Après des années de restrictions pandémiques, les groupes d’amis, et même de parfaits inconnus, peuvent enfin se réunir dans la chaleur des refuges. Nous profitons de ce grand retour pour aller à la chasse aux fantômes… ceux des monts Valin, bien sûr.

Au Centre de découverte et de services du parc national des Monts-Valin, on nous suggère toutefois de réduire nos attentes : une récente tempête de vent a fait fuir les fantômes – les rafales ont soufflé une partie de la neige qui recouvrait les conifères et leur donnait l’aspect de fantômes. Bah, nous réussirons certainement à en débusquer quelques-uns.

Notre premier objectif est le refuge L’Ulysse, là-haut dans le massif des monts Valin. Nous pourrions faire une partie du trajet en navette (le fameux Fantôme Express), mais il serait dommage de manquer les très beaux sentiers qui mènent aux refuges. Nous optons cependant pour le transport d’un bagage. Un peu de luxe ne fait de mal à personne.

Plusieurs trajets s’offrent à nous. Nous choisissons le populaire sentier qui mène au belvédère de la Tête de Chien. Comme il est bien tapé par le passage des randonneurs, nous accrochons les raquettes au sac à dos et procédons à pied.

  • Des bouleaux se réfugient dans de petits défilés.

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    Des bouleaux se réfugient dans de petits défilés.

  • Un jeu de devinette amusant pour agrémenter la randonnée : trouvez la bête !

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    Un jeu de devinette amusant pour agrémenter la randonnée : trouvez la bête !

  • Le vent souffle sur la Tête de Chien.

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    Le vent souffle sur la Tête de Chien.

  • Le belvédère de la Tête de Chien offre une belle vue sur la région du Saguenay.

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    Le belvédère de la Tête de Chien offre une belle vue sur la région du Saguenay.

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En chemin, nous pouvons jouer à un petit jeu de devinette organisé par les employés du parc : des panneaux fournissent divers indices pour deviner l’identité d’une bête mystère. Réussir à identifier l’animal dès le premier indice confère un grand nombre de points.

À la Tête de Chien, le panorama est évidemment spectaculaire. Une autre chose éveille notre attention : un peu plus bas, on voit de grosses traces rondes dans la neige. Ah ah ! Voilà un autre jeu de devinette, mais bien réel cette fois-ci : quelle est la bête mystère ? Je penche pour le lynx, mais malheureusement, il n’y a pas de panneau à côté pour me donner la bonne réponse.

Après le belvédère, nous empruntons un sentier moins achalandé qui nécessite les raquettes.

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Des étangs gelés et enneigés acceuillent les skieurs et les raquetteurs.

Cette portion est magnifique : l’étroit sentier contourne de gros blocs de pierre couverts de neige et zigzague entre les bouleaux.

Un peu plus haut, le vent a entassé et plaqué la neige à flanc de colline. Je fais un pas, je vois des fissures apparaître et une plaque commence à glisser vers le bas. Rien de bien dangereux, mais ça donne une idée, à petite échelle, du phénomène d’avalanche liée aux plaques de vent.

De belles rencontres

Après cette petite aventure, nous parvenons au refuge L’Ulysse. Une belle surprise nous attend : des skieurs, Emanuel Pinochet et Charles Michaud, sont arrivés avant nous et ont allumé le feu. Il fait délicieusement chaud.

C’est tout le plaisir de partager des refuges avec des inconnus. Pendant la pandémie, seules les bulles familiales pouvaient profiter des refuges. C’est maintenant le retour à la normale. On peut faire de belles rencontres.

  • Emanuel Pinochet mitonne un bon petit plat.

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    Emanuel Pinochet mitonne un bon petit plat.

  • Au refuge, des inconnus deviennent des amis et s’affrontent dans un jeu de dés.

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    Au refuge, des inconnus deviennent des amis et s’affrontent dans un jeu de dés.

  • Emanuel Pinochet quitte le refuge L'Ulysse en ski nordique.

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    Emanuel Pinochet quitte le refuge L'Ulysse en ski nordique.

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Nous jasons, comparons nos expériences, essayons de trouver des connaissances communes et finissons par jouer aux dés ensemble en sirotant une petite boisson. Nous partageons aussi les corvées de feu (mettre une bûche dans le poêle une fois de temps en temps pendant la nuit pour ne pas se réveiller dans un refuge glacial au petit matin) et d’eau (aller chercher de la neige immaculée pour la faire fondre). Quelques aiguilles d’épinettes se sont quand même glissées dans la neige, ce qui donne un très bon goût à l’eau.

Une petite neige est tombée pendant la nuit. On peut voir clairement les traces d’un petit animal qui a exploré les abords du refuge. Chouette, une autre devinette, un autre animal mystère. Après avoir consulté une petite brochure sur les traces d’animaux, je décrète qu’il s’agit d’une martre d’Amérique et je la baptise Pénélope.

