Il n'y a pas de raison de paniquer. Ni de porter un masque. Mais à l'instar d'un smog montréalais de plusieurs jours en plein été, l'éruption explosive du volcan dans le sud de l'Islande rendra la vie pénible aux gens des pays voisins souffrant d'asthme et aux personnes souffrant d'une maladie pulmonaire chronique. Aux personnes âgées aussi.

Pneumologue à l'Institut thoracique de Montréal du CUSM, la Dre Jennifer Landry explique que les études d'impact sur la santé à la suite d'une exposition de quelques jours ou quelques semaines n'ont pas démontré de graves conséquences. Mais une étude auprès de la population vivant à proximité du volcan Kilauea de l'archipel d'Hawaii, le plus actif dans le monde, a déjà établi un lien de causalité avec une augmentation du nombre de cas d'enfants souffrant d'asthme, dit-elle.

 

«La cendre est comme une poussière en suspension dans la vapeur ou dans l'air, ajoute-t-elle. Elle contient du dioxyde et des particules de soufre. C'est donc un irritant pour les yeux, les voies respiratoires et tout le système pulmonaire, particulièrement pour les bronches.»

Difficile de prédire durant combien de jours durera l'éruption, et donc les conséquences sur la santé de la population environnante à long terme. Hier soir, les vents dominants d'ouest laissaient croire aux spécialistes, notamment à Éric Girard, du département des sciences de la terre et de l'atmosphère, à l'UQAM, que les pays scandinaves seraient touchés, l'Angleterre certainement, et au moins le nord de la France.

Jusque dans la stratosphère

Combien de jours avant que les cendres ne se dispersent? «Ça dépend, explique M. Girard. S'il y a de la pluie ou de la neige, les cendres seront en quelque sorte lavées. Mais ce type d'éruption propulse les cendres à des altitudes extrêmes. Si elles atteignent la stratosphère, ce qui est probable, il n'y aura pas de pluie ou de neige pour les éliminer.»

Le professeur cite en exemple le volcan Pinatubo, aux Philippines, dont la force de l'éruption a atteint la stratosphère au début des années 90. Et a engendré un refroidissement de la région. Il ajoute que le ciel européen touché risque d'être voilé longtemps, selon la durée de l'éruption, difficile à estimer pour le moment.

«Ce sera un peu comme si le ciel était couvert de nuages de type cirrus, ajoute le spécialiste de l'UQAM. Un peu comme ce qu'on avait au-dessus de nos têtes hier, à Montréal. Un nuage formé à très haute altitude. Il est clair que les cendres ont le potentiel d'affecter le rayonnement solaire.»

Quant à l'impact des cendres sur les avions, ce n'est pas la visibilité qui est en cause mais la mécanique des réacteurs. En 1982, l'ensemble des réacteurs lors d'un vol de la British Airways avait perdu toute puissance en traversant un nuage de cendres au-dessus de l'Indonésie. Il avait fait une chute de plusieurs milliers de pieds avant de toucher une nappe d'air non polluée, ce qui avait pu permettre à ses moteurs de redémarrer. On rapporte aussi le cas d'un Boeing 747, en 1989 qui avait perdu 4000 m d'altitude après être passé à travers les cendres projetées par le volcan Redoubt, en Alaska. Ce qui avait provoqué l'arrêt de ses quatre réacteurs. L'avion avait réussi à les faire redémarrer.