. Lancé il y a deux semaines, ce programme doit se mettre en place à l'automne et permettre aux firmes de génie de se plier aux mêmes normes déontologiques que les individus qui exercent la profession et qui sont les seuls à être assujettis à la surveillance de l'Ordre. Selon l'Ordre des ingénieurs, «à terme, le programme doit s'autofinancer».

Comme le révélait jeudi La Presse, le gouvernement du Québec réfléchit à la possibilité que ce processus, garantissant la probité des firmes de génie, devienne obligatoire afin qu'elles puissent avoir le droit de soumissionner des contrats publics.

Mais cette homologation éthique serait financée à même la cotisation annuelle des ingénieurs. Certains à qui La Presse a parlé y voyaient une forme «d'amende» imposée à l'ensemble des professionnels pour redorer le blason des Dessau, SNC-Lavalin, BPR et Cima".

L'image de ces grandes firmes a été malmenée à travers leurs gestes de collusion, de corruption et de financement occulte des partis politiques. La démonstration des stratagèmes a occupé beaucoup de place dans les travaux de la commission Charbonneau jusqu'à maintenant.

À la suite de témoignages incriminants, plusieurs des dirigeants ont d'ailleurs tiré leur révérence au cours des dernières semaines. Mercredi, le président de Dessau, Jean-Pierre Sauriol, a remis sa démission en constatant que l'Autorité des marchés financiers refusait d'accorder un certificat de bonne conduite nécessaire en vertu de la Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics (loi 1).

Des ingénieurs ont souligné, par ailleurs, qu'en Ontario, la cotisation s'élève à 220 $. Les ingénieurs québécois versent à l'heure actuelle 310 $ en plus d'une taxe spéciale (26,20 $) afin de financer la campagne de publicité de l'Ordre. Depuis 2005, la cotisation est passée de 180 $ à 310$ par année.