Nos nouveaux amis skieurs quittent le refuge L’Ulysse avant nous. Nous les suivons sur un joli sentier qui longe des étangs gelés baignés de soleil et qui s’enfonce entre des parois rocheuses.

Le massif des monts Valin a été formé lorsque du magma s’est refroidi sous la surface du sol, devenant une masse d’anorthosite très dure. La surface a fini par s’éroder, laissant cette masse émerger. Le passage des glaciers a façonné un peu plus le massif pour lui donner son aspect actuel.

  • Près de la vallée des fantômes, la neige se fait plus épaisse.

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    Près de la vallée des fantômes, la neige se fait plus épaisse.

  • De petits fantômes se pressent près des sentiers.

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    De petits fantômes se pressent près des sentiers.

  • Un randonneur rigolo a dessiné un visage sur ce petit fantôme.

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    Un randonneur rigolo a dessiné un visage sur ce petit fantôme.

  • Le refuge Le Fantôme est tout près.

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    Le refuge Le Fantôme est tout près.

  • Arrivée dans le secteur du refuge Le Fantôme.

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    Arrivée dans le secteur du refuge Le Fantôme.

  • Les toits enneigés du refuge Le Fantôme et du relais pour les randonneurs venant pour une seule journée.

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    Les toits enneigés du refuge Le Fantôme et du relais pour les randonneurs venant pour une seule journée.

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En nous approchant du refuge Le Fantôme, nous commençons à voir des épinettes qui ploient sous la neige. Le vent a fait son œuvre, les plus grands conifères ont perdu leur couche blanche.

Mais à leur pied, à l’abri, il reste de petits fantômes bas sur pattes. Il y a également des épinettes qui n’ont gardé qu’un amas de neige à leur sommet : elles semblent ainsi avoir une tête de guimauve.

Nous montons jusqu’au pic Dubuc. À 984 m, c’est le sommet de tout le massif des monts Valin. La vue est magnifique, mais il vente énormément. La température chute rapidement et nous amorçons notre retraite vers le refuge.

  • Le pic Dubuc constitue le sommet du massif des monts Valin.

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    Le pic Dubuc constitue le sommet du massif des monts Valin.

  • Un des nombreux points de vue spectaculaires du parc national des Monts-Valin.

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    Un des nombreux points de vue spectaculaires du parc national des Monts-Valin.

  • On a une petite impression d’une grande randonnée alpine.

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    On a une petite impression d’une grande randonnée alpine.

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Une fois encore, Emanuel et Charles sont arrivés avant nous et ont mis quelques bûches dans le poêle. C’est un plaisir de se faire un bon repas à la chaleur, de prendre sa revanche au jeu de dés. Quelqu’un jette cependant un coup d’œil dehors : le ciel est complètement dégagé, les étoiles sont brillantes, la constellation d’Orion s’étend au-dessus du refuge. C’est une vision extraordinaire, mais il est quand même agréable d’aller se réfugier à l’intérieur dans un bon sac de couchage pour la nuit.

D’autres devinettes avant de rentrer

Le soleil est au rendez-vous au petit matin. Nous nous emmitouflons pour notre dernière journée de raquette. Le sentier descend, descend sans cesse. Des traces fraîches émaillent la neige. Le jeu de devinette se poursuit : un renard est passé ici, reconnaissable à ses pas faits l’un devant l’autre.

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Après trois jours, c’est la descente vers le piedmont du massif des monts Valin.

Dans une clairière, il semble y avoir eu un conventum de martres : il y a des traces qui vont et viennent partout. Mais peut-être s’agit-il d’une seule et même martre hyperactive.

Sur le lac Gabriel, on voit une masse noire loin des berges. Un ours ? Non, il devrait dormir dans sa tanière. Un castor ? Peut-être. Mais la masse ne bouge pas alors qu’on approche. Et il n’y a aucune trace autour, ce qui laisserait croire qu’il s’agit d’un simple rocher (en règle générale, les rochers ne laissent pas de traces de pas dans la neige).

Alors que le sentier finit de dévaler le massif, des traces laissent deviner un drame. Un lièvre a fait plusieurs bonds et puis, plus rien, les traces s’arrêtent au milieu de nulle part. De toute évidence, il y a un hibou ou une chouette qui se régale quelque part.

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Lumière de fin de journée sur les monts Valin

Un peu avant le refuge Hibernal (où il aurait été possible de passer une nuit supplémentaire), des traces reconnaissables entre toutes apparaissent. Ce sont celles d’un orignal. Pas fou, il apprécie le fait de marcher de temps en temps sur un sentier bien tapé. Je regarde à droite, à gauche, je ne le vois pas. Mais peut-être m’observe-t-il calmement, bien caché dans la forêt. Après tout, nous sommes chez lui ici. Nous, nous ne faisons que passer.