Depuis le début de la crise de la listériose, plusieurs critiques ont déploré que seulement 2 % des viandes sortant des usines canadiennes soient inspectées. Mais augmenter significativement cette proportion est impossible et inutile, selon une microbiologiste de l'Université du Manitoba.

«On ne peut pas inspecter toutes les pièces de viande qui sortent des usines, explique Chris Holley en entrevue téléphonique. Les inspections fonctionnent un peu à la manière des sondages et des inspections de sécurité dans les aéroports: on calcule le nombre d'échantillons nécessaires, on s'assure qu'ils soient représentatifs de l'ensemble du lot, et s'il n'y a pas de problème, on peut dire que le lot est sécuritaire avec une certaine probabilité.» Cette probabilité est l'équivalent du «19 fois sur 20» des sondages, mais dans le cas de l'agroalimentaire, on vise un chiffre plus élevé que 95 %.

Mais le microbiologiste manitobain pense qu'il existe une manière encore plus efficace de garantir l'innocuité d'un lot de viandes froides: l'inspection à l'entrée de l'usine de toutes les pièces de viande, puis le contrôle des possibilités de contamination à chaque manipulation. «Par exemple, pour une pièce de viande de 400 kg, on ferait quatre ou cinq ponctions de 100 g à la surface, et deux ou trois à une profondeur de 10 cm. Si tout va bien, on peut être raisonnablement certain que cette viande n'est pas contaminée.»

La crise de la listériose illustre une différence fondamentale entre les approches canadienne et américaine, selon M. Holley. «Aux États-Unis, il y a une tolérance zéro pour la Listeria dans les viandes. Au Canada, on trouve qu'il s'agit d'une approche injuste, parce que la Listeria est tolérée sur les fruits et légumes. Or, le danger est aussi sinon plus grand pour les fruits et légumes, qui ont été responsables de la majorité des éclosions de listériose au Canada depuis 2000.»