Ford, seul constructeur américain à avoir traversé la crise financière sans injection de fonds fédéraux, a enregistré ses meilleurs résultats depuis quatre ans, s'installant largement dans le vert grâce à la prime à la casse américaine et à des efforts de réduction de coûts.

En outre, le constructeur automobile a annoncé hier une série d'opérations financières destinées à renforcer ses liquidités: une augmentation de capital pouvant atteindre jusqu'à 1 milliard US, une émission obligataire d'au moins 2 milliards US et une opération de renégociation de sa dette existante.

Ford a publié un bénéfice net de 997 millions US pour la période juillet-septembre, mais surtout son premier bénéfice d'exploitation depuis un an et demi, à hauteur de 1,107 milliard US. Mieux encore, le résultat d'exploitation est positif aux États-Unis pour la première fois depuis 2005.

Trois ans après l'arrivée aux commandes d'Alan Mulally, directeur général embauché chez Boeing pour enrayer un effondrement que l'héritier Bill Ford n'avait pas su arrêter, le constructeur de Dearborn, en banlieue de Detroit, tire les dividendes d'une restructuration qui a réduit les coûts, amélioré la compétitivité et rationalisé la production.

Le constructeur a supprimé 4,6 milliards US de coûts pour les neuf premiers mois de l'année, au-delà de ses objectifs (4 milliards US), et tout près de l'objectif annuel (5 milliards US).

Le constructeur a aussi tiré le plus grand bénéfice du redémarrage du marché américain, enclenché par la prime à la casse instituée durant l'été par l'administration Obama.

Grâce à cette incitation à l'achat, Ford a enregistré entre juillet et septembre sa première progression des ventes sur un trimestre depuis quatre ans aux États-Unis.

Les analystes n'ont pas caché leur surprise, Douglas McIntyre, sur le site 247WallSt.com, allant jusqu'à saluer «un petit miracle».

L'action a bondi de 8,29%, à 7,58$US, dans la journée.

À la Deutsche Bank, l'analyste Rod Lache a noté que, au-delà des restructurations, Ford avait bénéficié durant le troisième trimestre de la baisse des coûts d'approvisionnement, la plus grande surprise venant cependant des prix de vente, que Ford a réussi à maintenir sans accorder trop de ristournes.

L'agence d'évaluation financière Moody's a par ailleurs relevé d'un cran, à B3, la note du constructeur. Cela laisse Ford au rang des valeurs spéculatives, mais souligne les progrès accomplis en matière de rentabilité.

Au total, les résultats sont très supérieurs aux attentes du marché, qui tablait sur une perte nette de 12 cents US par action, alors que le constructeur a enregistré un bénéfice de 26 cents US par action, hors éléments exceptionnels.

Le chiffre d'affaires s'est établi à 30,9 milliards US au troisième trimestre, un recul de 800 millions US par rapport à l'an dernier dû à une baisse de l'activité de la filiale financière Ford Credit, mais qui reste très au-delà des attentes des analystes (28,31 milliards US).

Ford dit s'attendre désormais à un retour à une «rentabilité solide», hors éléments exceptionnels, en 2011, selon ce communiqué.

Le constructeur reste prudent pour l'an prochain, où il s'attend à une baisse de volume des ventes «notable» en Europe, qui pourrait bien ne pas être compensée par le marché américain.

Ford pourrait également encaisser une déception avec le refus, prédit par plusieurs journaux, des membres du syndicat d'UAW d'aligner leurs conditions sur celles en vigueur chez les deux autres constructeurs américains, General Motors et Chrysler, contraints à d'importants sacrifices après leur redressement judiciaire et les aides fédérales.

M. Mulally a refusé hier de commenter ces informations, mais il s'est félicité de la décision des ouvriers du syndicat frère au Canada, le CAW, de valider la nouvelle convention collective. «Cela va faire en sorte que les activités de Ford au Canada soient concurrentielles», a-t-il dit.

«L'UAW a clairement indiqué qu'il ne voulait pas que nous soyons désavantagés», a-t-il ajouté, laissant entendre que les discussions allaient se poursuivre avec les syndicats.